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L'expérience est-elle instructive ?

Publié le 28/03/2009

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• Définissez avec précision les concepts :

 — expérience : savoir ou savoir-faire acquis par l'exercice de la vie (sens courant). Ce qui, dans la connaissance, est acquis (sens philosophique). Action d'expérimenter. Observation provoquée pour le contrôle de l'hypothèse (sens prédominant en méthodologie et en épistémologie).  — instruire / instructive : mettre en possession de connaissances (nouvelles). Donner une leçon, un enseignement. Faire acquérir des connaissances.

  • A) Thèse : l'expérience est formatrice et instructive.

 Aucun a priori ne commande l'expérience et la conscience est fondamentalement réceptive.

  • B) Antithèse : c'est la raison qui nous forme et nous instruit. L'activité de l'esprit et les lois a priori de la pensée rendent possible toute expérience, laquelle n'être pas instructive en elle-même.
  • C) Synthèse : la raison et l'expérience sont en dialogue pour nous instruire.

 C'est la réflexion sur l'expérience qui est formatrice.

« directement à une réponse affirmative.

Expérience, ne l'oublions pas, vient du latin -experiri; faire l'essai de.

Or,faire longuement l'essai de quelque chose, n'est-ce pas élargir ses propres aptitudes ? En ce sens, l'expérience -conçue comme ensemble de données - nous instaurait directement.

Ainsi parle-t-on, par exemple, de «l'expériencedu monde» ou «des hommes», de «l'expérience des affaires» ou «d'un métier», pour signaler l'élargissement dusavoir, en tant que fruit des données ou de la réception d'un donné.

Oui, les faits semblent nous instruiredirectement, s'il faut en croire le langage courant.Toutefois, les faits et le donné nous forment-ils en eux-mêmes ? À nous de savoir en faire usage.

D'ailleurs, le mot«expérience», bien plus qu'il ne désigne le fait d'éprouver passivement, renvoie à la pratique que l'on a eue dequelque chose, considérée ainsi comme un enseignement.

Dans cette perspective, le terme d'expérience se nuanceet indique le contact formateur du moi avec les choses.

Voici qui est déjà beaucoup plus intéressant : et, en effet,ce qui semble alors mis en jeu, ce n'est point tant l'accumulation des données que notre capacité de comprendre etde réfléchir sur elles.

Il ne s'agit pas tellement, dans la vie quotidienne, d'accumuler et d'éprouver quelque chose oudes choses, en quantité, que de tirer du réel des leçons, dues à sa propre intelligence.

En somme, l'expériencedésigne ici une pratique formatrice résultant de notre discernement, et c'est ce discernement qui instruit et apporteun enseignement.

Ce n'est jamais le réel qui nous forme, mais bien nous qui nous formons.Les exemples seraient ici nombreux : s'instruire dans la conduite de la vie, ce n'est pas juxtaposer et additionner lesdonnées, mais réfléchir sur les erreurs passées, mettre à jour des lignes de force nouvelles qui devront êtrerespectées, de nouvelles valeurs, de nouvelles tactiques.

L'expérience sociale représente une pratique intelligenteet non point une simple épreuve des faits et des données.

Il en est de même des voyages.

L'expérience de celui quivoyage (passivement) peut être infiniment pauvre et nous savons tous qu'un voyage réussi résulte de la maîtrised'une culture, d'un passé, d'un lieu.

C'est notre capacité de réflexion qui est ici mise en jeu, par opposition à lasottise de ces voyageurs, qui s'imaginent que les impressions ou données les instruisent.Ainsi, dans la vie courante, l'expérience en vient à désigner une pratique réfléchie, qui seule peut véhiculer unsavoir, des connaissances, un pouvoir réel sur les choses, le monde et nous-mêmes.

Mais nous n'avons jusqu'iciabordé que l'expérience dans la vie quotidienne.

Or, il existe une sphère où le terme d'expérience joue-un rôlefondamental.

C'est la sphère scientifique.

Il nous faut donc atteindre un second niveau d'étude. B) L'expérience scientifique : une invention théorique issue de la raison. Dans le domaine des sciences, l'expérience nous instruit-elle ? Plus précisément, quel sens faut-il donner à ce termed'expérience pour qu'elle soit considérée comme constitutive du savoir ? Que désigne exactement une expériencepour être instructive ?Elle pourrait signifier un fait brut qui nous formerait, un phénomène qui véhiculerait un savoir, une observationsignificative.

Mais, à vrai dire, l'expérience scientifique qui instruit ne désigne pas tant une observation passive etdésarmée qu'une question que l'homme pose à la nature.

Si nous restons passifs en lace des données, sansréfléchir, sans questionner, nous n'apprendrons rien ! L'expérience qui enseigne est active : elle est provoquéecomme moyen de s'instruire, en particulier pour contrôler une hypothèse.

Il s'agit moins d'enregistrer passivement leréel que de le reconstruire pour pouvoir le connaître.

«L'expérience» nous instruit-elle ? S'il faut considérerl'expérience comme une simple observation passive, comme un contact avec le monde extérieur, sans la moindreinitiative personnelle, nous dirons que l'expérience n'instruit pas.

Ce qui instruit, c'est l'expérience au sensdynamique du terme, comme interrogation méthodique et réglée des phénomènes.

On peut prendre ici l'exemple deGalilée, qui ne put s'instruire qu'en raisonnant, au moyen d'une méthode mathématique et d'une expérience guidéepar la raison.

Ce n'est jamais la simple expérience, c'est-à-dire la connaissance sensible acquise passivement par lessens qui est guide et savoir mais bien l'expérience conçue comme recherche expérimentale et rationnelle.

AinsiGalilée, le célèbre astronome italien, qui fournit au système copernicien sa base scientifique, fut-il instruit par uneexpérience théorique : «La manière dont Galilée conçoit une méthode scientifique correcte implique uneprédominance de la raison sur la simple expérience, la substitution de modèles idéaux (mathématiques) à une réalitéempiriquement connue, la primauté de la théorie sur les faits» (Koyré, Études d'histoire de la pensée scientifique, p.83, NRF).L'expérience (passive) est donc inutile et n'apprend rien.

Ce qui apprend quelque chose, c'est la substitution decalculs au réel immédiat, de schémas a priori aux données brutes.

C'est en ce sens que l'on peut dire que l'onexpérimente avec sa raison.

En somme, l'observation passive n'instruit pas : ce qui est instructif, c'est l'activeexpérimentation qui organise, interprète et comprend.Ici, nous pouvons faire référence à Kant, qui a fortement souligné ces points.

L'expérience en elle-même, non guidéepar les concepts ou catégories, serait parfaitement stérile.

La mathématique et la physique entrèrent dans la voieroyale de la science le jour où les chercheurs comprirent qu'il ne faut pas se laisser guider uniquement par les faits,mais introduire en eux le pouvoir de la raison.

Quand Thaïes imposa aux figures géométriques un traitementrationnel, il fit entrer la mathématique dans la route de la science.

Il faut donc que le concept ordonne l'expériencepour que le savoir se constitue.

Ce qui instruit, c'est l'expérience guidée par la raison, conçue comme faculté de l'apriori.

«Que toute connaissance commence par l'expérience, cela ne soulève aucun doute.

En effet, par quoi notrepouvoir de connaître pourrait-il être éveillé et mis en action, si ce n'est par des objets qui frappent nos sens [...].Mais si toute notre connaissance débute avec l'expérience, cela ne prouve pas qu'elle dérive toute de l'expérience»(Kant, Critique de la raison pure, Introduction de la 21' édition, p.

31, PUF).Ainsi, ce qui nous instruit, ce n'est jamais l'expérience passive, mais l'expérimentation et l'interrogation méthodiquedes phénomènes : c'est la Raison qui est la source principale de la connaissance.

Nous affirmerons donc le primat dusujet sur l'objet et des structures a priori sur la matière de la connaissance.

L'expérience modelée par la raison nousinstruit, et seulement elle : il faut qu'elle soit, en effet, structurée par des cadres a priori de la pensée, pourcomporter un enseignement et enrichir nos connaissances.Mais l'homme n'est pas seulement un être engagé dans une expérience quotidienne qu'il tente de comprendre, ni un. »

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