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L'expérience instruit-elle ?

Publié le 11/08/2004

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Que peut nous apporter l'expérience ainsi acquise au quotidien ?

- Elle se présente spontanément au sujet, qui la «reçoit«: il reste passif, et interprète ce qu'il voit ou éprouve en fonction de sa propre subjectivité.- Dans ces conditions, et qu'elle soit « heureuse « ou «malheureuse«, l'expérience quotidienne ne peut avoir de sens que par rapport aux normes ou valeurs que le sujet possédait déjà. Elle s'inscrit dans un parcours singulier - d'où, dans la façon dont elle est rapportée, l'insistance fréquente sur son caractère exceptionnel, et l'attention au détail «significatif«.- L'accumulation de telles expériences apprend, dit-on, « à vivre«. Elle serait donc orientée vers l'acquisition d'une « sagesse « - au sens populaire - et non d'un savoir théorique. Ce qui lui interdit d'accéder à ce dernier, c'est précisément sa singularité - le savoir exigeant au contraire l'universalité. C'est aussi bien la dimension purement sensible, empirique, ou affective, alors que, pour qu'il y ait savoir, il faut des concepts et une élaboration abstraite.

Partie du programme abordée : Théorie et expérience.    Analyse du sujet : Le sujet peut être pris à différents niveaux : celui de la pédagogie et de l'expérience individuelle formatrice de la personnalité ; la question est alors celle de la valeur de l'expérience comme savoir Mais aussi, éventuellement, à un niveau plus métaphysique : l'expérience peut-elle se produire en dehors d'un champ du savoir déjà balisé et structuré parla nature de l'homme elle-même ? Dans quelle mesure instruit-elle ?    Conseils pratiques : Attachez-vous à bien délimiter le concept d'instruction (par rapport à éducation, par exemple), et celui d'expérience. Demandez-vous si la simple instruction par l'expérience est nécessaire, ou suffisante, etc.    INTRODUCTION  Le langage quotidien abonde en expressions vantant les apports de l'expérience ou supposant qu'elle apporte à un sujet des connaissances utiles. Mais on prendra garde que le terme même d'« expérience « est ambigu, puisqu'il désigne indifféremment le vécu immédiat ou le montage scientifique.

 

  • I. L'EXPÉRIENCE QUOTIDIENNE

 

  • II. L'EXPÉRIENCE SCIENTIFIQUE
  • III. SAVOIR ET «OPINION DROITE«

 

« Bachelard considérait l'expérience immédiate comme le premier obstacle à laconnaissance scientifique.

Les informations fournies par les sens, le vécu sontsource d'erreurs.

Ainsi, par exemple, de ce que cette pierre tombe plus viteque ce morceau de liège, j'en viendrai à établir une distinction entre «lord» et«léger» et à conclure que la vitesse de la chute des corps est liée à leurmasse.

Or les scientifiques ont établi que, dans le vide, tous les corpstombent à la même vitesse.

La formule scientifique par Galilée de la loi de lachute des corps e= ½ gt2 contredit les données communes de la perception.L'épistémologie de Bachelard réactualise l'idée essentielle du platonisme : lascience se constitue par ce geste intellectuel qui récuse l'expérience.

PourBachelard (comme pour Platon) le savoir scientifique commence par unerupture avec l'expérience ; par se méfier des synthèses spontanées de laperception.

Car l'expérience première est un obstacle et non une donnée.C'est même le premier obstacle que la science doit surmonter pour seconstruire.

C'est que la science est ennuyeuse : le réel auquel elle a affaireest filtré, classé, ordonné selon des relations intelligibles, quantifié, prêt à lamesure.

Au contraire, l'expérience première, spontanée, parle à l'imaginaire.

L'« observation première se présente comme un libre d'images : elle estpittoresque, concrète, vivante, facile.

Il n'y a qu'à la décrire et s'émerveiller».

Devant elle, nous sommes au spectacle.

Entre l'expérience spontanée dufeu par exemple et la connaissance des lois de la combustion, quel écart ! D'un côté un univers qualitatif et affectif : le feu qui crépite dans l'âtre, le bien-être, les couleurs, la fascination, lefeu qui « chante » et qui « danse » ; de l'autre un processus physico-chimique dépouillé de toute poésie, une simplemodification quantitative des éléments.La première leçon de l'épistémologie de Bachelard est donc bien platonicienne : l'anti-empirisme.

L'expérience estd'abord du domaine du préscientifique.

L'esprit scientifique doit se constituer contre elle, contre la nature et sesenseignements immédiats.

L'empirisme est la pente la plus naturelle et la plus paresseuse de l'esprit ; son axe etcelui de la science sont inverses l'un de l'autre.

Cela suppose bien, chez Platon, une conversion intellectuelle, undétournement des habitudes spontanées de l'âme, une pédagogie de la rupture : « L'esprit scientifique ne se formequ'en se réformant ».

La connaissance objective mérite une psychanalyse au cours de laquelle l'esprit scientifiquepourra se constituer en inhibant et en refoulant les pulsions expansives de l'observation spontanée.Pour parvenir à l'esprit scientifique, il est donc indispensable d'éliminer de la connaissance les projectionspsychologiques spontanées et inconscientes, d'opérer ; comme le dit Bachelard une « psychanalyse de laconnaissance ».Cette psychanalyse est bien difficile, peut-être jamais achevée.

Elle est en tout cas l'oeuvre des siècles et nous nedevons jamais oublier que la science est une aventure récente.

Il y a des ho sur terre depuis plusieurs centaines demilliers d'années et la physique scientifique date de XVII ième, la chimie du XVIII ième, la biologie du siècle dernier.En effet, la connaissance spontanée du réel est antiscientifique.

C'est une connaissance « non psychanalysée » oùnous projetons nos rêves et nos passions.

C'est ainsi que la « physique » d'Aristote est encore toute mêlée depsychologie.

La cosmologie céleste fait appel à la psychologie de l'âme bienheureuse, la physique terrestre d'Aristotes'éclaire par la psychologie de l'âme inquiète.

Aristote distingue deux sortes de corps, les lourds et les légers.

Lescorps légers (la fumée) vont spontanément vers le haut alors que les graves (une pierre) se meuvent d'eux-mêmesvers le bas.

Le haut et le bas représentent respectivement le « lieu naturel » des corps légers et des graves.

Lescorps inertes sont donc involontairement assimilés à des hommes qui s'efforcent de retrouver leur « chez-soi ».L'accélération de la pesanteur s'explique par le fait que le pierre « désire le bas » et presse son mouvement commeles chevaux qui, dit-on, vont plus vite lorsqu'ils « sentent l'écurie » .

En langage psychanalytique, on pourrait direqu'Aristote projette sur sa dynamique un « complexe du home », autrement dit qu'il prête aux corps inertes un goûtparticulier pour leur domicile pour leur domicile d'élection.« Il ne faut pas voir la réalité telle que je suis » dit Eluard.

Mais précisément je vois spontanément le monde commeje suis, et il faut tout un travail pour le voir comme il est ; ce travail est le travail de la science.

L'idéal est deparvenir à poser des relations objectives qui ne soient plus le reflet de mes dispositions subjectives.

Pour la science,le ciel cesse d'être un sujet grammatical, une substance dont le bleu serait l'attribut : le bleu du ciel n'est que l'effetde l'inégale diffusion des rayons du spectre solaire.Ce qui complique la tâche de l'activité scientifique et de l'éducation scientifique, c'est que je ne projette passeulement sur le monde mes sentiments personnels mais encore toutes les dispositions que je tiens de la traditionsociale.

« L'esprit naïf n'est pas jeune, il est même très vieux » (Bachelard) Nous projetons spontanément sur lemonde tout ce que qu'on nous a enseigné.

C'est ainsi que les gens du moyen-âge voyaient des diables cornus àtous les détours de chemins.

Aujourd'hui nous projetons sur le ciel une culture pseudo scientifique mal assimilée :nous voyons des « OVNI ».Comment parvenir à l'objectivité scientifique ? Si nous n'avons aucune vraie culture scientifique, nous serons tentésde répondre ; il suffit d'éliminer ce qui vient de nos passions, de la tradition, de l'imagination.

Il faut revenir à uneperception originelle des choses, laisser parler les faits tels qu'ils sont.

Mais, c'est précisément la perceptionspontanée, originelle qui est chargée de subjectivité, tandis que la réalité scientifique, objective, doit êtrepéniblement construite à partir d'un travail fort complexe.

Ce qui est immédiatement perçu est subjectif ; ce qui estobjectif est au contraire « médiat », construit par détours et artifices.

L'erreur est première, la vérité est toujoursseconde disait Bachelard.. »

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