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Faut-il craindre le regard des autres ?

Publié le 12/03/2004

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·        Car, en premier lieu, l'idée même d'une vérité ou d'une objectivité suppose le rapport à autrui, ne serait-ce qu'à titre d'exigence idéale. C'est l'accord possible ou exigé sur un monde commun - ou encore « l'intersubjectivité » - qui garantit la possibilité d'une vérité qui dépasse la sphère privée de ma croyance. Sans autrui, le monde serait réduit au point de vue que j'en ai : il serait simple représentation. La présence d'autrui, comme extériorité radicale, est aussi le signe de l'extériorité du monde et de sa présence. ·        En second lieu, c'est l'existence d'autrui qui donne au monde épaisseur et relief. Elle l'enrichit d'autres points de vue possibles, à travers le langage et la communication, non seulement j'accède à un autre univers de sens, mais encore c'est mon propre univers qui se transforme et se modifie. ·        Mais autrui n'est pas seulement ce qui donne sens et richesse au monde. Il est aussi celui qui m'oblige au respect. Au-delà de la sympathie et du partage, comme au-delà de toute lutte pour la reconnaissance, il est à distance, parce qu'autre que moi. Respecter autrui, et son regard, c'est alors le poser comme limite à mon droit naturel d'user de toutes choses et des autres à mon profit.

« légitimation aura a fortiori des conséquences en ce qui concerne l'appréhension de marelation à autrui. ® Pourtant, il ne faudrait pas en rester à la problématique superficielle de la crainte duregard d'autrui au sens ou du même coup une relation de méfiance s'instaure entre moiet l'autre, mais bien au contraire : il faut encore chercher à comprendre en quoi cetteméfiance, que peut générer le regard de l'autre sur moi, instaure une relation deméfiance de soi à soi.

Car c'est bien encore la crainte d'être jugé, d'être étiqueté etcatalogué qui est ici mise à la question à travers le problème de la légitimité d'une tellecrainte. ® Il s'agit alors d'étudier à la fois les rapports de soi à autrui, mais aussi, et peut-êtreplus profondément et plus fondamentalement, les rapports de soi à soi en tant qu'il estmédiatisé par le rapport de l'autre – et plus précisément ici par son regard. Problématique Peut-on affirmer de droit que le regard d'autrui doit être, de manière impérative et catégorique, craint, c'est- à-dire doit être tenu à distance par une peur presque imaginaire d'un risque fatal ? La relation à autrui, en tant quele regard est le geste inaugurant toute communication par delà le discours, s'instaure-t-elle dans une peur primitivede l'autre ? Peut-on considérer autrui que comme un juge dont le seul regard va délivrer la sentence ? Ou est-ceencore trop réducteur pour définir essentiellement la relation qui lie l'autre à soi ? C'est donc bien la relation, dans son geste inaugurale, aux autres qui est ici mise à la question. Plan I- Le regard de l'autre : Ne pas craindre pour vaincre · Autrui est à la fois le même et l'autre ; et c'est cette double structure qui le caractérise.

Il y a par conséquent deux façons de méconnaître autrui : on peut nierqu'il soit différent, ou nier qu'il soit semblable, ce qui, au fond, revient au même.Mais autrui n'est ni autre que moi, ni identique à moi.

Proximité et distance,familiarité et étrangeté qualifient mon rapport à l'autre.

Autrui apparaît comme unefigure contradictoire et énigmatique, qui fascine autant qu'elle inquiète.

Dans cetteperspective, la crainte imaginaire du regard de l'autre conduit au phénomène qu'onappelle souvent « barbarie » : nier le regard de l'autre comme étant un regardhumain sur soi, pour en nier a fortiori la force de jugement.

Mais c'est aussi, etcertainement du même coup, refuser d'affronter sa peur – de la dévalorisation, de ladéfaite, etc.

La relation à autrui semble donc, par l'intermédiaire du regard,s'instaurer par un conflit initial, celui de la reconnaissance – refuser de se confronteraux regards des autres revient à se soumettre. · Nous savons que les autres existent nécessairement, et le solipsisme est une position, en ce sens, intenable [= doctrineselon laquelle le sujet est seul au monde.]Mais s'en tenir à cette évidence interdit decomprendre pourquoi la reconnaissance de soipar l'autre et de l'autre par soi est à la foisnécessaire et conflictuelle.

Hegel présente le premier moment de cette reconnaissancecomme celui de la lutte rivale de deuxconsciences qui s'affirment d'abord dans leurnégation réciproque.

Chacune en effet veutêtre reconnue, et donc en quelque sens« regarder » au sens fort du terme, parl'autre, parce qu'enfermée dans la simplecertitude subjective d'elle-même, elle estencore privée de vérité objective.

La véritéimplique en effet une relation à un objet et laconscience ne peut être objet que pour unsujet, c'est-à-dire pour une autreconscience.

Autrement dit, seule lareconnaissance de son existence commeconscience de soi par une autre consciencede soi peut transformer la certitude subjective en vérité (Propédeutique philosophique, Deuxième cours,« phénoménologie de l'Esprit », I, 2 e degré B, § 31 à 34). · On comprend alors qu'affronter le regard des autres est une nécessité pour que. »

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