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FAUT-IL ÊTRE SEUL POUR ÊTRE SOI-MÊME ?

Publié le 15/03/2004

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Conscient de ce qu'il doit aux analyses de Hegel en particulier (« L'intuition géniale de Hegel est de me faire dépendre de l'autre en mon être», L'Être et le Néant, coll. Tel, p. 282), Sartre affirme également que l'homme « ne peut rien être (au sens où on dit qu'on est spirituel ou qu'on est méchant ou qu'on est jaloux), sauf si les autres les reconnaissent comme tel. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence aussi bien qu'à la connaissance que j'ai de moi» (L'Existentialisme est un humanisme, Nagel, pp. 66-67). Un exemple du rôle d'autrui dans la constitution de la conscience de soi : l'analyse sartrienne de la honte Sartre choisit un exemple caractéristique, celui de la honte : «J'ai honte de ce que je suis. La honte réalise donc une relation intime de moi avec moi : j'ai découvert par la honte un aspect de mon être. » Or, je n'ai pas honte seul : « la honte, dans sa structure première, est honte devant quelqu'un [...].

« bien plus, se refuser à toute responsabilité :« Comme le On prédonne tout jugement et toute décision, il ôte à chaque fois au Dasein toute laresponsabilité.

Le On ne court pour ainsi dire aucun risque à ce qu'on l'évoque constamment [...] C'étaittoujours le On et pourtant on peut dire que « nul » n'était là.

»Ce nivellement, cette médiocrité et cette façon d'éviter toute originalité (« Tout ce qui est original estaussitôt aplati en passant pour du bien connu, tout ce qui a été conquis de haute lutte devient objetd'échange ») se révèlent au mieux dans les bavardages sur la mort.En effet, dans la mort, il en va du tout de mon existence : la mort est ce qui est absolument propre et mien.Aussi l'angoisse devant la mort est-elle en quelque sorte l'angoisse devant la liberté, devant notre être aumonde.

Et s' « il est exclu de confondre l'angoisse de la mort avec la peur de décéder », c'est précisémentque « l'angoisse de la mort est angoisse « devant » le pouvoir-être le plus propre, absolu, indépassable ».La capacité d'assumer la possibilité de la mort propre, et par suite de se découvrir comme être au monde ,comme jeté, librement, dans le monde, a donc partie liée avec la capacité du Dasein d'être soi.Or, précisément les bavardages du On à propos de la mort, là encore sombrent dans l'inauthenticité et lerecouvrement.

Il s'agit de camoufler cette mort qui est la mienne en événement, en bien connu.« Si jamais l'équivoque caractérise en propre le bavardage, c'est bien lorsqu'il prend la forme de ce parler surla mort.

Le mourir, qui est essentiellement et irreprésentablement mien, est perverti en événementpubliquement survenant.

»Le discours du On transforme la mort en accident : « le On meurt, propage l'opinion que la mort frapperaitpour ainsi dire le On ».

Là encore il s'agit de se démettre de ses responsabilités et même de soi-même.Ces bavardages interdissent à l'angoisse de la mort de se faire jour : en ce sens, ils privent l'individu de lapossibilité de l'accès à son être propre.

« Dans l'angoisse de la mort, le Dasein est transporté devant lui-même[...] Or le On prend soin d'inverser cette angoisse en une peur d'un événement qui arrive.

»En faisant miennes ces ratiocinations, sans doute gagnerais-je d'être rassuré, d'être indifférent à ce qui m'estle plus propre, mais au prix de l'aliénation, de la perte de soi.Mais si les analyses d'Heidegger ne se donnaient que comme une dénonciation de la pression des bavardagesde la masse, de la dictature anonyme qui régit les rapports humains et interdit à chacun l'accès à lui-même etau monde, elles perdraient de leur pertinence.Le On n'est pas extérieur au Dasein, à l'individu, il est au contraire l'un de ses modes d'être premier etoriginaire.

IL n'y a pas à faire le départage entre individus authentiques ou inauthentiques.« Le Dasein est de prime abord Un et le plus souvent il demeure tel.

Lorsque le Dasein découvre et s'approcheproprement du monde, lorsqu'il s'ouvre à lui-même son être authentique, alors cette découverte du « monde »et cette ouverture du Dasein s'accomplissent toujours en tant qu'évacuation des recouvrements et desobscurcissements, et que rupture des dissimulations par lesquelles le Dasein se verrouille l'accès à lui-même.

»Il n'y a pas d'accès véritable au monde et à soi-même, de façon authentique d'être qui ne se fasse jour àpartir de ce fond originaire d'inauthenticité.

Le « On » n'est personne, mais il est un mode d'être de chacun.La dictature du « on » dont parle Heidegger est d'abord la façon commune de se préoccuper d'autrui.

C'estaussi ce que Heidegger nomme « déchéance », c'est-à-dire la façon de ne pas être soi.

L'inauthenticité estun accès barré à notre être propre, une aliénation de soi, au profit de l'anonyme. Les us et coutumes m'obligent à porter un masqueEn groupe, il faut toujours plaire, être conforme à une certaine image sociale.

Le jeu social m'empêche d'êtremoi-même.

Je suis toujours tenu de masquer ce qui fait de moi un individu unique et spécifique.

Que l'onsonge par exemple au mimétisme de la mode.

La vie en société me prive de la liberté de dévoiler messentiments et mes pensées les plus sincères.

Si tous les hommes se disaient toujours la vérité, le mondedégénérerait dans le chaos le plus total. La vie sociale n'est qu'un jeu de rôlesDénonçant la comédie humaine, Pascal distinguera les grandeurs d'établissement et les grandeurs naturelles.. »

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