Devoir de Philosophie

faut il se méfier de l'évidence?

Publié le 11/04/2005

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« Les idées qui sont claires & distinctes ne peuvent jamais être fausses « dit Spinoza. Descartes écrit de son côté : « Et remarquant que cette vérité : je pense donc je suis était si ferme et si assurée que toutes les plus extravagantes suppositions étaient incapables de l'ébranler, je jugeais que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de la philosophie.... Après cela je considérai en général ce qui est requis à une proposition pour être vraie et certaine, car puisque je venais d'en trouver une que je savais être telle, je pensais que je devais aussi savoir en quoi consiste cette certitude. Et ayant remarqué qu'il n'y a rien du tout en ceci : je pense donc je suis, qui m'assure que je dis la vérité sinon que je vois très clairement que pour penser il faut être : je jugeais que je pouvais prendre pour règle générale que les choses que nous concevons fort clairement et fort distinctement sont toutes vraies. « C'est donc dans l'intuition de l'évidence des idées claires et distinctes que Descartes situe le critère du vrai ; une perception claire de l'entendement étant « celle qui est présente et manifeste à un esprit attentif « et « distincte, celle qui est tellement précise et différente de toutes les autres, qu'elle ne comprend en soi que ce qui paraît manifestement à celui qui la considère comme il faut. « (« Principes «, I, 45). [Sur l'évidence, les préjugés...] Cette conception de la vérité peut être dangereuse. Car l'évidence est mal définie. Nous éprouvons un sentiment d'évidence, une impression.

▪ Doit-on adopter, à l’égard des choses qui nous semblent évidentes, cet état d’esprit qu’on appelle la méfiance ?

Si le devoir est une règle par laquelle on s’oblige, on doit avoir des raisons de s’obliger ainsi ; d’où cette question : quelles seraient les raisons qui nous obligeraient à adopter, à l’égard de l’évidence, un tel état d’esprit ?

On doit travailler à la mise au jour de ces différentes raisons. Ce qui implique que nous distinguions différents types d’évidences – puisque les raisons qu’on aura d’en douter seront également différentes :

-         l’évidence sensible, fondée sur notre expérience sensible (on trouve, chez Descartes, différentes raisons qui nous oblige d’être méfiant à leur égard comme, par exemple, le fait que de telles expériences nous ont tous déjà trompés un jour – mirage, illusion d’optique, etc.) ;

-         l’évidence fondée sur l’habitude, le préjugé, c’est-à-dire un jugement, une idée que l’on accepte sans la remettre en cause (par exemple : « ‘les hommes politiques sont corrompus «) ;

-         l’évidence fondée sur l’autorité (que celle-ci soit religieuse ou scientifique) ; il s’agit du « tenu-pour-vrai « d’une époque (par exemple, on a longtemps tenu pour vrai que la terre était au centre de l’univers) ;

-         l’évidence rationnelle (par exemple : 2+2 = 4 )

« Aussi, pour Leibniz qui juge l'évidence intuitive toujours sujette à caution, le raisonnement en forme fournit l'instrument du vrai, car il dépasse « L'appel aux idées n'est pas toujours sans danger, et beaucoup d'auteurs abusent du prestige de ce terme pour donner du poids à certaines de leurs imaginations ; car nous ne possédons pas l'idée d'une chose du fait que nous avons conscience d'y penser, comme je l'ai montré plus haut par l'exemple de la plus grande des vitesses.

Je vois aussi que denos jours les hommes n'abusent pas moins de ce principe si souvent vanté : « tout ce que je conçois clairement et distinctement d'une chose est vrai et peut être affirmé de cettechose ».

Car souvent les hommes, jugeant à la légère, trouvent clair et distinct ce qui est obscur et confus.

Cet axiome est donc inutile si l'on n'y ajoute pas les CRITÈRES du clair etdu distinct [...] , et si la vérité des idées n'est pas préalablement établies.

D'ailleurs, les règles de la LOGIQUE VULGAIRE, desquelles se servent aussi les géomètres, constituent descritères nullement méprisables de la vérité des assertions, à savoir qu'il ne faut rien admettre o certain qui n'ait été prouvé par une expérience exacte ou une démonstration solide.

Orune démonstration est solide lorsqu'elle respecte la forme prescrite par la logique ; non cependant qu'il soit toujours besoin de syllogismes disposés selon l'ordre classique [...] mais ilfaut du moins que la conclusion soit obtenue en vertu de la forme.

D'une telle argumentation conçue en bonne et due forme, tout calcul fait selon les règles fournit un bon exemple.Ainsi, il ne faut omettre aucune prémisse nécessaire, et toutes les prémisses doivent ou bien être démontrées préalablement, ou bien n'être admises que comme hypothèses, et dansce cas la conclusion aussi n'est qu'hypothétique.

Ceux qui suivront ces règles avec soin se garderont facilement des idées trompeuses.

» Leibniz. L'évidence est un critère de vérité insuffisant, parce que subjectif.

Il repose sur une inspection de l'esprit (la conscience que nous avons de penser à quelque chose).

Il manque donc à la règle cartésienne des idées claires et distinctes un critère objectif, qui nous permette de savoir à quoi reconnaître le clair et le distinct, autrement que par l'attentionque nous y portons. L'évidence peut être trompeuse.

Où trouver alors les critères objectifs du clair et du distinct, et donc de la certitude ? Dans les règles de la logique, c'est-à-dire dans le respect de la forme logique du raisonnement, dont la non-contradiction est la principe le plus universel.

Le syllogisme des Anciens en fournit l'exemple.

Les mathématiques aussi, maisLeibniz retient d'elles moins, comme Descartes , la clarté des intuitions que la rigueur du formalisme. Le calcul, manipulation réglée de signes, telle que la conclusion est nécessaire et immanquable, devient la règle suprême de la vérité : règle machinale, mais par conséquent plus sûre et plus objective que l'appel à l'évidence. On peut qualifier la conception cartésienne d'intuitionnisme et lui opposer le formalisme de Leibniz . Conclusion: Toutefois, et aussi loin que l'on pousse ce travail de réduction des éléments par application du principe d'identité, n'est-il pas inévitable de parvenir à un terme pour lequel on jugera que l'évidence intrinsèque du rapport ou du défini est, en fin de compte, et au moins pour nous, plus claire que la démonstration que l'on pourrait en tenter ? Et quel que soit par ailleurs le degré de formalisation des règles, ne faut-il pas toujours juger qu'elles sont correctement appliquées ? Ainsi force nous est de constater que le débat entre intuitionnisme et formalisme ne saurait se clore au bénéfice unique de l'un des deux termes, ce qui est probablement le signe qu'ilsconstituent non pas deux éléments strictement antithétiques, mais plutôt deux pôles irréductibles de la connaissance humaine.

Ce que Descartes affirme, contre les critiques du formalisme, « tout critérium qu'on voudra substituer à l'évidence ramènera à l'évidence ». »

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