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Faut-il rejeter la morale ?

Publié le 22/02/2004

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morale
C'est la morale qui élève l'homme au-dessus de sa condition première, c'est-à-dire de sa condition strictement animale et pulsionnelle. En dehors de toute morale, la notion de dignité humaine perd sa signification. "L'homme conscient de son devoir n'est pas, dans le monde, phénomène mais noumène ; il n'est pas une chose, mais une personne." Kant, Opus postumum, 1796-1804. L'homme, par son affectivité, tisse des liens avec le monde. De ce fait, il peut être déterminé dans ses actions par des causes qui lui sont extérieures, hétéronomes. Tout ce qui peut conditionner le sujet ne permet pas de fonder la morale, car l'homme serait alors ramené à un statut d'objet, phénomène parmi les phénomènes, régi par le principe de causalité. Si l'action morale est possible, elle ne peut se fonder que sur un inconditionné, c'est-à-dire quelque chose qui ne dépende pas de la nature, mais qui soit de l'ordre de l'intelligible pur, un noumène. "Une personne est ce sujet, dont les actions sont susceptibles d'imputation. La personnalité morale n'est rien d'autre que la liberté d'un être raisonnable sous les lois morales.

morale

« égale à la sienne, s'abstient par conséquent de commettre des actes de violence, d'offenser ou de voler, afinqu'il ne lui soit pas fait de même.

Nous vivons d'ordinaire sous l'impératif de la moralité évangélique : "Ne faispas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'il te fasse." Cependant, il faut considérer que ce principe établi aufondement de la vie sociale est une négation de la vie, un principe de décadence et de dissolution : "Vivre,c'est essentiellement dépouiller, blesser, violenter le faible et l'étranger, l'opprimer, lui imposer durement sesformes propres, l'assimiler, ou tout au moins, l'exploiter." L'essence de la vie est la volonté de puissance,absolue et démesurée : elle vise la conquête, le déploiement de la force jusqu'à ses limites extrêmes, et nesouffre ni pondération, ni mesure, ni limitations d'aucune sorte.

Si dans une société vivante les individuss'abstiennent de faire le mal entre eux, c'est cette société elle-même qui exploitera ou tyrannisera une autresociété plus faible.

Si la moralité des moeurs est un principe de civilisation qui dompte la volonté vitale en sestendances barbares ou violentes, la vie reprend nécessairement le dessus, motivée par une volonté depuissance par laquelle les forts dominent les faibles, et par laquelle le destin de toute force est d'aller jusqu'aubout d'elle-même. L'impératif de la vie contre l'obligation morale Nietzsche, dans Aurore, décèle sous l'obligation kantienne du devoir l'expression d'une cruauté ascétique.

Ledevoir va à l'encontre de nos habitudes, il s'oppose à notre nature sensible, il se définit par la pureté del'intention.

Pour conserver toute sa valeur, il doit se montrer importun, pénible, voire douloureux.

Ne peut-onobserver, sous le commandement du devoir, un goût coupable et douteux pour la souffrance physique, unesoumission servile et craintive à l'impératif de la loi ? L'obéissance au devoir s'oppose à la vie et à ses forcespuissantes, qui commandent l'égoïsme, la préservation de nous-mêmes et plus encore l'affirmation et laréalisation de nos buts.

L'obéissance au devoir est une mortification.

Il n'apporte d'autre satisfaction que cellede l'obéissance à une loi qui n'est pas nôtre.

L'individu se sacrifie sur l'autel de l'idée et de la raison, sanstrouver d'intérêt pour lui ni pour les autres : "Une vertu est nuisible quand elle ne tient qu'à un sentiment derespect pour l'idée de "vertu" comme le voulait Kant." Contre les impératifs exsangues de la raison, Nietzscheproclame les droits de l'instinct et des puissances vitales : l'être humain vise l'affirmation de sa subjectivité etnon la soumission à une loi universelle.

Le devoir moral et l'obéissance sont les signes infaillibles d'un déclin etd'une décadence.

La nature commande à chacun de cultiver sa propre force et ses vertus en vue de laconservation de soi-même, tandis que le devoir commande des actions impersonnelles et abstraites.

Touteaction saine et vitale ne peut avoir que le plaisir pour preuve.

Le bonheur est la seule caution que l'action estbonne.

Se dresser contre la nature et le plaisir, c'est se détruire : "Qu'est-ce qui vous brise plus vite que detravailler, penser, sentir sans nécessité intérieure, sans option profondément personnelle, sans "plaisir", enautomates du devoir ? C'est tout juste là la recette de la décadence, et même de l'idiotie." La morale conduit la haine de soiLe christianisme est une religion et une morale de l'irréel, du fictif et de l'illusoire.

Les causes et les effetsprétendus sont imaginaires : Dieu, le Moi, l'Aine, l'esprit, la liberté ou la servitude, le péché, la rédemption, lagrâce, le châtiment, le pardon, etc.

Sa vision de la nature est anthropomorphique : Dieu, à l'origine de toutela création, est sensé détenir le secret de la vie, des lois de la physique, de la chimie, de l'astronomie, etc.Dieu est cause première et ultime de tout ce qui advient, tout se fait selon sa volonté souveraine etomnipotente.

Il aurait placé l'homme à la premièreplace de la création, l'autorisant à soumettre les animaux et la nature à ses propres besoins.

La psychologiechrétienne diminue cependant l'homme en décidant qu'il est pécheur dès l'origine ; elle se nourrit de lamauvaise conscience et des malentendus sur soi-même ; elle interprète nos états nerveux à l'aide deconcepts tels que la culpabilité, la volonté, le repentir, le sacrifice de soi, l'abnégation, la tentation du Diable,la présence rassurante de Dieu.

Enfin ses promesses sont mensongères : le Jugement dernier, l'immortalité, leParadis et l'Enfer.

A la différence du rêve, qui reflète la réalité en la déformant à son avantage, la religiondéforme, fausse et dévalue la réalité en vue de la rendre haïssable et insupportable.

Le concept théologiquede Dieu s'est forgé dans son opposition et sa différence au concept de nature, en le dépossédant de tous sescaractères positifs.

Avec le développement de la religion, la nature est devenue progressivement suspecte,mauvaise, puis condamnable, tandis que le concept de Dieu s'appropriait toutes les qualités.

La religion aplongé ses racines, puis s'est développée dans la haine de la nature et le rejet de l'animalité, de l'instinctif, etdu vital.

Elle a creusé en l'homme une intériorité au point de le rendre coupable de sa propre existence, elle apoussé le sens du scrupule et de la cruauté au point de faire du ressentiment l'élément naturel de l'existence :l'homme est devenu son propre ennemi.

L'être religieux vit un profond malaise dans une réalité dénaturée ethaïe, qui pour lui n'est que source de douleurs et de déconvenues.

La religion est une évasion hors de cequ'elle a, par force de culpabilisation et d'ascétisme (négation de l'instinct), réussi à rendre insupportable :"souffrir de la réalité signifie être soi-même une réalité manquée".

On ne devient ainsi religieux que dans ladécadence, quand la souffrance, la peine et la douleur ont vaincu les sentiments vitaux de l'affirmationspontanée de soi.. »

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