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Fiche De Lecture Sur les Cannibales De Montaigne

Publié le 19/09/2010

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Au XVIème siècle les Européens se fascinent pour le « Nouveau Monde «. Montaigne expose ainsi dans cet essai la confrontation de deux cultures et dénonce les préjugés ethnocentriques qui ont souvent conduis à basculer dans des définitions de « sous culture «. On peut par conséquent se demander si le jugement de la valeur d’une culture est possible ?

Nous verrons comment Montaigne dénonce la notion de barbarie puis nous analyserons sa vision du peuple sauvage pour enfin en tirer les leçons d’un relativisme universel.

 

Dans l’Antiquité, les Grecs qualifiaient déjà les peuples étrangers de barbares, étymologiquement ce qui signifie « le chant des oiseaux «, donc celui qui ne parle pas, celui qui n’a pas de culture. L’homme a donc naturellement tendance à appeler  barbarie « ce qui n’est pas de son usage «, car il se considère toujours supérieur aux autres. Ainsi aux XVIème siècle les peuples d’Amérique ont était perçus comme des sauvages car leurs pratiques culturelles telles que la polygamie ou l’anthropophagie ne correspondaient pas aux mœurs européennes. Ce jugement de valeur renvoie à la notion d’ethnocentrisme énoncée par Lévi-Strauss qui se définie comme la tendance à privilégier le groupe ethnique auquel on appartient et à en faire un modèle de référence. On peut se demander sur quel critère peut-on hiérarchiser les cultures ? Le critère technique a sans doute poussé les Européens à disqualifier les peuples d’Amérique étant bien moins avancés dans les modes de transports, dans les échanges marchands, dans les modes de fabrications et dans tous les aspects économiques. Cependant si la morale devient critère d’appréciation, alors Montaigne nous démontrera que le jugement de valeur est illégitime.

Dans la suite de l’essai, Montaigne dépeint une vision idyllique du peuple indien, il refuse pour cela de s’appuyer sur les opinions communes qui ne sont que des préjugés péjoratifs à ses yeux et privilégie les témoignages bruts recueillis des marins. Selon lui, ce peuple est encore plongé dans la « naïveté originelle « et animée par « les lois naturelles «, ce qui les préserve d’un abrutissement  par les mœurs de ses contemporains et qui leur confère une certaine pureté. On peut ainsi supposer que le progrès technique et social serait néfaste pour un peuple, mais cette vision régressive de l’humanité n’est-elle pas contestable ? Un peuple peut-il éternellement vivre proche de la nature et de son instinct animal ? Montaigne en vient ainsi à disqualifier les formes de production humaine comme l’art qui sont selon lui bien inférieures et imparfaites à tout ce qui poussent naturellement. Montaigne tente donc de forger le mythe du bon sauvage ; une idéalisation des hommes vivants en contact avec la nature mais cette vision est contestable car on voit bien que le peuple indien ne nie pas totalement la technique en effet, ils possèdent des arcs et des épées de bois et possèdent leurs propres coutumes comme la danse. 

Finalement, Montaigne parvient par son argumentation à renverser les préjugés ethnocentriques et à affirmer que « nous les surpassons en toute sorte de barbarie «. Ils montrent que les Indiens sont supérieurs aux Européens en courage et sagesse. En exposant les raisons qui poussent ces peuples à pratiquer le cannibalisme, il soutient qu’il y a plus de respect dans cette pratique que dans notre manière de traiter nos prisonniers. Ils expriment simplement leur désir de vengeance et offre une dignité à l’homme vaincu alors que nous faisons souffrir et humilions les perdants. « Jugeant bien de leurs fautes, nous soyons si aveugles aux nôtres «. Montaigne évoque implicitement l’absurdité des guerres de religion qui frappent l’Europe à cette époque et nous montre à travers le témoignage de trois indiens venus en France l’incohérence d’une société injuste et inégalitaire. Au fond, ne sommes-nous pas  les plus sauvages ?

 

Cet essai l’auteur nous démontre qu’il n’existe aucun critère pouvant servir de valeur universelle. Cette leçon de relativité sera poursuivie au XVIIIème siècle par les auteurs du siècle des Lumière dénonçant le colonialisme et l’esclavage des peuples jugés « inférieur «.  Cependant il faut savoir nuancer ce relativisme et avoir conscience que tout acte culturel ne peut être tolérer. Peut-on vraiment accepter l’excision, la torture, le meurtre…?

 

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