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Francis Bacon ou Verulamius

Publié le 22/02/2012

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bacon
C'est une figure assez énigmatique que celle de lord Francis Bacon, baron de Verulam ­ et souvent appelé " Verulamius " par les savants du XVIIe siècle ­ vicomte de Saint-Alban, Grand Chancelier d'Angleterre, et qui termina sa carrière par un singulier procès, d'origine évidemment politique, mais extérieurement fondé sur une accusation de vénalité dans l'exercice de ses fonctions. Il ne se défendit pas, répondit au Parlement avec déférence et humilité, suivant une tactique qu'il avait recommandée lui-même en commentant un proverbe de Salomon. Il fut condamné à l'amende et à la prison, mais presque aussitôt dispensé de l'une et de l'autre. Après quoi il passa les dernières années de son existence dans son château de Gorhambury, menant une vie large et honorée, consacrée tout entière à la philosophie. Il mourut à soixante-cinq ans, d'une bronchite qu'il avait contractée en voulant faire une expérience dans la neige.  Légalement, il était le fils du Garde des Sceaux Nicholas Bacon et de sa femme, Anne Cooke. Enfant précoce, admiré pour son intelligence, son sérieux, son talent littéraire, choyé par la reine Élisabeth Ire ­ dont on a soutenu qu'elle était sa véritable mère ­ il n'en eut pas moins beaucoup de peine à conquérir la situation éminente à laquelle il parvint plus tard, sous Jacques Ier. Quoique valétudinaire, et très préoccupé d'hygiène et de médecine, il paraît avoir été d'une grande activité. Sa vie, comme beaucoup de celles des hommes politiques de son temps, fut un imbroglio d'intrigues, d'hostilités et d'alliances dont il n'est pas facile de débrouiller les raisons secrètes. Savant juriste et excellent avocat, dont les oeuvres abondent en aperçus ingénieux ou profonds sur la philosophie du droit, écrivain d'une étonnante richesse de style ­ l'un de ceux auxquels on a attribué la paternité des chefs-d'oeuvre de Shakespeare ­ il apparaît dans ses Essais comme un psychologue et observateur d'une grande finesse, un critique averti et ingénieux de l'habileté politique. Mais il semble bien que sous toutes les agitations de sa carrière et de sa vie extérieure, il ait eu pour passion dominante ce que nous appelons aujourd'hui " la Science " et plus spécialement la science expérimentale, qui naissait à peine à son époque.  

bacon

« C'est une figure assez énigmatique que celle de lord Francis Bacon, baron de Verulam et souvent appelé " Verulamius " par les savants du XVIIesiècle vicomte de Saint-Alban, Grand Chancelier d'Angleterre, et qui termina sa carrière par un singulier procès, d'origine évidemment politique,mais extérieurement fondé sur une accusation de vénalité dans l'exercice de ses fonctions.

Il ne se défendit pas, répondit au Parlement avecdéférence et humilité, suivant une tactique qu'il avait recommandée lui-même en commentant un proverbe de Salomon .

Il fut condamné à l'amende et à la prison, mais presque aussitôt dispensé de l'une et de l'autre.

Après quoi il passa les dernières années de son existence dans son château deGorhambury, menant une vie large et honorée, consacrée tout entière à la philosophie.

Il mourut à soixante-cinq ans, d'une bronchite qu'il avaitcontractée en voulant faire une expérience dans la neige.

Légalement, il était le fils du Garde des Sceaux Nicholas Bacon et de sa femme, Anne Cooke.

Enfant précoce, admiré pour son intelligence, sonsérieux, son talent littéraire, choyé par la reine Élisabeth Ire dont on a soutenu qu'elle était sa véritable mère il n'en eut pas moins beaucoup de peine à conquérir la situation éminente à laquelle il parvint plus tard, sous Jacques Ier .

Quoique valétudinaire, et très préoccupé d'hygiène et de médecine, il paraît avoir été d'une grande activité.

Sa vie, comme beaucoup de celles des hommes politiques de son temps, fut un imbrogliod'intrigues, d'hostilités et d'alliances dont il n'est pas facile de débrouiller les raisons secrètes.

Savant juriste et excellent avocat, dont les oeuvresabondent en aperçus ingénieux ou profonds sur la philosophie du droit, écrivain d'une étonnante richesse de style l'un de ceux auxquels on aattribué la paternité des chefs-d'oeuvre de Shakespeare il apparaît dans ses Essais comme un psychologue et observateur d'une grande finesse, un critique averti et ingénieux de l'habileté politique.

Mais il semble bien que sous toutes les agitations de sa carrière et de sa vie extérieure, il aiteu pour passion dominante ce que nous appelons aujourd'hui " la Science " et plus spécialement la science expérimentale, qui naissait à peine àson époque.

Sa fortune historique ne fut pas moins accidentée que sa vie.

Non seulement Descartes a écrit que pour l'art de faire des expériences il n'avait rien à ajouter à ce que " Verulamius " en avait dit, mais il s'est inspiré de lui beaucoup plus qu'on ne le sait généralement.

Ses Règles pour la direction de l'esprit H015M1 sont pleines de formules baconiennes, et dans le Discours de la Méthode lui-même, j'ai relevé plus de vingt passages en face desquels on peut mettre des textes parallèles de Bacon.

En Angleterre, la fondation de la Royal Society est présentée par Sprat, qui en a écritl'histoire, comme la réalisation de ses plans.

Leibniz H028 l'appelait " homme d'un génie divin " et, dans un parallèle entre les esprits fins et les grands esprits, il donne Bacon pour type de ceux-ci et le met même à cet égard au-dessus de Descartes .

Il en est de même de tout le XVIIIe siècle français, et d'Alembert a fait de lui un magnifique éloge dans le Discours préliminaire de l'Encyclopédie H005M1 .

Mais la réaction politique et religieuse contre les " philosophes " du XVIIIe siècle le rend responsable de ce qu'elle considère comme leurs aberrations.

Joseph de Maistre a écrit contre lui un livre plein d'erreurs de fait, d'ailleurs, dont quelques-unes sont restées monnaie courante en l'accusant d'être la source de toutle matérialisme, le sensualisme, l'athéisme, qui aboutirent à la Révolution française P5T01 .

Le chimiste allemand Liebig, de son côté, a écrit contre lui un ouvrage probablement inspiré de son animosité contre ses confrères anglais.

Les auteurs d'histoires générales de la philosophie se sontlongtemps laissés tromper par ces diatribes et il en reste encore quelque chose.

Enfin la Logique de John Stuart Mill H1176 , par la confusion qu'elle a fait naître entre sa propre manière d'entendre la notion de " cause " et celle, toute différente, qu'en avait eue Bacon, a été l'origine demalentendus dont un exemple mémorable est la luxueuse et savante édition du Novum Organum par T.

Fowler, dont les notes sont pleines de contresens et de critiques causés par cette assimilation malencontreuse.

Mais ce ne sont pas seulement la politique, le nationalisme ou les équivoques verbales qui ont déformé la philosophiescientifique de Bacon.

Lui-même en est responsable pour une part, en raison d'une singulière méthode d'exposition,qu'il croyait très propre à faire accepter du public cultivé ses idées nouvelles, et qui s'est retournée contre lui.

Ilfaut imiter, a-t-il écrit, l'art avec lequel les empereurs romains ont transformé toute la structure de la Républiquesans rien changer au nom des anciennes magistratures, mais en y introduisant toutes les innovations qu'ils jugeaientutiles.

Il a donc retenu quantité de termes scolastiques, tels que forme, cause efficiente, cause formelle, etc., dontil donnait des définitions toutes nouvelles, mais qui déguisaient si bien sa pensée qu'il se voyait obligé d'ajouter lui-même : " Il faut prendre garde et répéter presque continuellement que lorsque nous attribuons un si grand rôle auxformes, il ne faut pas rapporter ce que nous en disons aux formes auxquelles la pensée humaine s'est habituéejusqu'ici.

" Enfin, un autre obstacle à l'intelligence de Bacon vient de l'inachèvement de son oeuvre systématique, la Grande Instauration des Sciences, qui devait comprendre six parties et dont la première seule, La Valeur et le Progrès des Sciences (De Dignitate et Augmentis Scientiarum) a été rédigée complètement.

De la seconde, Le Nouvel Organon H005M2 (Organon était le nom collectif des traités de logique d' Aristote H002 ), il n'a fait imprimer que la première moitié, dont le dernier paragraphe est l'amorce de développements qui n'ont jamais paru.

Des quatre dernières parties,il n'existe que des fragments, d'après lesquels il faut deviner ce qu'elles auraient contenu ; et, si l'on peut y arriver, c'est seulement avec l'aide desopuscules qui se rattachent à l'oeuvre principale, et dont quelques-uns, comme le Valerius Terminus, apportent de précieux documents sur ses conceptions.

Certaines idées cependant, et des plus fécondes, ne sauraient faire de doute.

Essayons de les dégager en langagecontemporain.

Le monde est l'oeuvre de Dieu, qui en est le législateur.

Mais la multiplicité des lois partielles que nous pouvonsretrouver par l'expérience a pour cause la faiblesse de notre esprit ; elles ne sont que les conséquences d'une loiunique d'où tout le reste pourrait se déduire si notre intelligence était plus vaste et si nous connaissions mieux toutle détail des faits.

Car il est vain de vouloir sauter du premier coup à la généralité suprême, ou même à desgénéralités d'un degré trop élevé.

La seule bonne méthode est de commencer par l'observation des faits particuliers,d'en dresser des constatations aussi exactes que possible, et aux lois desquelles on ne s'élèvera que par degrés.

Les choses existent de deux façons.

Le monde de nos sensations, fait de qualités comme le son, la couleur, la chaleur, n'est que l'apparence d'unmonde qui se ramène à deux formes : des structures (schematismi) et des processus ou changements de structure (metaschematismi).

Découvrir ce que sont la volatilité, l'état gazeux ou la chaleur, c'est en deviner le mécanisme ; et pour cela il faut d'abord faire un recueil aussi complet que. »

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