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Gaston Bachelard: Objectivité et théorie

Publié le 29/03/2005

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On ne peut arriver à l'objectivité qu'en exposant d'une manière discursive et détaillée une méthode d'objectivation. Mais cette thèse de la démonstration préalable que nous croyons être à la base de toute connaissance objective, combien elle est évidente dans le domaine scientifique ! Déjà l'observation a besoin d'un corps de précautions qui conduisent à réfléchir avant de regarder, qui réforment du moins la première vision, de sorte que ce n'est jamais la première observation qui est la bonne. L'observation scientifique est toujours une observation polémique ; elle confirme ou infirme une thèse antérieure, un schéma préalable, un plan d'observation ; elle montre en démontrant ; elle hiérarchise les apparences ; elle transcende l'immédiat ; elle reconstruit le réel après avoir reconstruit ses schémas. Naturellement, dès qu'on passe de l'observation à l'expérimentation, le caractère polémique de la connaissance devient plus net encore. Alors il faut que le phénomène soit trié, filtré, épuré, coulé dans le moule des instruments, produit sur le plan des instruments. Or les instruments ne sont que des théories matérialisées. Il en sort des phénomènes qui portent de toutes parts la marque théorique. Gaston Bachelard

QUESTIONNEMENT INDICATIF    • Pourquoi, selon Bachelard, l'observation scientifique est-elle toujours une observation « polémique « ? En quoi l'emploi de l'adjectif « polémique « se justifie-t-il ici ?  • Qu'est-ce qui justifie dans le texte que Y observation scientifique « montre en démontrant « ?  • Que signifie « elle transcende l'immédiat « ?  • Que signifie « reconstruire le réel « ? s'agit-il de le produire ou de le reproduire ?  • Pourquoi peut-on dire, selon Bachelard, que dans « l'expérimentation «, le caractère polémique de la connaissance devient plus net encore « ?  • Quelle est l'importance (pour la compréhension de texte) de « or « dans la phrase « or les instruments ne sont que des théories matérialisées « ?  • En quoi peut-on dire que les instruments ne sont que des théories matérialisées ? Ne sont-ils que cela ?  • Que signifie « des phénomènes qui portent ... la marque théorique « ?  • En quoi peut-on dire que, dans l'expérimentation, le phénomène est « produit « ?  • Ce texte est-il destiné à « examiner « les relations observation-expérimentation scientifiques ou bien cette réflexion est-elle subordonnée à un autre enjeu ? Si oui, lequel ?  • En quoi peut-on dire alors que ce texte présente « un intérêt philosophique « ?

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« à apporter ainsi la preuve d'une vérité.

Elle est alors garante d'objectivité dans la mesure où elle n'est pasdépendante de la représentation d'un sujet particulier, mais renvoie à un discours rationnel c'est-à-direnécessaire et universel.B.

C'est un présupposé de la scienceMais la thèse qui fonde l'objectivité d'une connaissance par la méthode démonstrative est un présupposéscientifique.

Cette thèse en laquelle nous « croyons » se donne comme une évidence, elle n'est pas fondéeelle-même de manière démonstrative, et pourtant elle n'est pas remise en question.Paradoxalement, elle ne peut s'auto-légitimer par les critères qu'elle prétend donner à l'objectivité d'uneconnaissance.

Les fondements de la science semblent être mis en question.

Qu'est-ce qui permet d'affirmerqu'une théorie scientifique restitue la réalité ? Autrement dit quel est son critère de vérité ? 2, Ainsi toute observation scientifique est marquée par la théorie A, Il n'y a pas d'observation première d'un phénomène naturelSur quoi se fondent les premières prémisses d'une démonstration ? Sont-elles des vérités innées, ou bien sont-elles issues de l'observation, garantes en cela d'une correspondance avec la réalité, garantes de la véritédéfinie par Thomas d'Aquin comme une adéquation entre l'esprit et la chose ? L'objectivité de la science vient-elle d'une première observation qui sert de point de départ à toute élaboration théorique ? Selon ClaudeBernard, la science expérimentale se constitue selon un va-et-vient entre l'expérience et la théorie, c'est-à-dire entre une observation qui permet de formuler une première hypothèse qui elle-même sera soumise à lavérification expérimentale pour formuler à nouveau une hypothèse est ainsi de suite.Or cette observation première ne serait qu'un mythe pour Bachelard dans la mesure où toute première vision duréel n'est scientifique que si elle est issue d'une réflexion préalable.

D'une part, il s'agit de sélectionner ce quidans l'observation est le plus pertinent pour la recherche scientifique.

Mais d'autre part, cette réflexionpréalable qui consiste d'abord à poser le problème, à déterminer ce que l'on cherche, modifie la vision elle-même.

L'idée d'une première observation impromptue, tels que le bain d'Archimède ou encore la pomme deNewton, appartient finalement à la mythologie scientifique : ces génies n'ont pas la primeur de prendre un bainou de voir une pomme tomber !B.

Une observation scientifique est toujours polémiqueEn ce sens une observation, lorsqu'elle est scientifique, est toujours polémique.

Elle marque toujours unerupture par rapport à une thèse antérieure, ou une autre observation, en ce sens, elle se situe toujours dansune histoire.

Ainsi l'observation scientifique « montre en démontrant » : si la démonstration est de l'ordre de ladéduction logique qui suit un ordre rationnel, alors paradoxalement, l'expérience elle-même est de l'ordre de lathéorie.

Comment procède-t-elle ?L'expérience « hiérarchise », elle ordonne le réel selon l'importance qu'on peut donner à une explicationscientifique.

L'immédiat est « transcendé » dans la mesure où il renvoie toujours à un principe qui le régit : lerationnel.

L'observation scientifique consiste justement à voir dans cette réalité immédiate un signe durationnel.

Les phénomènes n'ont de sens que parce qu'ils sont perçus par le sujet de la connaissance quireconstruit l'ordre des raisons. 3.

Non seulement, la science rationalise le réel, mais réciproquement, la raison est matérialisée A.

L'expérimentation met en place un dispositif instrumental Si toute observation est déjà tributaire d'unethéorie préalable, la mise en place d'un dispositif expérimental l'est encore plus.

En effet, lorsque l'on provoquevolontairement une observation dans un laboratoire, c'est-à-dire lorsqu'on isole un phénomène naturel desfacteurs qui pourraient modifier son observation et le diagnostic qui s'y rapporte, on introduit nécessairementdans son expérience un ordre dicté par la raison.

Il s'agit de sélectionner le phénomène le plus significatif dansdes conditions d'observation qui ne permettront pas à d'autres phénomènes de parasiter l'observation.

Parexemple, si l'on veut étudier la chute libre d'une feuille morte, il faut l'isoler des facteurs perturbateurs tels quele vent, la résistance de l'air...Mais il s'agit aussi de le rendre observable en le faisant entrer dans « le moule des instruments ».

Il fautadapter le phénomène à la technique dont on dispose : par exemple une cellule doit être fixée sur une lame deverre pour pouvoir être lue par un microscope.

Dès lors, le laboratoire scientifique fonctionne comme lanégation de la nature dont il prétend pourtant rendre compte, et l'objet scientifique devient une abstraction duréel. B.

Un instrument est une théorie matérialiséeGrâce à la technique, le réel est transformé selon les exigences de la raison.

Mais Bachelard pose en plus laréciprocité du rapport entre raison et réel, la raison est elle-même concrétisée : « les instruments ne sont quedes théories matérialisées ».

Par exemple, une règle graduée est l'instrument de base du mathématicien : elleest finalement la réalisation concrète d'un principe de mesure rationnelle.

Ainsi les objets techniques, lesinstruments, sont des principes rationnels matérialisés qui permettent de rendre compte du réel.

Le phénomènescientifique ne peut alors qu'être marqué par la théorie.Il en résulte que tout objet scientifique ne peut être immédiat et premier mais qu'il est toujours le résultatd'une construction et d'un artifice.

L'objet scientifique n'est donc pas un objet naturel, mais toujours uneabstraction. Conclusion. »

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