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HEGEL et l'éducation

Publié le 23/04/2005

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hegel
À l'école, [...] l'activité de l'enfant commence à acquérir, de façon essentielle et radicale, une signification sérieuse, à savoir qu'elle n'est plus abandonnée à l'arbitraire et au hasard, au plaisir et au penchant du moment ; l'enfant apprend à déterminer son agir d'après un but et d'après des règles, il cesse de valoir à cause de sa personne, et commence de valoir suivant ce qu'il fait et de s'acquérir du mérite. Dans la famille, l'enfant doit agir comme il faut dans le sens de l'obéissance personnelle et de l'amour; à l'école, il doit se comporter dans le sens du devoir et d'une loi, et, pour réaliser un ordre universel, simplement formel, faire telle chose et s'abstenir de telle autre chose qui pourrait bien autrement être permise à l'individu. Instruit au sein de la communauté qu'il forme avec plusieurs, il apprend à tenir compte d'autrui, à faire confiance à d'autres hommes qui lui sont tout d'abord étrangers et à avoir confiance en lui-même vis-à-vis d'eux, et il s'engage ici dans la formation et la pratique de vertus sociales. HEGEL

Dans quelle mesure l'école est-elle une institution importante, même en dehors de l'instruction que l'on y reçoit, des connaissances qu'on y acquiert dans chaque « matière « ? Hegel soutient que l'apprentissage de la règle et du devoir, vécu en collectivité, est la meilleure préparation possible aux «vertus sociales «. Pour mettre en évidence cette vertu spécifique de l'école, Hegel oppose cette dernière au milieu familial et montre ainsi ce que l'enfant reçoit dans chacun de ces deux univers.  Sans négliger les différences qui séparent l'école prussienne du début du XIXe siècle et le système français d'après mai 1968, nous nous demanderons, tout en élucidant le sens du texte, dans quelle mesure il peut s'appliquer à notre compréhension de ce qu'est l'école.

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« On pourrait sans doute nuancer la différence entre famille et école : les parents doivent également être justes, parexemple en traitant tous leurs enfants de façon égale ; et les professeurs doivent autant que possible traiter lesélèves avec bienveillance.

Le but de Hegel n'est pas, d'ailleurs, d'opposer les deux moments comme des contrairesabsolus, mais de montrer qu'ils sont gouvernés par des principes différents.

De même que le grain doit devenir germepuis plante, de même tout épanouissement passe par ces changements dialectiques.Dans la seconde moitié du texte, Hegel reprend cette distinction en inversant la perspective.

La famille est le lieu de« l'obéissance personnelle et de l'amour », l'école celui « du devoir et d'une loi ».

Il était question de la façon dontparents et professeurs considèrent l'enfant, il s'agit maintenant de dire comment l'enfant considère parents etprofesseurs.

Il obéit aux premiers en tant que personnes et en raison de l'amour qu'il leur porte ; le lien estimmédiat, non réfléchi, quasiment instinctif.

Et aux seconds en tant que représentants d'une institution sociale et envertu d'un règlement extérieur auquel ils se soumettent : le lien doit ici être réfléchi.

Il s'agit bien d'un devoir,puisque tous les élèves doivent avoir la même conduite à l'égard de tous les enseignants quels que soient lessentiments spontanés que chacun nourrit à l'égard de tel ou tel professeur.

On comprend ici en quel sensl'apprentissage de la discipline scolaire peut être compris comme une première initiation aux « vertus sociales » queHegel évoquera à la fin du texte : avoir la même attitude à l'égard de tous les individus en faisant abstraction despréférences ou des aversions personnelles, c'est le sens des lois en général.La fin de la phrase est en revanche plus surprenante : Hegel affirme que l'élève doit se plier à « un ordre universel,simplement formel » en observant des consignes qui pourraient aussi bien être différentes.

Cet ordre n'est-il pasapparemment arbitraire ? Si l'on apprend à obéir à des règles qui pourraient parfaitement être différentes, n'a-t-onpas affaire à un pur exercice de discipline que l'on attendrait davantage à l'armée qu'à l'école ? Et si l'école doit êtreune préparation à la vie en société, une telle formation à la discipline n'est-elle pas une initiation à l'obéissanceabsolue face à un pouvoir autoritaire et arbitraire ? Sans doute y a-t-il du vrai dans ces suppositions, car la Prusseimpériale n'est pas la République rêvée par Rousseau.

Alors que ce dernier, dans Émile, entendait esquisser uneéducation fondée tout entière sur la liberté, comme préparation à un ordre politique conforme à l'esprit du Contratsocial, Hegel semble insister avant tout sur l'obéissance à l'ordre, quelle que soit sa nature.Un détail peut cependant nous inciter à nuancer cette critique : Hegel dit que certaines choses interdites «pourraient bien autrement être permises à l'individu ».

La phrase est donc peut-être moins destinée à justifierl'arbitraire qu'à souligner que l'on ne peut faire les mêmes choses lorsqu'on est seul ou lorsqu'on est en collectivité,lieu où « la liberté de chacun s'arrête où commence celle des autres ».

Ce que l'enfant pourrait se permettre s'ilétait seul, il doit parfois s'en abstenir pour respecter la liberté des autres.

La phrase suivante vient d'ailleursconfirmer cette interprétation : Hegel aborde en effet un aspect de la vie scolaire qui était jusqu'à présent resté ausecond plan : l'aspect collectif.Nous avions en effet vu pour commencer la différence d'attente de la part des parents et de la part des professeurs; puis la différence d'attitude de l'élève à l'égard des uns et des autres ; c'est à présent le caractère collectif ducadre scolaire qui est mis en avant.

Ce qui est nouveau par rapport au début du texte, c'est que la notion deconfiance vient remplacer celles de devoir et de loi.

Trois attitudes fondamentales sont ici évoquées de façon à lafois précise et concise.

D'abord le respect pour autrui : il faut « tenir compte d'autrui » et ne pas se comportercomme si l'on était seul au monde.

Ensuite la confiance en autrui : confiance qui n'est plus fondée sur l'affectionfamiliale mais sur le partage de valeurs communes qui font que les inconnus ne sont pas des ennemis mais desconcitoyens.

Enfin l'affirmation de soi, qui permet à l'individu d'être conscient de ses droits et de ses compétenceset donc de son identité sociale. Conclusion C'est donc bien une transition essentielle qu'évoque ici Hegel.

Il ne décrit pas ce que doit être l'institution scolaire,son mode idéal de fonctionnement, il indique de façon générale l'enjeu qu'elle représente comme interface entre lafamille et la société.

Elle aide l'enfant à sortir de l'enfance en lui proposant des buts et des méthodes, en ledécentrant de lui-même ; elle le prépare à la vie en société sous ces deux facettes principales : l'apprentissage dela discipline apprend le rapport aux lois et à l'État ; l'apprentissage de la vie en communauté dans la confianceapprend la solidarité et la reconnaissance sociales.

On voit donc se dessiner le portrait d'une institution vouéeautant à l'éducation citoyenne qu'à l'instruction.

Un thème qui reprend une grande actualité de nos jours, même si lerapport à la règle et aux devoirs est présenté de façon bien différente. HEGEL (Friedrich-Georg-Wilhelm).

Né à Stuttgart en 1770, mort à Berlin en 1831. Il fit des études de théologie et de philosophie à Tübingen, où il eut pour condisciples Hölderlin et Schelling.

Il futprécepteur à Berne de 1793 à 1796, puis à Francfort de 1797 à 1800.

En 1801, il devient privat-dozent à l'Universitéd'Iéna puis, les événements militaires interrompirent son enseigne- ment, et il rédigea une gazette de province.

En. »

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