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Hernani Acte 3 Scène 1 (commentaire)

Publié le 08/10/2011

Extrait du document

Dans cet extrait de la première scène de l’acte, Hugo aborde ce thème hérité de la tradition comique par le biais d’un réquisitoire sévère et pittoresque contre la jeunesse de Don Ruy Gomez, archétype classique du vieux mari jaloux, et, a contrario, par un éloge de la vieillesse, développé dans la tirade du vieil homme, qui s’apparente fortement à une déclaration d’amour.    I-Un réquisitoire sévère contre la jeunesse    Dès le début, la périphrase une fille (vers 4), groupe sujet indéfini, désigne évidemment Doña Sol et témoigne d’une habileté oratoire certaine de Don Ruy. Loin d’être un discours sans référent, la tirade du mari jaloux s’adresse directement à celle qu’il espère bientôt épouser.

« a-Les tournures concessives L’éloge commence par plusieurs tournures concessives qui, tout en soulignant la caractère « démodé » du vieillardcomme amant, tendent à mettre en valeur, par contraste, certaines qualités. Tout d’abord, l’âge.

S’il ne joue pas en faveur du vieillard, il peuts’avérer être une qualité car, contrairement aux cavaliers frivoles (vers 2), ceux-ci Ont l’aile plus fidèle (vers 9).

Lamétaphore filée se poursuit ici : à l’oiseau aux couleurs vives et au chant envoûtant, Doña Sol doit préférer l’oiseaufidèle. La beauté ensuite.

Elle est évoquée par une formule elliptique enun hémistiche : les vieillards, bien que moins beaux, sont meilleurs (vers 9). Dans ces deux concessions, Don Ruy oppose aux apparences et au faste, la vérité d’un cœur. L’amourEnfin, l’amour est plus longuement développé, notamment par l’intermédiaire de trois questions rhétoriques : Nos passont lourds ? nos yeux arides ? / Nos fronts ridés ? (vers 10-11).

Le vieillard se fait maître de la parole par desquestions-réponses privant son interlocutrice de toute réponse possible.

Ôtant les mots de la bouche de Doña Sol, iltente de la faire adhérer à son discours.

La désarticulation de l’alexandrin participe à l’effet de la parole de Don Ruysur la jeune femme : le rythme est saccadé, mimant l’émotion et les sentiments du vieillard.

Mais la parole resteferme : à l’amour qui mue (vers 7) des jeunes hommes, il répond : Nous aimons bien (vers 10). b-Les qualités de l’amour des vieux Dans la dernière partie de la tirade, l’accent va être mis sur les qualités des vieux et de leur amour, toujours enopposition à l’amour des jeunes hommes.

Tout ce dernier mouvement développe le groupe verbal « aimer bien »évoqué précédemment.

L’adverbe bien ouvre la parole de Don Ruy. Les qualités de l’amour des vieux sont multiples, rendues par une accumulation d’adjectifs épithètes sur deux versqui donne une tournure hyperbolique à la parole de Don Ruy : c’est un amour sévère, / Profond, solide, sûr, paternel,amical (vers 15-16).

Il oppose à la fragilité et l’inconstance de l’amour des jeunes hommes (comme un jouet deverre, vers 14), la solidité de son propre amour qui est fait De bois de chêne, ainsi que [son]fauteuil ducal (vers 17).La métaphore de l’arbre supplante ici celle de l’oiseau avec d’un côté la légèreté et l’insouciance, de l’autre laconstance et la fermeté.

Elle rappelle qu’un chêne vit centenaire contrairement à un oiseau.

Paradoxalement, c’estdès lors le vieillard qui est plus jeune car c’est lui qui aime le mieux : Au cœur on n’a jamais de rides (vers 11). Comme lors du réquisitoire contre les jeunes hommes, le personnage de Don Ruy use des ressources de la rhétoriquepropres au théâtre pour mettre en valeur et accentuer les qualités des vieux.

La tonalité élégiaque est présenteavec les termes Hélas ! (vers 12) et l’interjection Oh ! (vers 14) où les points d’exclamation sont la marque même del’élégie.

La métaphore du cœur susceptible de saigner (Le cœur est toujours jeune et peut toujours saigner, vers13) appuie l’idée de souffrance liée à l’amour, même si le sang semble plutôt être ici une métaphore de l’amour.Cette association de la jeunesse du cœur au sang vise à attendrir Doña Sol dans le but de prendre le vieillard enpitié.

Ainsi, un effet de glissement s’opère dans la tirade, d’un énoncé à valeur générale à un énoncé pluspersonnel : de Les vieux (vers 8), le discours passe à un vieillard (vers 12) puis, à la fin de l’extrait, un je (vers 18)apparaît.

Le passage n’est donc que l’éloge de Don Ruy lui-même. III-Une authentique déclaration d’amour Du réquisitoire contre l’amour des jeunes hommes à l’éloge des qualités des vieux et de leur amour, la tirade évoluedélicatement vers une authentique déclaration d’amour, véritable objet de la parole de Don Ruy. a-Un hymne à la femme aimée Ainsi, toute la tirade peut en fait se lire comme un hymne à la femme aimée où Don Ruy justifie sa jeunesse parl’entrain et la fraîcheur du style.

S’il a pu paraître ridicule au début, la fin infirme cette impression.

On sent sonamour immense : Voilà comment je t’aime, et puis je t’aime encore / De cent autres façons (vers 18-19).

Larépétition du groupe verbal je t’aime ainsi que celle des termes comparatifs (comme on aime l’aurore, / Comme onaime les fleurs, comme on aime les cieux !, vers 19-20) donnent au discours une tonalité lyrique.

Le personnageaffiche ouvertement son amour pour sa promise : celui-ci s’apparente alors à l’amour de l’univers et la beauté de lajeune femme devient un signe de la beauté du monde. b-Un amour infini et céleste La femme se place ainsi au centre du discours de Don Ruy Gomez, ainsi qu’au centre de l’univers.

L’aurore, les fleurs,les cieux (lignes 19 et 20) deviennent métonymies de la femme : celle-ci se décline dans l’univers.

En même tempsqu’il fait l’éloge de la femme, tous les éléments de la nature participent à l’amour du vieillard.

La structurehyperbolique contribue à l’expression de cet amour infini : j’ai dans l’âme une fête éternelle ! (vers 23).

Bienqu’éloignée du registre de la comédie qui prévalait en début de tirade, l’expression de l’amour n’est cependant pas ici. »

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