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HOBBES: Egalité naturelle et violence à l'état de nature.

Publié le 17/04/2009

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La nature a fait les hommes si égaux quant aux facultés du corps et de l'esprit, que, bien qu'on puisse parfois trouver un homme manifestement plus fort corporellement, ou d'un esprit plus prompt qu'un autre, néanmoins, la différence d'un homme avec un autre n'est pas si importante que quelqu'un puisse de ce fait réclamer pour lui-même un avantage auquel un autre ne puisse pas prétendre aussi bien que lui ( ... ). De cette égalité des aptitudes découle une égalité dans l'espoir d'atteindre nos fins. C'est pourquoi, si deux hommes désirent la même chose alors qu'il ne leur est pas possible d'en jouir tous les deux, ils deviennent ennemis ; et dans leur poursuite de cette fin (qui est, principalement, leur propre conservation, mais parfois seulement leur plaisir), chacun s'efforce de détruire et dominer l'autre. Et de là vient que là où l'agresseur n'a rien de plus à craindre que la puissance individuelle d'un autre homme, on peut s'attendre avec vraisemblance, si quelqu'un plante, sème, bâtit, ou occupe un emplacement commode, à ce que d'autres arrivent tout équipés, ayant uni leurs forces, pour le déposséder et lui enlever non seulement le fruit de son travail, mais aussi la vie ou la liberté. Et l'agresseur à son tour court le même risque à l'égard d'un nouvel agresseur. HOBBES
  • voici un texte de Hobbes qui nous rappelle que ce philosophe postule l'existence, chez l'homme, d'une nature intrinsèquement violente, ici, il explique cette violence par l'égalité innée des aptitudes et, par conséquent, des désirs des hommes, égalité qui les conduit à se combattre plutôt qu'à trouver quelque compromis. Cette égalité les mène donc à des luttes sans fin.

 

  • C'est dans le raisonnement et les arguments sur lesquels il repose que se trouve l'intérêt de ce texte : vous devrez donc « décortiquer « soigneusement le cheminement de la pensée de Hobbes qui, à partir d'un fait (l'égalité des aptitudes) chemine progressivement vers les thèmes d'une violence sans fin, d'une guerre éternelle entre les hommes, de tous contre tous, vous aurez à vous interroger sur la validité de l'égalité des aptitudes qu'affirme Hobbes. N'omettez pas, cependant, de bien analyser certains termes ou expressions importantes comme aptitudes, égalité, conservation, détruire et dominer, etc.

HTML clipboardCe extrait s'enracine dans la pensée politique de Hobbes en proposant une description d'un état hypothétique qu'est l'état de nature. L'auteur a conscience qu'il s'agit là d'une sorte de fiction, mais cette expérience de pensée permet cependant d'appréhender ce qu'il advient lorsque les relations inter-humaines sont soustraites à l'arbitrage de l'État. Il ne faut pas voir ici une sorte de tour de passe-passe intellectuel: Hobbes a connu la guerre civile en Angleterre, ayant ainsi l'occasion de constater l'importance de la mise en place d'une puissance souveraine puissante pour éviter l'état de guerre de tous contre tous. En proposant l'hypothèse d'un état de nature, Hobbes saisit les carences qui frappent l'espace social, ce qui lui permet par contraposition de penser un état civil qui se prémunit de telles lacunes par l'intervention étatique. En somme, ce texte nous met face à une anthropologie évidemment peu flatteuse, qui pense toujours l'homme comme un être avant tout soucieux de lui-même. Ce sont les conséquences directes de cette nature humaine qu'expose le passage suivant, faisant clairement apparaître la nécessité de mettre en place un État afin de résorber les violences privées décrites. Il s'agit donc d'être attentif aux descriptions proposées de cet état de nature, d'en saisir les implications problématiques, afin de comprendre la nécessité de penser un état civil conséquent.

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« déposséder quelqu'un, finira à son tour par être dépossédé; celui qui tue, finira aussi par être tué.

Pourquoi s'agit-illà de quelque chose d'essentiel pour Hobbes? Il faut saisir que le problème se pose en terme de stabilisation .

S'il existait au sein de l'état de nature des différences notables, des fronts de force pourraient se créer de telle sorteque l'espace social se stabiliserait.

En effet, si un homme ou une association d'homme pouvait affirmer leursupériorité face aux autres, ils pourraient acquérir le pouvoir sur eux de manière durable.

Par la force, un homme ouune poignée d'homme pourrai(en)t assurer une position dominante, contrôlant l'ensemble des autres hommes d'unemanière définitive.

Nous y reviendrons par la suite.

Notons pour l'instant que cette triple identité constatée entraînenécessairement un état de guerre perpétuel de chacun contre chacun .

L'orgueil, la quête de profit, ou encore la sécurité, instaure une rivalité et une méfiance perpétuelle des hommes les uns envers les autres de telle sorte quele meilleur moyen d' éviter d'être mis en péril est de anticiper le crime commis contre soi en le commettant soi-même contre l'autre .

Tuer pour ne pas l'être, déposséder pour posséder...

etc.

C'est de cette conflictualité, insolvable si l'on reste dans l'état de nature, à laquelle l'édification d'une puissance souveraine propose de mettre un terme. La stabilisation du champ social II. Autant dire de ce fait que la meilleur défense au sein de l'état de nature, c'est encore l'attaque.

Hobbes dira ainsidans le Léviathan (II, chap.

XVII): « il n'existe pour nul homme aucun moyen de se garantir qui soit aussi raisonnable que le fait de prendre les devants, autrement dit, de se rendre maître, par la violence ou par la ruse,de la personne de tous les hommes pour lesquels cela est possible ».

Devancer la menace réclame de l'être en somme à son tour.

Rappelons que pour Hobbes, chaque homme est avant tout un conatus , soit une volonté de persévérer dans son être.

Cette persévérance, pour s'exprimer pleinement, nécessite une prévention qui se traduitpar une violence anticipant tout ce qui pourrait venir limiter la limiter .

Et tout à la fois, nous l'avons vu, ce conatus est toujours différentiel, il s'accomplit dans ce surplus de puissance par rapport aux autres conatus présents dans l'état de nature .

L'homme désire toujours ce surplus de puissance qui le différenciera des autres.

Il faut donc saisir le champ social comme un champ de forces toujours à l'oeuvre et s'exerçant les unes contre les autres.

Puisquetous les hommes ont des capacités sensiblement égales, ce rapport de force ne s'épuise jamais et aboutit sur une guerre où tous finissent par être ennemis les uns des autres .

Les hommes désirant chacun persévérer dans leur être, « dans leur poursuite de cette fin (qui est, principalement, leur propre conservation, mais parfois seulement leur plaisir), chacun s'efforce de détruire et dominer l'autre ».

Un jeu de domination et de soumission se met progressivement en place, une jeu qui cependant ne se stabilise jamais. Nous l'avons expliqué, pour ne pas pâtir ( παθος, du grec, subir , ou encore souffrir ), pour ne pas se sentir limité dans sa puissance, pour être pleinement actif, l'homme doit anticiper et exercer sa puissance sur autrui .

Il ne persévère dans son être qu'en agissant, et en agissant, en exerçant cette puissance que contre l'autre.

Mais la domination àlaquelle il parvient est toujours temporaire .

En effet, si un homme ou un groupe d'hommes pouvait par la force se rendre maître des autres hommes, la question politique ne se poserait pour ainsi dire pas.

Un pouvoir serait édifié(basé certes sur la peur), chacun étant alors tenu en respect par la force d'un seul ou de quelques uns.

Il émaneraitalors une autorité incontestable, dont la légitimité ne serait acquise et conservée que par la force, et quis'exercerait sur le reste du champ social.

Cependant, cette stabilisation du jeu de force est proprement impossible . Un penseur comme Machiavel pense que l'état civil n'échappe pas à ce problème, ou du moins qu'il ne marque qu'unetransposition de ce problème.

Selon le penseur politique italien, ce jeu de force n'est plus entre individus dansl'espace civil, mais entre États ou corporation.

Chaque État est toujours menacé par le pouvoir d'un autre, chaqueÉtat est toujours menacé par un coup d'État, une guerre, une domination exercée illégitimement.

Aussi, Machiavel apour soucis de penser comment il est possible de gérer un tel rapport de force pour aboutir à une stabilitégéopolitique.

Machiavel fait donc le choix de rester dans ce rapport de force perpétuel.

Il s'agit alors pour lui deréfléchir sur une possible gestion de ses lignes de force à l'œuvre dans le monde pour aboutir à la formation d'entitésouveraine capable de durer. Hobbes ne fait pas ce choix.

Il ne s'adresse plus au Prince pour lui donner de bons conseils assurant la survie et lapérennité de son règne.

Il cherche à édifier une souveraineté capable d'annihiler ce rapport de force présent au sein de l'état de nature , il cherche à mettre un terme à cette état de conflit perpétuel.

Il est évident que dans l'état de nature, « si quelqu'un plante, sème, bâtit, ou occupe un emplacement commode, à ce que d'autres arrivent tout équipés, ayant uni leurs forces, pour le déposséder et lui enlever non seulement le fruit de son travail, mais aussila vie ou la liberté.

Et l'agresseur à son tour court le même risque à l'égard d'un nouvel agresseur ».

Ainsi, ce n'est pas la vie de chaque homme qui est simplement en jeu au sein de cet état particulier.

Il en est de même du fruit de son travail et de tout ce qui relève de sa propriété.

A chaque instant, un tiers peut lui extorquer ce qu'il a acquis.

Si Hobbes prend l'exemple des plants, ou des constructions, il y a une raison claire.

En effet, s'il n'y a aucune légalité(au sens de lois positives) dans l'état de nature, on peut naturellement penser qu'il est légitime que le fruit du travail effectué revienne à celui qui s'est donné la peine de l'obtenir .

On retrouvera cela chez un autre penseur anglais, à savoir John Locke.

Ce dernier prendra la propriété comme le premier et le plus naturel des droits: lapropriété sur soi (son propre esprit, son propre corps) mais aussi sur le fruit de son travail.

Cependant, pour Hobbes,si l'idée de propriété est importante, elle n'est pas pour autant un droit naturel .

En effet, le principal droit naturel pour lui demeure le droit de faire tout ce qui est en sa capacité pour assurer la conservation de son être.

Et nousavons vu que ce droit pouvait justifier la violation de la propriété d'autrui précisément pour anticiper la violation de sa propre propriété .

Tant que l'on reste dans le règne de ce droit naturel, on assurer une guerre éternelle entre les hommes. III.. »

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