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HOBBES: Le sentiment de leur propre faiblesse

Publié le 03/04/2005

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Presque tous les hommes sont portés par le sentiment de leur propre faiblesse et par l'admiration... on a de son raisonnement auquel un petit mélange de crainte ne donne point de retenue. HOBBES
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« utilité.

Pour les hommes, comprendre la nature, c'est donc rechercher dans quel but telle ou telle chose existe,quelle est son utilité.

Quand nous regardons un objet, notre première impulsion est de nous demander à quoi il sert,comme si son utilité rendait raison de son existence.

Autrement dit, les hommes ne cherchent pas à comprendre lacause des phénomènes, ce qui les produit, mais leur fin supposée.C'est la combinaison de ces deux principes, de ces deux attitudes : l'ignorance des causes et la recherche de l'utile,qui va être à l'origine d'une conception fausse et aliénante de la nature et de la divinité.Or, « Comme en outre ils trouvent en eux-mêmes et hors d'eux un grand nombre de moyens contribuant grandementà l'atteinte de l'utile […] ils en viennent à considérer toutes les choses existant dans la nature comme des moyens àleur usage.

»L'homme considère donc la totalité de la nature comme un ensemble de moyens à son usage.

Puisque les hommesexpliquent toutes choses selon leur propre façon d'agir, ils jugent que ces moyens ont dû leur être fournis par un ouplusieurs directeurs de la nature, cad par Dieu.

Continuant dans la même logique, les hommes en viennent à penserque les Dieux leur ont fourni ces moyens en échange d'une contrepartie; cultes, sacrifices, bonheur, amour.« Par là, il advint que tous […] inventèrent divers moyens de rendre un culte à Dieu afin d'être aimés par lui par-dessus les autres et d'obtenir qu'il dirigeât la nature entière au profit de leur désir aveugle et de leur insatiableavidité.

»La boucle est bouclée : Dieu ou les Dieux sont conçus comme des personnes, agissant dans un but, favorisant leshommes en échange d'un culte.

C'est une conception anthropomorphique du divin, puisque Dieu est conçu sur lemodèle de l'humanité.

Le monde est expliqué en dépit du bon sens.« Mais, tandis qu'ils cherchaient à montrer que la nature ne fait rien en vain (cad rien qui ne soit pour l'usage deshommes), ils semblaient montrer rien d'autre sinon que la nature et les Dieux sont atteints du même délire que leshommes.

»En effet, le type d'explication fourni par les hommes, grâce à l'utilité, est proprement délirant.

On ne trouve lacaricature chez Bernadin de Saint Pierre, qui, plus tard, dira que « le melon a été divisé en tranches par la natureafin d'être mangé en famille, la citrouille, étant plus grosse, peut être mangée avec les voisins.

»Mais l'exposé de Spinoza rend aussi bien compte des préjugés qui font de Dieu ou des Dieux des Dieux nationaux,protégeant particulièrement tel ou tel peuple, que du début de la « Genèse » où Jahvé offre la terre à un hommequ'il a conçu à son image.Cependant, cette sorte de cercle vicieux de l'ignorance et du préjugé tourne à la superstition et à l'avilissement, dumoment où les hommes ont à expliquer les phénomènes naturels catastrophiques (tempêtes, tremblement de terre,etc.), qui touchent aussi bien les hommes pieux que les impies, les justes que les injustes.« Ils ont trouvé plus expédient de mettre ce fait au nombre des choses inconnues dont ils ignoraient l'usage, et dedemeurer dans leur état actuel et natif d'ignorance, que de renverser tout cet échafaudage et d'en inventer unautre.

Ils ont donc admis comme certain que les jugements de Dieu passent de bien loin la compréhension deshommes.

»Voilà donc que l'appel à la volonté de Dieu devient un expédient ; il permet de sauver une explication délirante dumonde.

Plutôt que de rechercher les causes naturelles des phénomènes, les hommes préfèrent continuer à admettrequ'ils sont des signes de la volonté divine, même si celle-ci est totalement absurde et contradictoire.La situation est ici extrêmement grave, dans la mesure même où l'expérience des catastrophes aurait pu éclairer leshommes sur l'absurdité de leur conception du divin ; à l'inverse elle porte la superstition, l'aveuglement, le déni del'expérience à son comble : la nature n'est plus saisie en elle-même, mais seulement comme signe d'une volontédivine qui dépasse de très loin la compréhension des hommes.

Les hommes se conçoivent donc comme soumis audiktat arbitraire d'un Dieu conçu comme un roi.Mais cette ignorance et cette superstition des hommes du commun sert le pouvoir des théologiens, qui, exploitent lacrédulité populaire, se posant comme les interprètes des volontés divines et intercesseurs entre les hommes et Dieu,portent l'aliénation à son comble, et interdisent toute possibilité de libération.Les théologiens ont « introduit une nouvelle façon d'argumenter : la réduction non à l'impossible, mais à l'ignorance ;ce qui montre qu'il n'y avait pour eux aucun moyen d'argumenter ».Spinoza donne alors un exemple à peine caricatural.

Si une pierre tombe sur la tête de quelqu'un, ils montreront quec'est la volonté de Dieu.

Car pourquoi le vent soufflait-il ce jour-là ? Pourquoi cet homme avait-il précisément choisicet itinéraire ?, etc.

A toute tentative de réponse rationnelle, les théologiens répondront par un pourquoi : « jusqu'àce que vous vous soyez réfugié dans la volonté de Dieu, cet asile de l'ignorance ».La conclusion de Spinoza, qui rend raison aussi bien de l'abêtissement du peuple par les religieux, que de la traditionthéologique et politique d'oppression des philosophes (Socrate, Galiléé, Bruno), vaut la peine d'être citée in extenso: «Et ainsi arrive-t-il que quiconque cherche les vraies causes des prodiges et s'applique à connaître en savant leschoses de la nature, au lieu de s'émerveiller comme un sot, est souvent tenu pour hérétique et impie et proclamé telpar ceux que le vulgaire adore comme des interprètes de la nature et des Dieux.

Ils savent bien que détruirel'ignorance, c'est détruire l'étonnement imbécile, cad leur unique moyen de raisonner et de sauvegarder leurautorité.

». »

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