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L'idéalisme est-il une illusion ?

Publié le 12/01/2004

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illusion

comme l'émanation directe de leur comportement matériel «. Là gît le fond du désaccord avec Feuerbach : si celui-ci affirme bien la nécessité de faire commencer la philosophie avec et dans la « non-philosophie «, dans la vie réelle, il réduit celle-ci à l'existence individuelle d'un homme pensé de manière abstraite, coupé des rapports sociaux (et par suite restreint à sa dimension sensible). L'opération critique effectuée ici par Marx consiste à redéfinir la réalité humaine. Il s'agit de rejeter la thèse de l'existence d'une nature humaine et de lui substituer l'analyse d'une réalité sociale complexe et structurée, où les hommes édifient historiquement leur individualité en « produisant leurs conditions d'existence «. Il s'agit donc de récuser une vue abstraite et éloignée du réel pour s'attacher à ce que sont les hommes concrets et leur évolution historique. La sixième thèse énonce que « L'essence humaine n'est pas une abstraction inhérente à l'individu pris à part, dans sa réalité, c'est l'ensemble des rapports sociaux. « Il ne s'agit aucunement, contrairement à ce que maintes lectures hâtives ou prévenues affirment, de réduire l'individu aux rapports sociaux, mais d'affirmer que l'essence humaine n'a pas la forme du sujet pensé par la psychologie. Autrement dit, que la clé de la compréhension de la personnalité concrète ne se trouve pas dans la conscience individuelle. Mais, à l'inverse, celle-ci ne se détermine singulièrement que dans le cadre de rapports sociaux qui lui préexistent et qui constituent de ce fait ses « présuppositions réelles «, base de sa formation effective et point de départ de son intelligence véritable. On ne peut donc pas comprendre l'individu en l'isolant de la société dans laquelle il s'insère, travaille, etc.

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« l'essence humaine n'a pas la forme du sujet pensé par la psychologie.Autrement dit, que la clé de la compréhension de la personnalité concrète ne se trouve pas dans laconscience individuelle.

Mais, à l'inverse, celle-ci ne se détermine singulièrement que dans le cadre derapports sociaux qui lui préexistent et qui constituent de ce fait ses « présuppositions réelles », base de saformation effective et point de départ de son intelligence véritable.On ne peut donc pas comprendre l'individu en l'isolant de la société dans laquelle il s'insère, travaille, etc.

Ilfaut au contraire, pour saisir l'individu dans sa singularité, ne pas prendre pour base les illusions qu'il peut sefaire sur lui-même, en ce sens qu'il est victime des préjugés de son temps et que « les idées dominantes sontles idées de la classe dominante ».Par suite, l'activité individuelle est essentiellement, constitutivement, sociale et ne peut en aucun cas êtreréduite à l'ensemble des perceptions sensibles de l'individu isolé et des représentations qui en dérivent : « Lavéritable richesse des individus réside dans la richesse de leurs rapports réels.

»Par suite encore, les formes de conscience, que Marx désigne du terme d'idéologie, n'ont pas d'autonomiemais bien une spécificité.

Car, si « ce n'est pas la conscience qui détermine la vie mais la vie qui détermine laconscience », il reste à expliquer historiquement l'apparente séparation et opposition entre la réalité matérielleet les représentations que l'on s'en fait.Le problème n'est donc pas tant de récuser une philosophie qui s'invente un monde séparé et dédaigne leshommes réels, que de mettre au jour les conditions de possibilité d'une telle méprise, que de dégager lesprémisses matérielles d'une telle conclusion.

La réponse proposée dans « L'idéologie allemande » est la notionde division du travail, plus précisément la division entre travail intellectuel et travail manuel.

Celle-ci permetaux « penseurs » d'oublier ou de méconnaître les conditions réelles de leur propre activité.

Il s tendent àjustifier ce qui est, et à entraver le processus d'une véritable transformation du monde, tout en croyant àl'autonomie de leur pensée.

L'idéologie, monde à l'envers, « camera obscura », est donc le résultat d'unprocessus historique.Il s'agit donc de partir, véritablement cette fois, du « monde réel », et de fonder la science de l'histoire :« Autrement dit, on ne part pas de ce que les hommes disent, s'imaginent, se représentent, ni non plus de cequ'ils sont dans les paroles, la pensée, l'imagination et la représentation d'autrui, pour aboutir ensuite auxhommes en chair & en os ; non, on part des hommes dans leurs activités réelles, c'est à partir de leurprocessus de vie réel que l'on représente aussi le développement des reflets ou des échos idéologiques de ceprocessus vital.

»C'est de cette nouvelle position du rapport de la théorie à la pratique que découle la question du statut de laphilosophie.

Celle-ci a-t-elle une pérennité par-delà la figure historiquement désuète de son autonomieproclamée ? Survit-elle à la mise à jour de ses fondements véritables ? Et si c'est le cas, peut-on lui accorderune indépendance relative, une efficace propre, ou faut-il, au contraire, l'assujettir aux besoins d'une pratiquequi lui imposerait ses exigences et la convoquerait selon son bon plaisir ?Marx nie que la philosophie puisse être une alternative autre qu'illusoire au monde de l'aliénation matérielle.Elle n'est qu'un faux remède à des maux biens réels.

Prisonnière de sa méconnaissance de la réalité del'histoire sociale humaine, la pensée de Feuerbach persiste à faire de la réflexion philosophique un refuge cotrela réalité effective.C'est contre cette conception du monde qui inclut une conception de la philosophie que Marx affirme l'unité dela théorie et de la pratique.Plus qu'un nouveau statut, Marx assignera progressivement une nouvelle tâche à l'activité théorique et à lanature proprement philosophique de l'élaboration des catégories les plus universelles concernant le rapport dela pensée à l'Etre.En affirmant que l'interprétation du monde est insuffisante, fausse, en raison même de son caractère partiel,Marx s'engage donc dans la critique d'une forme déterminée du rapport de la conscience et du réel.

Le termede « philosophie » renvoie à une tradition qui se constitue dans cette coupure prolongée, maintenue, de lathéorie et de la pratique, coupure que l'on peut ramener en dernière instance à la division sociale entre travailmanuel et travail intellectuel.Il ne s'agit donc aucunement de récuser la nécessité de l'élaboration conceptuelle, de tomber dans uneactivisme dépourvu de conscience historique, d'adopter la démagogie de ceux que Platon nommait des «misologues » (des ennemis de la raison).

Toute l'oeuvre de Marx, sa rigueur, sa profusion, témoignent ducontraire.Ce point de rupture que constitue la onzième thèse concerne donc le statut de la théorie en même temps queson contenu.

Sa réélaboration ne peut passer que par la compréhension critique de son passé et parl'élaboration du concept d'idéologie.Dès lors que la philosophie cesse de se penser en opposition au monde réel, elle peut fournir –et elle est laseule à le pouvoir- à la volonté transformatrice la conscience de ses fins et la détermination de ses voies.Alors peut s'instaurer l'interaction féconde entre une pratique qui pousse à penser en faisant émerger desproblèmes à résoudre, et une théorie capable en retour de transformer celle-ci en pratique savante, informantpar la maîtrise des possibilités historiques la volonté d'abolir une situation transitoire d'exploitation de la massedes hommes.La onzième thèse a connu une si immédiate et durable fortune, précisément parce qu'elle inaugurait ce rapportinédit du savoir et de la pratique, en congédiant du même coup une conception éthérée de la philosophie etune définition pragmatique de l'action, pour envisager le mouvement sans fin, productif et transformateurdialectique de leur réconciliation.On ne peut donc séparer le Marx théoricien du Marx militant révolutionnaire.

On ne saurait en conséquenceisoler la réflexion Marxiste de sa portée pratique, ni couper la volonté politique s'en réclamant du soucipermanent de faire toute sa place à une recherche théorique par définition inachevable.. »

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