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L'idée de méthode ?

Publié le 10/02/2004

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Spontanément l'enfant, comme le chimpanzé, n'a en vue que le but qu'il s'agit d'atteindre, et il se précipite au hasard dans une action qu'il voudrait efficace : c'est la méthode des essais et erreurs, qui procède par tâtonnements fortuits. Déjà - il faut le dire - la répétition, la manipulation entraînent un progrès : les habitudes, même conduites de façon hasardeuse, facilitent la tâche par rapport à une action primitive. Mais l'idée de méthode, et par conséquent la méthode elle-même, en tant qu'elle est réfléchie, n'apparaissent qu'avec l'examen des moyens à employer pour obtenir dans les meilleures conditions le résultat cherché. Ainsi l'idée de méthode entraîne-t-elle la visée vers la meilleure méthode possible. Pratiquement, pour l'homme éduqué, méthode est synonyme de bonne méthode, celle qui est relativement simple, rationnelle, efficace.Pour toute chose il y a lieu de réfléchir sur les moyens à employer afin de trouver la méthode convenable. Les notions de rationalisation et de productivité sont actuellement familières à tous ceux qui s'occupent d'industrie ou de sociométrie du travail. Toutes les méthodes, en tant qu'elles sont pensées, dépendent de ce doute méthodique, dont parlait Descartes, grâce auquel il est permis d'éviter la précipitation et la prévention. L'homme, s'il se laisse aller à son impulsion, ne peut agir que d'une façon pour ainsi dire réflexe ou instinctive, comme l'animal. Dans la mesure où la nature a approprié les moyens aux fins, cette activité primaire et fondamentale suffit.

« La vérité est une notion si claire et si évidente qu'il est impossible de l'ignorer.Elle est même une idée innée, car il est impossible d'apprendre ce qu'elle est.On ne peut en effet être en accord ou en désaccord avec celui qui nous enpropose une définition, si au préalable on ne sait s'il dit vrai ou faux.

Il fautdonc savoir, antérieurement à toute définition, ce qu'est la vérité pouracquiescer ou non à la définition qu'on lui suppose.

Traditionnellement, onpeut donc admettre la définition scolastique de la vérité comme adéquationde l'esprit et de la chose (adaequatio rei et intellectus), mais il est impossiblede fournir des règles logiques qui nous en montrent la nature propre.

La véritéest par conséquent un accord, une correspondance, un juste rapport, uneadéquation, qui se donnent dans l'évidence, la clarté, et la simplicité.

La seulerègle de nos vérités est la "lumière naturelle" que nous avons tous en partage: "Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée [...] la puissance debien juger, et distinguer le vrai d'avec le faux, qui est proprement ce qu'onnomme le bon sens, ou la raison est naturellement égale en tous les hommes."Mais si nul ne se plaint de son jugement, rares sont ceux qui se serventcorrectement de cette lumière naturelle.

Ceci explique que beaucoups'enferrent dans les mêmes erreurs, et souvent pour les mêmes raisons : lapremière règle de la méthode nous rappelle qu'il ne faut s'en tenir qu'à la seuleet simple évidence, et qu'il faut éviter avec soin la prévention et laprécipitation.

Nombreux sont ceux qui préjugent, par impatience ou légèretéd'esprit, au lieu de prendre le temps de considérer avec clarté, distinction et évidence, les données du problème qu'il faut juger.

La découverte de la vérité està la portée de tous, puisque nous disposons tous du même instrument universel qu'est la raison, mais il convient des'y employer avec patience et persévérance.

Nous devrions nous fier à la seule lumière naturelle ou intuitus mentis,et nous méfier plus souvent de nos instincts ou impulsions naturelles qui, si elles visent naturellement notre propreconservation, nous mènent souvent bien loin du droit chemin. Les règles de la méthode Le problème de la vérité semble donc se réduire à une question de méthode.

Si la faculté ne fait défaut chezpersonne, la lumière naturelle ou la raison étant identique en chacun, son application doit être réglée.

La logique, lagéométrie et l'algèbre, trois sciences vraies, peuvent servir de modèle pour établir une méthode universellepermettant de s'acheminer sans peine sur la voie de la vérité, à la condition de les débarrasser de leur superflu etde leurs défauts.

La logique est en effet embarrassée de nombreux syllogismes qui ne nous apprennent rien que l'onne sache déjà.

Le syllogisme explique ou développe la connaissance, mais ne l'étend d'aucune manière.

Lagéométrie, limitée à la considération des figures dans l'espace, "exerce l'entendement en fatiguant beaucoupl'imagination".

Enfin l'algèbre, outre qu'elle traite de "matières fort abstraites qui ne semblent d'aucun usage", esttrop dépendante des règles et des chiffres pour ne pas être parfois confuse et obscure.

Il suffit de tirer de ces troisdisciplines un petit nombre de règles pour établir une méthode universelle de la vérité qui servira en tous les cas, àla condition qu'on s'attache à les respecter scrupuleusement.

La première règle est celle de l'évidence : "ne recevoirjamais aucune chose pour vraie que je ne la connusse évidemment être telle".

Pour cela il faut éviter la précipitationet la prévention.

La précipitation est une impatience qui nous fait juger ou conclure trop tôt ; et la prévention estun parti pris ou un préjugé qui fait obstacle à la considération rationnelle d'un problème, ou encore une dispositiond'esprit affective ou sentimentale qui nous pousse sans raison d'un côté plutôt que de l'autre, avant même que nousayons soigneusement examiné la question.

Cette première règle revient à n'admettre que ce qui se présente "siclairement et si distinctement à mon esprit que je n'eusse aucune occasion de le mettre en doute".

La deuxièmerègle est une règle de division ou d'analyse.

Pour chaque problème donné, il convient de le diviser en ses partiesélémentaires.

La difficulté apparente se résorbe lorsque la complexité est soumise au traitement de l'analyse, c'est-à-dire divisée en parties distinctes les unes des autres.

Cette deuxième règle prescrit de "démonter" les données duproblème, afin de le "mettre à plat" pour distinguer clairement et distinctement ses parties élémentaires.

La troisièmerègle est celle de l'ordre.

Il faut apprendre partout et toujours à conduire par ordre ses pensées.

Pour cela, ilconvient de commencer par les choses les plus faciles et les plus simples à connaître, pour s'élever ensuite pardegrés successifs vers les plus compliquées.

Si l'ordre est respecté, la progression du simple vers le complexe sefera sans difficultés.

Ce respect de l'ordre est capital : si d'aventure il ne s'en trouve pas naturellement entre deuxparties d'un problème, il faudra en supposer un pour ne pas rompre l'enchaînement logique de la réflexion.

Cettetroisième règle succède logiquement à la deuxième, comme opération de synthèse qui reconstruit avec ordre etlogique ce que la règle d'analyse nous prescrivait de "démonter" ou d'analyser.

Enfin, la quatrième règle est celle dela vérification.

Il s'agit de passer en revue les opérations antérieures pour s'assurer de n'avoir rien oublié.

Tout ceque nous pouvons connaître se laisse ainsi ramener au traitement de ces quatres opérations simples qui ne laissentaucune place à l'erreur.. »

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