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Imaginer, est-ce nier la réalité ?

Publié le 07/01/2004

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C'est peut-être à travers le jeu qu'on peut le mieux saisir cette idée que l'imagination est un acte de liberté qui nous permet, en niant la réalité sous son aspect le plus immédiat (celui des faits présents), d'explorer des possibilités et par là de former des projets. On a trop tendance à considérer le jeu comme une activité puérile ou un divertissement d'adulte et à l'opposer au travail. Le contraire du jeu n'est pas le travail, mais le sérieux. Le sérieux ne se définit pas par la nature de l'activité qu'on accomplit, mais par la façon dont on l'accomplit. N'importe quelle activité, y compris le jeu, peut être prise au sérieux, menée selon "l'esprit de sérieux". Mais n'importe quelle activité peut aussi être regardée et conduite comme un jeu. Dans le premier cas, la conduite est fondée sur le sentiment que certaines règles et certaines valeurs s'imposent à nous, qu'elles sont présentes dans la réalité même à laquelle nous avons affaire et s'imposent avec l'évidence des choses. Dans le second cas on dissocie réalité et valeur, lois naturelles et règles convenues et on considère que c'est toujours librement qu'on donne telle valeur à une chose et qu'on adopte telle règle. En effet tout jeu comporte des règles librement acceptées et les choses sur lesquelles on opère n'ont d'autre sens que celui qu'on a décidé de leur conférer. L'enfant, lorsqu'il joue, sait bien que les choses qu'il utilise ne sont pas réellement changées par la signification qu'il leur donne; mais cette dernière n'est pas totalement étrangère aux propriétés réellement présentes dans ces choses: celles-ci constituent comme un matériau qui soutient et suggère les formes dont son imagination les revêt.
L'imagination nous permet de nous représenter des images qui se substituent aux données de la perception: on ferme les yeux. Mais, la réalité ne se limite pas à ce que l'on perçoit, tandis qu'on perçoit mieux ce que l'on a pu imaginer, pour créer des réalités nouvelles.
Se demander si l'imagination n'est qu'une négation de la réalité revient à s'interroger sur l'essence de l'imagination mais aussi sur sa valeur. Si l'imagination n'est que la négation du réel, alors, elle est dangereuse, sournoise et perverse. Dans la tradition philosophique, l'imagination a plutôt mauvaise presse parce qu'on l'envisage précisément sous ce rapport. Dans les Pensées, Pascal écrit à son sujet qu'elle est " cette partie dominante dans l'homme, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité, si elle l'était, infaillible du mensonge. " Il ajoute qu' " étant le plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité, marquant du même caractère le vrai et le faux. (...) Cette superbe puissance ennemie de la raison, qui se plaît à la contrôler et à la dominer, pour montrer combien elle peut en toute chose, a établi en l'homme une seconde nature. " En tant que telle, l'imagination, c'est d'une certaine manière, le mal... Mais l'imagination ne peut être réduite à cette simple position. Elle n'est pas seulement négation de la réalité, elle est surtout capacité à déformer la réalité. L'imagination en effet prend des éléments du réel et les associe pour former de nouvelles figures. A partir de là, elle peut certes errer dans le délire ou la folie, mais permet aussi de créer, de transformer, d'inventer. Bref, grâce à l'imagination, l'homme est aussi un visionnaire...
 

« généralement à refuser son assentiment à une proposition (et non pas à décliner l'offre d'une chose ou ne pasvouloir s'engager dans une action).

Nier une proposition, c'est la tenir pour fausse.

Ainsi, on peut nier la réalité dequelque fait qu'on estime controuvé ou nier l'idée que quelqu'un se forme d'un fait.

La négation intervient aussi dansl'idée de possible.

Envisager une chose comme possible, c'est envisager qu'elle puisse également ne pas être.

Parexemple, si j'affirme comme possible qu'il fera beau demain, je suppose qu'il est également possible qu'il ne fasse pasbeau.Quel sens peut avoir alors l'expression "nier la réalité"? Il semble bien difficile de nier que ce qui est, est: dire: "laréalité n'est pas", c'est une contradiction.

En revanche, il est possible de nier que ce qui paraît être soiteffectivement; il est possible de nier que le simple fait de l'existence d'une chose nous assure de l'impossibilité pourelle d'être autrement.

(On répute souvent chimériques certains projets en se contentant de leur objecter la réalitéprésente.

Ce n'est pas une objection recevable, car la réalité peut changer et être changée, du moins sous certainsde ses aspects.)Imaginer ce pourra être alors non pas nier, absolument, la réalité, mais nier que ce qui s'impose à nous comme réelle soit effectivement, ou nier que la réalité se réduise à ce qu'elle est présentement.

La négation porte sur la réalitételle que nous la croyons être, non sur la réalité même. 3) Une analyse un peu plus serrée de ces idées pourrait être appuyée par lalecture de Sartre.

Dans "L'imaginaire", mais aussi dans "L'être & le néant", ilmontre que l'esprit de sérieux nous conduit à croire que la réalité se réduit àun ensemble de faits et de choses qui ne sauraient être autrement qu'ils nesont et dont la nature nous dicterait notre conduite.

Nous sommes enclin àpenser que, de l'imagination qui nous détourne d'une réalité ainsi comprise,nous sommes seulement des victimes.

Sartre considère au contrairequ'imaginer est une conduite (un comportement délibérément choisi) et qu'elletrouve sa source et son fondement dans l'aptitude de la conscience à"néantiser" ce qui semble s'imposer à nous comme réalité.

"Pour qu'uneconscience puisse imaginer il faut qu'elle échappe au monde par sa naturemême, il faut qu'elle puisse tirer d'elle-même une position de recul par rapportau monde.

En un mot, il faut qu'elle soit libre." (Page 353). L'image est généralement pauvre, car elle est un monde en miniature, coupédu vrai monde.

Les éléments qui la constituent tissent entre eux un nombrede rapports finis, à la différence du symbole qui aspire et tend vers leconcept.

De plus, l'image est irréelle, car "les objets n'existent quepour autant qu'on les pense".

Il s'ensuit que la perception d'une choseconcrète et la visée par laquelle notre conscience s'y rapporte sont infinimentplus féconds que la conscience d'une simple image.

L'image se réduitstrictement à la conscience qu'on en a, alors que l'objet perçu déborde constamment la conscience.

Tout est donné dans l'image, il n'y a rien à en apprendre.

Dans sa transparence, elleest la certitude même.

Un objet imaginaire peut être pensé de trois manières : il est soit inexistant ; soit absent ;soit existant ailleurs.

C'est à chaque fois une négation qui le constitue, et une négation de la réalité.

"Poser uneimage, c'est constituer un objet en marge de la totalité du réel, c'est donc tenir le réel à distance, s'en affranchir,en un mot : le nier." Cette mise à distance nécessaire à la constitution de l'image implique que la conscience soitlibre par rapport au réel même.

La conscience reste inéluctablement dans le monde, mais elle est capable de letranscender par sa liberté ; cette transcendance et ce dépassement ne peuvent se faire que par la négation.

Lenéant ne peut être une image, mais l'acte de négation en est sa condition. C'est peut-être à travers le jeu qu'on peut le mieux saisir cette idée que l'imagination est un acte de liberté qui nouspermet, en niant la réalité sous son aspect le plus immédiat (celui des faits présents), d'explorer des possibilités etpar là de former des projets.

On a trop tendance à considérer le jeu comme une activité puérile ou undivertissement d'adulte et à l'opposer au travail.

Le contraire du jeu n'est pas le travail, mais le sérieux.

Le sérieuxne se définit pas par la nature de l'activité qu'on accomplit, mais par la façon dont on l'accomplit.

N'importe quelleactivité, y compris le jeu, peut être prise au sérieux, menée selon "l'esprit de sérieux".

Mais n'importe quelle activitépeut aussi être regardée et conduite comme un jeu.

Dans le premier cas, la conduite est fondée sur le sentimentque certaines règles et certaines valeurs s'imposent à nous, qu'elles sont présentes dans la réalité même à laquellenous avons affaire et s'imposent avec l'évidence des choses.

Dans le second cas on dissocie réalité et valeur, loisnaturelles et règles convenues et on considère que c'est toujours librement qu'on donne telle valeur à une chose etqu'on adopte telle règle.

En effet tout jeu comporte des règles librement acceptées et les choses sur lesquelles onopère n'ont d'autre sens que celui qu'on a décidé de leur conférer.

L'enfant, lorsqu'il joue, sait bien que les chosesqu'il utilise ne sont pas réellement changées par la signification qu'il leur donne; mais cette dernière n'est pastotalement étrangère aux propriétés réellement présentes dans ces choses: celles-ci constituent comme unmatériau qui soutient et suggère les formes dont son imagination les revêt.

On remarquera en outre que les règlesne sauraient être totalement arbitraires: elles doivent offrir une certaine cohérence et offrir la possibilité de conduirelogiquement le jeu.

Ainsi l'imagination se joue librement du réel; elle ne l'abolit pas pour autant.

Elle prend sesdistances avec la signification usuelle que nous lui donnons, découvre en lui des possibilités méconnues.4) Pour montrer que, dans la fiction, la réalité n'est pas niée absolument, on pourra recourir à Hegel.

Dans ses"Leçons sur l'esthétique", il critique l'idée que les beaux-arts sont imitation de la réalité.

Mais il prend bien soin depréciser que sa critique ne vise que ce qu'il appelle l'imitation "formelle", c'est-à-dire la reproduction servile del'apparence sensible.

Il n'exclut pas que l'art doive présenter son contenu sous les formes qu'offre la nature ("Que. »

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