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Individu et personne

Publié le 21/02/2004

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individu
Mais il en va tout autrement de l'individu. L'homme est, comme tout être vivant, un individu par son corps, par son tempérament, par son « naturel », c'est-à-dire par son idiosyncrasie physiologique et par la forme que celle-ci impose à ses dispositions psychiques propres. Bien entendu, à ces dispositions premières, vient se superposer - et cela, à vrai dire, de très bonne heure - tout ce que l'individu recevra de l'éducation, de la fréquentation de ses semblables, de son existence quotidienne dans les cadres de la société où il vit. Comme l'observe le sociologue anglais Morris GINSBERG (L'individu et la société, dans le Bull. international des sc. sociales, VI, 1954, no 1, p. 164), les « langues, les institutions, les systèmes juridiques, les arts ont leurs formes propres que l'individu trouve dans son héritage et auxquelles il lui faut s'adapter ». Mais, tout cela est en quelque sorte, selon l'expression de DURKHEIM, du surajouté, et d'ailleurs, même lorsque cet « héritage social » s'est incorporé à son être réel, il demeure « chez chacun un fonds d'individualité unique et, en fin de compte, inexprimable et incommunicable » (GINSBERG, art. cité, p. 162).
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« irrationnel, voire pathologique.

DURKHEIM lui-même l'a noté : il y a jusque dans la conscience individuelle des «germes de rationalité » et les catégories de la raison « sont en un sens, immanentes à la vie de l'individu », mais lesrelations qu'elles expriment « ne pouvaient devenir conscientes que dans et par la société ». II.

La personne (ou la personnalité). A.

— Si nous abordons maintenant la notion de personne, nous voyons qu'elle s'applique à un domaine beaucoupplus restreint que la notion d'individu.

A vrai dire, elle ne s'applique que dans le domaine humain, psychologique ousocial.

En parlant d'un individu, on pourra parler de « personne physique » en désignant par là son corps, mais à lacondition que ce corps soit « considéré comme manifestation de sa personne morale...

Le mot de personne, mêmeau sens physique, ne pourrait pas s'appliquer au corps d'un animal » (LALANDE, Vocabulaire, p.

759).

Les groupeshumains peuvent avoir une personnalité collective.

On parle, en droit, à propos des groupes comme des individus, depersonnalité civile et de personnalité juridique. B.

— Si maintenant nous essayons de définir cette notion de personne, nous retrouvons les mêmes caractères queceux de la notion d'individu, mais transposés sur un tout autre plan.

«La personnalité, c'est une individualité qui sepense et qui se réfléchit» (Parodi in LALANDE, ibid., p.

502).

— 1° Comme l'individu, la personne est un être concretet, lorsqu'on attribue la personnalité à des groupes, c'est précisément qu'on les considère comme des réalitésconcrètes.

Mais ce caractère concret est ici celui de la conscience, des réalités spirituelles elles-mêmes.

— 2° Lapersonne implique aussi une certaine unité qui, comme dans le cas de l'individu, n'exclut pas quelque multiplicité.Mais « la personnalité s'oppose à l'individualité comme l'unité intérieure de la conscience et de la réflexion à l'unitéextérieure qui ne vient que de l'organisme ».

Comme l'observe fort justement LALANDE (Vocabulaire, p.

503), il y amême, sous ce rapport, un certain antagonisme entre l'un et l'autre.

« L'organisation du type physiologique, fût-elleparfaite et consciente, ne créerait aucune personnalité; au contraire, quand celle-ci se développe, la vie organiques'en trouve refoulée et même épuisée à certains égards.

» En ce sens, l'unité personnelle n'est pas une donnéecomme l'unité organique; c'est une oeuvre à faire et qui relève de cette activité de synthèse qui est la forme la plushaute de l'activité psychique.

Le sujet, écrit LE SENNE, mérite le nom de personne quand il apparaît « qu'il est lemaître et non l'esclave de ce qui lui est donné ».

— 3° L'identité personnelle appelle les mêmes remarques.

C'estd'abord une identité consciente : « Ce qui fait la personnalité, c'est la conscience nette de soi comme d'un être quidure et qui s'attribue quelque identité » (PArodi, loc.

cit.).

Mais il y a plus : c'est une identité voulue, celle d'un êtrequi entend rester fidèle à lui-même et persévérer dans le rôle qu'il a assumé.

— 4° Enfin la personnalité implique,comme l'individualité, une certaine originalité.

C'est même en ce sens qu'on emploie souvent le terme (et aussil'adjectif personnel) avec une intention laudative quand il s'agit d'une façon de penser, d'une oeuvre littéraire ouartistique.

Il importe d'observer toutefois que cette originalité de la personne s'exprime surtout dans l'interprétationqu'elle donne à certaines valeurs de communauté : « Ce qu'il y a de plus caractéristique dans l'opposition dupersonnel et de l'individuel », écrit LALANDE (ouv.

cité, p.

504), c'est « la conscience que prend le moi, non de sonrapport à lui-même, mais de son rapport à ses semblables ».

Ici « conscience et rapport à soi ne suffisent pas...

Il yfaut de plus la raison, c'est-à-dire la communauté dans la vie de l'esprit ».

En ce sens, la personnalité est « laréalisation, chez des êtres primitivement divers, de dispositions virtuellement universelles » C.

— Nous arrivons ici au point essentiel.

S'il est faux que le social soit immanent à l'individuel, il est parfaitementvrai, en revanche, qu'il est un des éléments constituants de la personnalité, c'est-à-dire de l'individualité modelée,transformée, élevée précisément à un niveau supérieur par la vie en groupe.

On a pu montrer que la formation de lapersonnalité chez l'enfant est fonction à la fois du rapport avec autrui et de l'action du groupe social.

Psychologueset philosophes sont tous d'accord aujourd'hui pour reconnaître que la vie en société, loin de briser la personnalité,comme on le disait autrefois, est le principal agent de l'élévation de l'individu à la dignité de personne, à la fois par ladiscipline qu'elle lui impose et par le fait qu'elle l'initie aux grands idéaux qui constituent la vie spirituelle del'humanité.

— Ce serait toutefois une erreur de soutenir, avec certains sociologues, que la personnalité estpurement et simplement « un produit social ».

D'abord, ainsi que nous l'avons déjà signalé, sous la personnalitéproprement dite, il demeure toujours un certain « fonds d'individualité » irréductible.

D'autre part, la personnalitévraie ne se réduit pas au personnage; elle est une synthèse originale qui est, en partie, notre oeuvre propre et quidépasse aussi bien le social que le biologique ou l'individuel.

C'est d'ailleurs précisément parce qu'elle est cela que lapersonnalité représente une valeur morale que ne possède pas l'individualité.

Un être est une personne quand il s'estélevé à un degré de discernement moral tel qu'il n'est plus ni le jouet de ses impulsions organiques ni le simple refletde son milieu social, de telle sorte qu'il peut être tenu pour responsable de ses actes. Conclusion .

On voit quel danger il y aurait à confondre individu et personne.

Ce serait confondre deux niveaux très différents de la vie psychique et, par suite, de la vie morale.. »

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