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Jean Giono, Le Hussard sur le toit. Vous ferez de ce texte un commentaire composé que vous organiserez à votre gré en vous montrant sensible notamment à la qualité du regard porté sur les choses.

Publié le 27/02/2011

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giono

Angélo, personnage du roman de Giono, est témoin d'une épidémie de choléra qui ravage la Provence pendant un été torride. Parvenu à Manosque, il est contraint de passer plusieurs jours caché sur les toits, d'où il pénètre dans un grenier.    Le grenier était encore plus beau que ce qu'il paraissait être. Les fonds qu'on ne pouvait pas voir de la lucarne, éclairés par quelques tuiles de verre disséminées dans la toiture, et sur lesquelles à cette heure frappait le soleil couchant étaient baignés d'un sirop de lumière presque opaque. Les objets n'en émergeaient que par des lambeaux de forme qui n'avaient plus aucun rapport avec leur signification(1) réelle. Telle commode galbée n'était plus qu'un ventre recouvert d'un gilet de soie prune ; un petit saxe sans tête qui devait être à l'origine un ange musicien était devenu par l'agrandissement des ombres portées, par le vif éclat que la lumière donnait aux brisures de sa décollation(2), une sorte d'oiseau des îles : le kakatoès d'une créole ou d'un pirate. Les robes et les redingotes étaient vraiment réunies en assemblées. Les souliers apparaissaient sous des franges de clartés comme dépassant du bas d'un rideau, et les personnages d'ombres dont ils trahissaient ainsi la présence ne se tenaient pas sur un plancher mais comme sur les perchoirs en escalier d'une vaste cage de canaris. Les rayons du soleil dardés en étincelantes constellations rectilignes de poussière faisaient vivre ces êtres étranges dans des mondes triangulaires, et la descente sensible du couchant qui déplaçait lentement les fonds de lumière les animait de mouvements indéfiniment étirés comme dans l'eau tiède d'un aquarium.    Jean Giono, Le Hussard sur le toit. Vous ferez de ce texte un commentaire composé que vous organiserez à votre gré en vous montrant sensible notamment à la qualité du regard porté sur les choses.   

Ce n'est pas ici le Giono de Colline, Regain, Que ma joie demeure..., célébrant la gloire de la nature, sa croyance en l'homme et sa foi dans les « vraies richesses «. • Profondément marqué par la guerre de 1940-1945, très attristé par des épreuves qu'il juge injustes(3)... (1) Saxe :figurine en porcelaine de Saxe. (2) Décollation : action de couper la tête d'une personne. (3) Emprisonné à la Libération, un temps, et très certainement à tort.

• ... Giono jusqu'à sa mort (1970) va surtout faire un retour sur soi, exorciser son amertume et ses déceptions, particulièrement dans le cycle du Hussard : Angélo, Mort d'un personnage, Le Hussard sur le toit, et Le Bonheur fou.   

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« • Lui-même a mis en scène Crésus, où joue Fernandel, et qu'il avait écrit pour le cinéma. • C'est donc un regard de caméra d'abord qui est porté par le hussard sur le grenier. • Il part de l'endroit où se trouve Angélo, le toit, qui recouvre justement ce grenier, et il découvre « la lucarne », «les tuiles de verre », dont sont même indiqués à peu près et le petit nombre : « quelques », et une certainelocalisation à demi-vague : « disséminées dans la toiture ». • Puis le regard se pose sur les choses qui peuplent le grenier. • Chaque objet est d'abord désigné dans sa qualification propre : la « commode » est « galbée », la figurine de «Saxe » est « petite », elle laisse de plus supposer — ce qui devait être — ce qu'elle représentait : « un angemusicien », bien qu'elle soit « sans tête », ce qui explique son rejet. • Dans ce grenier, on peut voir aussi des habits.

Ils sont différenciés, du moins en gros : ce sont « les robes et lesredingotes ». • Enfin, autre indication donnée : « les souliers ». • Il s'agit bien de choses qui ne servent plus et que l'on entasse sous les combles. • Cependant, pas la moindre impression d'entassement ou de bric-à-brac, comme dans la plupart des pièces de cegenre ou comme dans la description de Maupassant. • À peine de poussière, pas de notion d'abandon. • Ce qui frappe plutôt, c'est la présence d'un double regard contemplant les objets. • Celui de l'écrivain survole et met en situation exceptionnelle son personnage. • Le monde des objets n'a pas son apparence habituelle. • Il devrait être matériel, avoir une certaine lourdeur.

C'est l'inverse. • Le second regard, celui du hussard, semble guidé par celui de l'écrivain; il lui faut prendre conscience que « legrenier était (vérité d'affirmation) encore plus beau que ce qu'il paraissait être » (supposition).

Les deux nuancestournent autour du même verbe d'état : « être ». • C'est là que réside l'essentiel du passage.

Angélo doit lutter contre la peur : il a failli être lynché par les habitantsde Manosque surexcités par leur terreur de la mort, il s'est trouvé confronté à une crise de folie collective qui lui asemblé pire que le choléra. • Regarder les objets, reposer sa vue dans ce vide humain et ce peuple inanimé des choses, voilà qui est pour le hussard un moment de paix, de douceur. • Angélo ne sait pas combien de temps il sera obligé de rester sur cette île à la Robinson que représente le toit.

Il luifaut donc non seulement se rassurer mais se résigner. • La vue de toutes ces choses qui ont définitivement coupé contact avec l'humanité, que les hommes ont exilées,oubliées mais qui s'en accommodent, est pour le héros aide, leçon, exemple. II.

La lumière • ...

Surtout qu'elles sont transfigurées. • Si le regard a cueilli d'abord un monde matériel, très vite c'est dans le merveilleux qu'il plonge. • La vue devient vision. • Le monde du grenier devient une fresque de rêve. • Fresque, car elle a des « fonds » sur lesquels ou desquels vont « émerger » les objets. • Tout est en effet transformé par « le soleil couchant ». • Le grenier était simplement « éclairé » à l'origine par les « tuiles de verre » ; il est « à cette heure » — heure aussi. »

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