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Jean-Paul SARTRE et amour

Publié le 02/04/2005

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sartre
Il se peut que je m'agace, aujourd'hui, parce que le mot "amour" ou tel autre ne rend pas compte de tel sentiment. Mais qu'est-ce que cela signifie : (...) A la fois que rien n'existe qui n'exige un nom, ne puisse en recevoir un et ne soit, même, négativement nommé par la carence du langage. Et, à la fois, que la nomination dans son principe même est un art : rien n'est donné sinon cette exigence; "on ne nous a rien promis" dit Alain. Pas même que nous trouverions les phrases adéquates. Le sentiment parle : il dit qu'il existe, qu'on l'a faussement nommé, qu'il se développe mal et de travers, qu'il réclame un autre signe ou à son défaut un symbole qu'il puisse s'incorporer et qui corrigera sa déviation intérieure; il faut chercher : le langage dit seulement qu'on peut tout inventer en lui, que l'expression est toujours possible, fut-elle indirecte, parce que la totalité verbale, au lieu de se réduire, comme on croit, au nombre fini des mots qu'on trouve dans le dictionnaire, se compose des différenciations infinies entre eux, en chacun d'eux - qui, seules, les actualisent. Cela veut dire que l'invention caractérise la parole : on inventera si les conditions sont favorables; sinon l'on vivra mal des expériences mal nommées. Non : rien n'est promis, mais on peut dire en tout cas qu'il ne peut y avoir a priori d'inadéquation radicale du langage à son objet par cette raison que le sentiment est discours et le discours sentiment. Jean-Paul SARTRE

1° Sartre part d'un constat: les mots ("amour") nous paraissent impropres à exprimer exactement nos sentiments.

2° Il pose alors sa thèse, contredisant le constat précédent: tout peut être nommé (même l'absence de mots constitue une nomination)

3. Il explique alors cette contradiction : pourquoi, bien que tout puisse être nommé, avons-nous le sentiment de ne pas pouvoir exprimer nos sentiments ? C'est que nommer est un art : *  pour nommer, il faut inventer (et nous n'inventons pas toujours). Or cette invention n'est pas limitée : « on peut tout inventer « dans le langage ; on peut donc tout exprimer ; *  justification : le sentiment « parle «, il est un discours, qui cherche à s'exprimer et à se réaliser (comme dans l'art : l'art est un discours cherchant son expression).  

 

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« rapport du mot au sentiment que Sartre aborde ici, puisque les sentiments pourraient paraître indicibles, débordant,transcendant toujours ce dans quoi les mots les enferment.

Sartre finit ainsi par dire que contrairement auxapparences, il ne peut y avoir d'inadéquation entre le mot et la chose, le mot et le sentiment puisque le langagepeut à tout moment inventer.

L'inadéquation n'est pas une inadéquation de droit (nécessaire) mais de fait(contingente).

Sur ce point, vous pouvez, par exemple, analyser le langage poétique.

C'est ce que l'exemple de l‘écrivain nous permet de penser.

En effet, Bergson définit (dans « Le Rire ») l'art comme « une vision plus directe dela réalité ».

Or, il y a bien des arts, littérature, poésie, qui emploient le langage : donc le langage peut lui aussipermettre de voir la réalité et donc de penser.

La question se présente là aussi en apparence sous forme deparadoxe : le rôle de l'écrivain consiste « à nous faire oublier qu'il emploie des mots ».

Ecrirait-on malgré les mots ?C'est qu'il y a dans le mot quelque chose qui transcende virtuellement l'usage que nous en faisons habituellement :c'est ce que Bergson appelle sa mobilité, c'est-à-dire son adaptivité à la chose.

On peut comprendre cela de deuxmanières :? D'abord en ce que chaque mot transcende le précédent : c'est la multiplicité des mots et des qualifications quifinit ici par rattraper la mobilité de la chose.? En un second sens, c'est la métaphore juste qui permet au mot de se débarrasser de son rôle habitueld'attributeur de genres.

L'écrivain est celui qui est capable de faire dire aux mots les spécificités de ce à quoi le motrenvoie.

Il n'est sans doute pas anodin de remarquer ici que cette théorie de la substitution au « concept rigide »d'un concept « fluide » capable de dire la ré alité, intervient au moment où le roman se révolutionne, et commence àvouloir épouser la mobilité de ce flux intérieur qu'est le flux de la conscience (Dostoïevski, Proust, et bientôt Gide etJoyce).

SARTRE (Jean-Paul). Né et mort à Paris, en 1905 et 1980. Il fait ses études au lycée Henry IV.

Elève de l'Ecole Normale supérieure de 1924 à 1928, il fut reçu premier àl'agrégation de philosophie, en 1929.

De 1931 à 1944, il fut professeur de lycée.

Il demanda et obtint un congé en1945.

- La pensée de Sartre est influencée par Hegel, Husserl et Heidegger.

Ses premières recherchesphilosophiques ont porté sur l'imaginaire et l'imagination, qui consiste à se rendre présent un objet tenu pour absent.« L'acte d'imagination est un acte magique : c'est une incantation destinée à faire apparaître la chose qu'ondésire.» — La liberté se traduit par le retrait, c'est-à-dire la capacité de voir, dans ce qui est, ce qui n'est pas.

Laconscience, qui est liberté et intentionnalité, est néantisation.

« La néantisation est l'acte par lequel la consciencese libère de l'en-soi en le pensant...

Le pour-soi surgit comme néantisation de l'en-soi.

» Sartre définit ainsi l'en- soi: « Il faut opposer cette formule : l'être en soi est ce qu'il est, à celle qui désigne l'être de la conscience (le pour-soi) : celle-ci en effet a à être ce qu'elle est...

L'être en-soi n'a pas de dedans qui s'opposerait à un dehors...

L'en-soi n'a pas de secret : il est massif.» L'en-soi désigne souvent, pour Sartre, la réalité matérielle.

Sa définition dupour-soi : « Le pour-soi, c'est l'en-soi se perdant comme en-soi, pour se fonder comme conscience.

» — Le pour-soiest une manière pour l'en-soi d'être sur le mode du non-être.

L'existence de la conscience porte témoignage del'existence des choses.

La conscience est fascinée par ce qu'elle connaît :« son être est de n'être pas ce à quoi elleest présente.

» — « Le pour-soi est pour autrui.

» Sartre analyse l'autre et en rend compte par le trouble et larésistance qu'il provoque en nous.

Il définit : « Autrui, c'est l'autre, c'est-à-dire le moi qui n'est pas moi.

» Ladécouverte de l'autre est un conflit, où les deux parties se posent toujours, l'une comme sujet, l'autre comme objet.Il n'y a jamais deux sujets face à face.

« L'enfer, c'est les autres.

» — Son analyse du projet conduit Sartre à posercomme termes synonymes : être et faire.

Pour lui, l'existence précède l'essence.

— Telle est, succinctement etterminologiquement exposée, une doctrine qui est encore en plein accomplissement.. »

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