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KANT: Il n'y a de beauté que pour une sensibilité humaine

Publié le 03/05/2005

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Le beau n'a de valeur que pour l'homme. KANT
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« « Il en va tout autrement du beau.

Il serait tout à fait ridicule que quelqu'un, s'imaginant avoir du goût,songe à en faire la preuve en disant: "Cet objet est beau pour moi".

Car Il ne doit pas appeler beau ce quine plait qu'à lui [ 1 il ne parle pas seulement pour lui, mais pour autrui i 1 c'est pourquoi il dit: "La chose estbelle" et dans son jugement exprimant sa satisfaction, il exige l'adhésion des autres.

»Ce passage est extrêmement important dans la mesure où Kant y exhibe la différence entre l'agréable et lebeau.

L'agréable est toujours, et sans que cela fasse scandale, une stricte affaire de préférencepersonnelle.Je prononce à bon droit « Cela m'est agréable », en me situant au plan des sens « des goûts et descouleurs, on ne discute pas ».

Mais il en va tout autrement du beau: dire « C'est beau pour moi » n'arigoureusement aucun sens.

Si je porte attention à mon attitude quand je juge une chose belle, je découvreque je m'exprime au nom de tous.

Que je prête ma satisfaction à autrui, ou, pour reprendre Kant: «J'exigel'adhésion des autres.

».

Quand je suis démenti, je suis déçu ou je juge que les autres ont « mauvais goût ».Ou encore je tente de les persuader: des goûts et des couleurs, en matière de beauté, on ne cesse dediscuter.Par suite, le plaisir pris à la beauté ne se confond en rien avec le plaisir pris à l'agréable; la beauté n'engagepas que les sens, car la satisfaction sensible est strictement individuelle, et la satisfaction esthétiqueengage la communauté des hommes; je prononce au nom de tous, pour tous.Avant de revenir sur le paradoxe du jugement de goût, il faut relever ce que Kant déduit de ces analyses: «Le beau n'a de valeur que pour l'homme.

».

En effet: « L agréable, le beau, le bon, désignent trois relationsdifférentes des représentations au sentiment de plaisir et de peine.

» Mais précisément, nous avons vu quela satisfaction esthétique ne se confondait ni avec le plaisir sensible (que l'animal ressent aussi bien quel'homme), ni avec l'intérêt moral (qui n'engage que la raison et vaut pour tous les esprits, voire les pursesprits).« On peut dire qu'entre ces trois genres de satisfaction, celle du goût pour le beau est seule unesatisfaction désintéressée et libre; en effet aucun intérêt, ni des sens, ni de la raison, ne contraintl'assentiment.

»Le plaisir pris à la beauté est le seul désintéressé et libre, le seul que nous éprouvions sans y être contraintsni par notre nature animale et sensible, ni par notre nature morale et rationnelle.

C'est une satisfaction pure,libre de tout intérêt, mais, du même coup, une satisfaction qui engage la totalité de la nature de l'homme.

Labeauté en effet ne s'adresse pas qu'à la raison (sans quoi elle se confondrait avec l'intérêt moral), elle nes'adresse pas qu'aux sens (sans quoi elle se confondrait avec l'agrément).

Elle concerne l'homme en tantqu'il est et rationnel et sensible; elle engage tout l'homme, elle n'engage que l'homme.« La beauté n'a de valeur que pour les hommes, c'està-dire des êtres d'une nature animale, mais cependantraisonnables, et cela non pas seulement en tant qu'êtres raisonnables, mais aussi en même temps en tantqu'ils ont une nature animale.

»Reste à comprendre cependant ce qu'engage cette formule, et en quoi le beau vaut et pour notre partsensible et pour notre part rationnelle.

Or on peut le saisir à partir du jugement de goût.

Il est en effetremarquable et que la beauté ne vaille que pour l'homme et que former un jugement de goût soit juger aunom de tous les hommes, pour tous les hommes.

Si la beauté engage toute notre humanité, juger d'unechose qu'elle est belle est d'emblée s'inscrire dans une communauté, d'emblée postuler, exiger unecommunication possible entre les différents individus.

Une des avancées majeures de la « Critique de lafaculté de juger » est que Kant y approche la notion d'intersubjectivité, et découvre dans le jugementesthétique la possibilité ultime d'une communication humaine. Le jugement de goût met en effet au jour un paradoxe.

D'une part on ne peut pas prouver d'une chosequ'elle est belle.

La beauté n'est pas conceptuelle: elle ne se prouve pas mais s'éprouve.

Il faut toujours voir(ou entendre, etc.) ce sur quoi nous avons à prononcer un jugement pour pouvoir le faire.

Mais d'autre partle jugement esthétique prétend valoir pour tous, exige l'adhésion des autres.

Bref, il a les prétentions d'unjugement de connaissance (qui se prouve et procède par concept), alors qu'il n'est qu'un jugementparticulier, prononcé par un individu.Or, que manifeste en fait la beauté, qui s'adresse en moi aussi bien à l'intelligence qu'à la sensibilité ? Elleest, pour Kant, le sentiment d'un accord en nous entre les deux facultés requises pour toute connaissance:l'imagination et l'entendement.

La beauté vient de ce que j'éprouve en moi l'accord libre, non contraint del'entendement et de l'imagination.

Or cet accord, cette harmonie entre mes facultés de connaissance estune condition préalable à toute connaissance déterminée; il faut qu'il puisse y avoir accord entre ces deuxfacultés, qu'elles soient commensurables entre elles, pour ainsi dire « directement », pour qu'uneconnaissance déterminée soit possible.

Il faut que les conditions de la connaissance soient réalisées dans lesujet pour que la connaissance d'un objet soit possible.

Or c'est la beauté qui est signe de cet accord libreet subjectif de nos facultés:« Sans cet accord en tant que condition subjective de l'acte de connaître, la connaissance considérée entant qu'effet ne saurait se produire.

»Or cet accord doit exister en tout être humain, sinon nous ne pourrions jamais rien communiquer.« Ce plaisir doit nécessairement en chacun reposer sur les mêmes conditions, parce qu'elles sont lesconditions subjectives d'une connaissance en général, et la proportion de ces facultés de connaître, qui estexigée pour le goût, l'est aussi pour l'entendement commun et sain.

»Kant indique qu'il existe trois maximes du sens commun: « Penser par soi-même; .penser en se mettant à laplace de tout autre ;.

toujours penser en accord avec soi-même.

». »

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