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Pourquoi parle-t-on ?

Publié le 01/02/2004

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Remarquer qu'on ne dit que des hommes qu'ils «parlent« (même si l'on peut admettre, en un certain sens, qu'il existe des langages « animaux«). Il sera donc opportun de s'interroger sur le fait que seuls les hommes « parlent «.  Remarquer également que la question «pourquoi« est quelque peu équivoque. En effet elle peut signifier : « dans quel(s) dessein(s) parle-t-on ? « aussi bien que « quelles sont les conditions spécifiques qui font que l'on peut parler ? «.

I. La parole constitue la conséquence de la nature politique de l'homme (Aristote).

II. Mais il n'y a pas de parole sans cohérence et sans rationalité : on parle aussi et surtout pour penser (Descartes).HTML clipboard

III. Parler, c'est activer autant la nature rationnelle que sociale de l'homme : car parler, c'est avant tout interagir (Habermas).

 

« capable d'employer le langage, sinon pour le répéter sans le comprendre (les pies ou les perroquets par exemple).

Siles animaux ne parlent pas, ce n'est donc pas par défaut d'organes convenables - les imitations peuvent être trèsbonnes pour certains oiseaux -, mais ils ne pensent pas ce qu'ils disent, et ne sont pas capables d'inventer unsystème de signes pour se faire comprendre.

Seul l'homme dispose d'une raison, les animaux n'en ont aucune.

Mêmel'animal le plus doué n'est pas capable d'égaler l'enfant le plus stupide.

Enfin, si les animaux avaient la moindre tracede raison, ils seraient en mesure de nous le faire savoir, ce qui n'a jamais eu lieu.

La faculté de langage est doncétroitement liée à la raison : elle y trouve son origine et sa capacité de développement.

Parler ne consiste donc pasà associer des mots, mais à penser ce que l'on dit, et à dire ce que l'on pense. Descartes ( Lettre au marquis de Newcastle ) : les bêtes, contrairement à l'homme, ne parlent pas, et pourtant nombre d'entre elles sont également des êtres vivant en société.

La cause du langage se trouve donc ailleurs, car siles bêtes expriment des passions, il n'y a pourtant pas chez elles de véritable langage.

Descartes fournit uneréponse avec la thèse de l'animal-machine : étant dépourvus d'âme et de raison, l'animal se trouve naturellementdépourvu de langage, il y a donc une corrélation évidente entre la pensée et le langage ; par ailleurs, cette idée setrouve déjà, par exemple, chez Platon, qui affirmera, par la bouche de Socrate, que la pensée constitue un dialogueintérieur de l'âme avec elle-même : l'on parle donc pour penser, peu importe que cette parole soir oralisée ou non ;elle constitue une figure de dédoublement du sujet pensant, qui s'adresse à lui-même comme à un interlocuteur.

Lapensée trouve donc une origine qui n'a pas lieu dans les passions, contrairement aux autres animaux : l'hommeemploie des signes linguistiques pour communiquer des pensées, et l'absence de ces signes chez les animauxmontrent précisément qu'ils ne pensent pas.

Plus que le critère politique, c'est donc le critère rationnel qu'il faut iciretenir pour déterminer la cause première du langage humain. III.

Parler, c'est activer autant la nature rationnelle que sociale de l'homme : car parler, c'est avant toutinteragir (Habermas) Habermas ( Morale et Communication ) : le langage implique nécessairement, d'une part, la nature sociale de l'homme ou, plus précisément, l'intersubjectivité dans laquelle il évolue ; et d'autre part, il implique aussi sa naturerationnelle, car parler c'est être rationnellement motivé par l'autre pour agir conjointement.

Habermas oppose deuxtypes d'activités humaines : d'une part, l'activité stratégique, qui constitue l'activité où l'on manipule l'autre, où l'oninflue sur l'autre pour obtenir la continuation de l'interaction ; d'autre part, l'activité communicationnelle, où chacun est motivé rationnellement par l'autre pour agir conjointement.

Le langage est donc essentiellement communication,et c'est à travers elle que les hommes parviennent rationnellement à une entente, laquelle est obtenue à la mesurede la reconnaissance intersubjective des exigences de validité.

Ainsi, le langage est en lui-même porteur de socialitéet de rationnalité, à partir du moment où les individus qui en prennent la charge acceptent d'entrer dans lecommunicationnel, c'est-à-dire dans le libre débat intersubjectif à partir duquel des accords pourront être noués,ces accords dépendant de certaines exigences de validité eux-mêmes fixés par le débat.

Toute action, renduepossible par le communicationnel, est donc avant tout interaction.

Parler, c'est donc interagir afin d'agirrationnellement en coordination avec les autres. Au philosophe allemand Jurgen Habermas (1929) revient le soin de traduire ces soucis dans les termes d'une démocratie vivante.

Le concept d'espace public, grâce auquel il tente de penser l'érosion continue de la politiquemoderne, devient vite déterminant.

Si l'on entend par espace public l'ensemble des relations au coeur desquelless'accomplit, de façon vivante, une parole politique (et non les lieux publics), on aura sans doute compris que l'Étatdémocratique moderne souffre de le voir colonisé par les médias et les autres instances de confiscation de la parole(ou d'imprégnation de modèles figés).

Les citoyens se détournent de l'espace public parce qu'ils ne peuvent plus yêtre entendus, à défaut de le vivifier eux-mêmes.Malgré tout, ils disposent, par le langage, d'une puissance immanente de lien (il existe un lien incontournable entredes hommes qui ne sont pas des monades séparées), d'une puissance d'intersubjectivité, qu'il convient de fairevaloir (on parle et on vit ensemble).

La neutralisation de l'espace public dans la dispersion et la fluidité, l'espace dujournal ou de la télévision, de la place publique, voués à la seule coprésence et au côtoiement, les barrières mises àla proximité, l'opposition du quotidien et du spectaculaire, suspendent un échange appropriable par les citoyens(L'Espace public, 1962).Sur le modèle du langage, de l'intersubjectivité, la parole peut être à nouveau vivifiée dans un espace publicdécolonisé.

Il en découlerait que l'attention à autrui y trouverait de nouvelles exigences exercées contre ladésaffection par les citoyens des affaires publiques, que les hommes politiques se verraient soumis à des contrôles(obligés de convaincre, et non de persuader, toucher ou se faire voir/donner à voir dans les médias).En définitive, la philosophie politique se charge à nouveau de l'horizon du droit : la question n'est plus de savoir cequ'est la vie bonne, ni comment transformer le monde, mais de savoir à quelles conditions une norme peut passerpour valide, aux yeux de tous ? Habermas veut ainsi rétablir le point de vue du « nous », de l'unité sociale, à partir d'un accord normatif et non d'un impératif coercitif.

Il dénomme cet accord « communication », parce qu'il repose sur et engendre du « commun » (Théorie de l'agir communication nel, 1981). Conclusion -La parole révèle la nature socio-politique de l'homme, puisqu'elle constitue avant tout un échange d'informations :elle suppose donc la présence d'autrui en face du sujet parlant ; le premier objet de la parole comme sa fin ultime,semble être certaines valeurs "politiques" qui assurent la cohésion sociale.. »

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