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Liberté naturelle et liberté civile ?

Publié le 07/02/2004

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Rousseau exprime cette idée à plusieurs reprises & en particulier au début du « Contrat social » : « Ce passage de l'état de nature à l'état civil produit dans l'homme un changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l'instinct, et donnant à ses actions la moralité qui leur manquait auparavant. C'est alors seulement que, la voix du devoir succédant à l'impulsion physique et le droit à l'appétit, l'homme, qui jusque-là n'avait regardé que lui-même, se voit forcé d'agir sur d'autres principes, et de consulter sa raison avant d'écouter ses penchants.Quoiqu'il se prive dans cet état de plusieurs avantages qu'il tient de la nature, il en regagne de si grands, ses facultés s'exercent et se développent, ses idées s'étendent, ses sentiments s'ennoblissent, son âme tout entière s'élève à tel point, que si les abus de cette nouvelle condition ne le dégradaient souvent au-dessous de celle dont il est sorti, il devrait bénir sans cesse l'instant heureux qui l'en arracha pour jamais, et qui, d'un animal stupide et borné, fit un être intelligent et un homme.» Pour Rousseau, si l'on considère l'histoire de l'humanité, l'homme n'est pas né homme ; il l'est devenu. Il en va de même en ce qui concerne la destinée individuelle : on ne naît pas homme ; on le devient. Le pédagogue pour qui le petit d'homme n'est pas un petit homme rejoint ici le penseur politique. Que l'on se penche sur l'histoire de l'humanité ou sur celle d'un enfant devenant adulte, il ne faut pas supposer au départ ce qui ne se trouve qu'à l'arrivée, mais procéder à une étude génétique (le terme est de Rousseau), comprendre comment on est passé du stade initial au stade ultime.     Dans ses discours, Rousseau reconstitue la genèse de l'humanité. Dans « Emile », il s'attache à la genèse de son âme. Conscient de l'originalité de sa méthode, il s'en explique dans sa « Lettre à Christophe de Beaumont », archevêque de Paris (1763), à la suite de la condamnation d' « Emile » par l'Eglise : « Vous supposez ainsi que ceux qui traitent de ces questions, que l'homme apporte avec lui sa raison toute formée, et qu'il ne s'agit que de la mettre en oeuvre.

« ne situe pas la sociabilité à l'origine de la société, mais à son terme.

La raison, qui n'existait qu'à l'état virtuel dansle coeur de l'homme primitif, ne devient une composante de l'être humain que lorsque celui-ci se met à fréquenterses semblables.

L'homme ne s'extirpe de l'animalité pour accéder véritablement à l'humanité qu'au contrat des autreshommes.

Rousseau exprime cette idée à plusieurs reprises & en particulier au début du « Contrat social » : « CE PASSAGE DE L 'ÉTAT DE NATURE À L 'ÉTAT CIVIL PRODUIT DANS L 'HOMME UN CHANGEMENT TRÈS REMARQUABLE , EN SUBSTITUANT DANS SA CONDUITE LA JUSTICE À L 'INSTINCT , ET DONNANT À SES ACTIONS LA MORALITÉ QUI LEUR MANQUAIT AUPARAVANT .

C' EST ALORS SEULEMENT QUE , LA VOIX DU DEVOIR SUCCÉDANT À L 'IMPULSION PHYSIQUE ET LE DROIT À L 'APPÉTIT , L'HOMME , QUI JUSQUE -LÀ N'AVAIT REGARDÉ QUE LUI -MÊME , SE VOIT FORCÉ D 'AGIR SUR D 'AUTRES PRINCIPES , ET DE CONSULTER SA RAISON AVANT D 'ÉCOUTER SES PENCHANTS . QUOIQU 'IL SE PRIVE DANS CET ÉTAT DE PLUSIEURS AVANTAGES QU 'IL TIENT DE LA NATURE , IL EN REGAGNE DE SI GRANDS , SES FACULTÉS S'EXERCENT ET SE DÉVELOPPENT , SES IDÉES S 'ÉTENDENT , SES SENTIMENTS S 'ENNOBLISSENT , SON ÂME TOUT ENTIÈRE S 'ÉLÈVE À TEL POINT , QUE SI LES ABUS DE CETTE NOUVELLE CONDITION NE LE DÉGRADAIENT SOUVENT AU -DESSOUS DE CELLE DONT IL EST SORTI , IL DEVRAIT BÉNIR SANS CESSE L 'INSTANT HEUREUX QUI L 'EN ARRACHA POUR JAMAIS , ET QUI , D'UN ANIMAL STUPIDE ET BORNÉ , FIT UN ÊTRE INTELLIGENT ET UN HOMME .» Pour Rousseau , si l'on considère l'histoire de l'humanité, l'homme n'est pas né homme ; il l'est devenu.

Il en va de même en ce qui concerne la destinée individuelle : on ne naît pas homme ; on le devient.

Le pédagogue pourqui le petit d'homme n'est pas un petit homme rejoint ici le penseur politique.

Que l'on se penche sur l'histoire del'humanité ou sur celle d'un enfant devenant adulte, il ne faut pas supposer au départ ce qui ne se trouve qu'àl'arrivée, mais procéder à une étude génétique (le terme est de Rousseau ), comprendre comment on est passé du stade initial au stade ultime. Dans ses discours, Rousseau reconstitue la genèse de l'humanité.

Dans « Emile », il s'attache à la genèse de son âme.

Conscient de l'originalité de sa méthode, il s'en explique dans sa « Lettre à Christophe de Beaumont », archevêque de Paris (1763), à la suite de la condamnation d' « Emile » par l'Eglise : « Vous supposez ainsi que ceux qui traitent de ces questions, que l'homme apporte avec lui sa raison toute formée, et qu'il ne s'agit que de lamettre en oeuvre.

Or, cela n'est pas vrai ; car l'une des acquisitions de l'homme, et même des plus lentes, est laraison.

L'homme qui, privé du secours de ses semblables et sans cesse occupé de pourvoir à ses besoins, est réduiten toute chose à la seule marche de ses propres idées, fait un progrès bien lent de ce côté-là : il vieillit et meurtavant d'être sorti de l'enfance de la raison.

» Ce qui se rapporte ici à l'individu vaut aussi pour l'humanité tout entière, car, d'une certaine façon, cettehistoire de l'humanité recommence avec l'histoire de chaque être.

Un passage de l' « Emile » le montre bien : « O Emile ! où est l'homme de bien qui ne doit rien à son pays ? Quel qu'il soit, il lui doit ce qu'il y a de plus précieux pourl'homme, la moralité de ses actions et l'amour de la vertu.

Né dans le fond d'un bois, il eût vécu plus heureux et pluslibre : mais n'ayant rien à combattre pour suivre ses penchants, il eût été bon sans mérite, il n'eût point étévertueux, et maintenant, il sait l'être malgré ses passions.

La seule apparence de l'ordre le porte à le connaître, àl'aimer.

Le bien public, qui ne sert que de prétexte aux autres, est pour lui seul un motif réel.

Il apprend à secombattre, à se vaincre, à sacrifier son intérêt commun.

Il n'est pas vrai qu'il ne tire aucun profit des lois ; elles luidonnent le courage d'être juste, même parmi les méchants.

Il n'est pas vrai qu'elles ne l'ont pas rendu libre, elles luiont appris à régner sur lui .» Pour Rousseau , l'homme ne s'est donc humanisé qu'en se socialisant.

Durkheim le soulignait : « Il y a longtemps que Rousseau l'a démontré : si l'on retire de l'homme tout ce qui lui vient de la société, il ne reste qu'un être réduit à la sensation, et plus ou moins indistinct de l'animal. » Notre lecteur est peut-être porté à se demander en quoi ces considérations sur l'origine de l'humanité peuventaider à comprendre la réalité politique. Tout d'abord, remarquons que ces considérations se rapportent aussi à des réalités très proches, puisque ce quivaut pour l'humanité s'applique aussi à la formation des individus.

L'histoire de l'humanité est à refaireperpétuellement en chacun de nous.

Mais Rousseau marque une date essentielle dans l'histoire de la pensée politique – « une révolution dans la spéculation politique », dit l'un de ses commentateurs – en montrant et en démontrant que l'homme est d'abord et surtout une histoire.

Il est donc vain de l'expliquer ou le régenter en voulantne retenir que ce qu'il a de commun avec l'animal : « Ainsi les combats de coqs ne forment point une induction pour l'espèce humaine. ». »

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