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La liberté peut-elle faire peur ?

Publié le 27/02/2011

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   DIRECTIONS DE RECHERCHE    • La liberté peut-elle faire peur à qui? En quoi?    • N'y aurait-il pas lieu de distinguer différentes appréhensions de la liberté?    N'y en aurait-il pas pour lesquelles le sujet n'aurait pas de sens?    • On peut trouver des développements intéressant particulièrement le sujet proposé (et lui donnant particulièrement sens) dans certains travaux de Sartre et Simone de Beauvoir.    — Consulter L'Être et le Néant (Gallimard) (notamment la fin de l'ouvrage), de Sartre.    — Pour une morale de l'ambiguïté de Simone de Beauvoir.

« - Kant commence par énoncer une idée générale: L'éducation est fondamentale, car c'est par elle que l'hommedevient réellement homme.

(L'homme est donc essentiellement un être culturel.)- Il en tire une conséquence: Puisque ce qu'est l'homme dépend largement de son éducation, l'homme apparaîtcomme perfectible.–Il pose un problème: «Quelle est la limite de cette perfectibilité»? (En d'autres termes, quelles sont les limitesimposées à l'homme par sa nature – par ses «dispositions naturelles»?) Nous ne le savons pas, fauted'expérimentation sur l'éducation.

– Il exprime sur ce plan un regret: Que ces problèmes d'éducation soient sinégligés par les hommes supérieurs, les «grands ». Intérêt philosophique du texte Il est multiple.

Ce texte pose en effet le problème de la valeur de l'éducation, et de la possible perfectibilité del'homme, problème qui dépend largement du rapport entretenu chez l'homme entre la culture et la nature:l'homme est-il avant tout déterminé par sa nature (déterminisme biologique) ou est-il essentiellement un êtreculturel, donc uniquement ce que l'éducation (entendue au sens large) le fait ? Obéir est assez simple ; se décider par soi-même peut être complexe, ou angoissant.

Il n'est pas étonnant dès lorsque certains individus se réfugient dans l'application systématique de ce qu'ils ont appris : plus la morale acquise estrigide, plus ils agiront facilement, puisqu'ils n'auront plus besoin de réfléchir avant de se décider et que d'autrescontinueront, d'une certaine façon, à penser et choisir pour eux.

Dans de telles cas, c'est la morale la plusimpressionnante, celle qui semblera s'imposer avec le plus de force, qui sera du plus grand secours, par exemple unemorale d'origine religieuse.

Et l'on sait que certains esprits déplorent précisément que Dieu ait accordé la liberté auxhommes : s'ils étaient mécaniquement dirigés vers le bien, le monde serait infiniment plus beau ! C'est qu'avec laliberté surgit la tentation, la possibilité du péché : n'y a-t-il pas là de quoi avoir peur ? Adam et Eve ont péché dufait même de leur liberté ! [Il.

Liberté et loi morale] « Si Dieu n'existe pas, alors tout est permis ».

La formule de Dostoïevski résume magistralement la situation : uneliberté absolue, privée de normes transcendantes, peut faire le mal comme le bien.

C'est pourquoi la plupart desthéoriciens de la morale ont affirmé, chacun à sa façon, que la volonté de l'individu devait être déterminée par unprincipe extérieur - ce que Kant nomme une détermination « hétéronomique ».

Le recours au divin n'est pas la seule solution : on peut également admettre que ce qui nous oblige à bien agir provient de la société, de l'éducation, dessentiments, etc.

Dans tous les cas, il reste notable cependant que la loi, d'où qu'elle vienne, implique par définitionla possibilité de lui désobéir, parce que cette possibilité marque l'existence de la liberté, en l'absence de laquelleaucune moralité ne serait possible.

Le choix de ma conduite doit être libre, faute de quoi on ne pourrait en aucuncas me la reprocher : lorsqu'il élabore son interprétation de la moralité par l'autonomie de la volonté, Kant réaffirme,plus fortement peut-être encore que ses prédécesseurs, le lien nécessaire entre liberté et responsabilité.Il y a, pour Kant, une norme, qui nous est précisément indiquée par la loi, et qui correspond à la nature rationnellede tout individu et, au-delà, de l'humanité dans son ensemble.

De sorte que le risque de mal faire se trouveconsidérablement amoindri : en suivant la loi, je sais que j'agis comme pourrait le faire n'importe quel homme à maplace ; la liberté n'est plus un poids dès lors qu'elle est ainsi guidée par ma raison trouvant d'elle-même la loi àsuivre.

L'homme kantien, qui évolue dans un univers rationnel, ne peut avoir peur d'être libre. [III.

Liberté absolue et responsabilité universelle] Il n'en va plus de même pour l'existentialiste sartrien.

Car Sartre déduit de la formule citée de Dostoïevski desconséquences dramatiques.

L'homme étant doté d'une liberté absolue, rien ne peut l'aider dans sa conduite.

Rien,c'est-à-dire ni un tuteur, ni un conseiller, ni un prêtre, ni même - et c'est sans doute le plus grave - une loi qu'iltrouverait en lui, parce qu'une telle loi ne peut exister : son universalité signifierait que l'homme peut être définiessentiellement ; or, dans l'homme, « l'existence précède l'essence ».

Ce qui a pour conséquence une solituderadicale de chacun.

Sartre en donne, dans L'existentialisme est un humanisme, une illustration simple : à l'étudiantqui cherche conseil pour savoir s'il doit s'engager dans la Résistance en laissant sa mère vivre seule dans desconditions difficiles, ou s'il doit au contraire continuer à s'occuper de sa mère en négligeant la collectivité, il estrépondu que personne ne peut choisir à sa place : qu'il se décide seul.

Mais qu'il sache simultanément que son choixengage, bien au-delà de sa personne, une conception de l'humanité, qui se trouvera ainsi repérée comme «résistante » ou compatissante ».C'est bien dans une telle conception que la liberté peut faire peur, car non seulement chacune de mes décisions, enraison de ma liberté, doit être prise sans aucun garde-fou, mais de surcroît elle me rend responsable d'une version de l'humanité dans son ensemble.

Au point que, selon le Sartre de l'époque existentialiste, je me trouve responsablemême d'événements auxquels je n'ai nullement participé, aussi longtemps du moins que je ne fais pas connaître mondésaccord à leur propos.

La responsabilité devient ainsi maximale, elle couvre mes actes, mais aussi ceux accomplispar exemple au nom de mon groupe ou de ma nation.

La liberté, le « pour-soi », révèle ainsi son envers, que l'onpourra juger encombrant ou terriblement menaçant.On comprend alors que la tentation de refuser une telle liberté soit fréquente : elle définit le « salaud », qui s'abritederrière une version déjà faite de la conduite, du devoir, du choix politique.. »

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