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La morale peut-elle se fonder sur les sentiments ?

Publié le 12/03/2004

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morale

L'enfant qui brise un vase sous le coup de la colère, pour se venger ou par caprice, est-il plus excusable que s'il l'avait  fait par accident ? L'exigence de moralité abhorre les sentiments, car elle vise l'universalité. Pour elle, être fondée signifie « disposer d'un critère valable en toutes circonstances « : ce que ne sont manifestement pas les sentiments. Cependant, il est un fait indéniable : si les sentiments sont variables et subjectifs, tous les hommes ne laissent pas d'en éprouver. De ce point de vue, le sentiment est universel et c'est ce qui lui a valu d'être mis en avant par des penseurs anglo-saxons tels que Hutcheson, Shaftesbury ou Adam Smith.   II - Du sentiment moral à la bonne volonté   La pensée empiriste anglaise s'est intéressée aux sentiments dans l'optique d'une fondation de la moralité, notamment en mettant en avant le sentiment moral. De quoi s'agit-il ? Pour l'école anglaise, le sentiment moral possède trois caractéristiques : premièrement, il permet de ne pas fonder la morale sur la seule raison, c'est-à-dire sur la connaissance rationnelle de nos devoirs ; deuxièmement, et c'est une conséquence, le sentiment moral est commun à tous les hommes : le fait moral peut donc apparaître à tous, de manière évidente et universelle, sans que l'on ait besoin d'avoir recours à la réflexion spéculative. Par exemple, je n'ai pas besoin de réfléchir pour comprendre que le meurtre est immoral ; l'immoralité est spontanément ressentie. Troisièmement, le sentiment moral s'accompagne d'une dimension esthétique, qui nous rend sensible à la beauté, voire la sublimité des actions vertueuses.

La morale repose sur la sympathie, qui a un rôle directement pratique. C'est ce sentiment et lui seul qui peut régler nos actions. C'est lui qui pousse chaque être à dépasser la sphère de ses intérêts égoïstes.

MAIS...

C'est pure hypothèse de penser que l'homme éprouve naturellement un sentiment moral, une sympathie pour ses semblables. Il n'y a de moralité que là où il y a volonté d'obéir à un impératif rationnel.

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« III – Schopenhauer : une morale de la pitié Kant, suivant en cela les empiristes, reconnaît donc les vertus des sentiments ; sous l'espèce du sentiment moral, il garantit que tout un chacunest sensible aux impératifs moraux.

L'être immoral, le barbare, n'est-il d'ailleurspas dit « insensible » ? Cependant, cela ne suffit pas pour faire dessentiments le fondement de la morale.

Pour Kant, ce fondement repose sur laloi morale – c'est-à-dire des impératifs catégoriques, universels, issus de laraison – vers laquelle se porte la volonté.

Toutefois des mobiles rationnelssont-il autant aptes que les sentiments à nous faire agir moralement ? Pour Schopenhauer, si Kant détermine les caractéristiques de l'acte moral, en dégageant le fondement qu'est la loi morale, celle-ci demeureincapable de nous faire agir.

Pour se mouvoir, il faut d'abord s'émouvoir.

C'esten ce sens que Schopenhauer fonde sa morale sur la pitié, c'est-à-dire sur lesentiment de compassion.

En effet, pour lui, le monde tel qu'il nous apparaîtn'est qu'un voile, une apparence, due à notre faculté de connaître.

Or, par-delà ce voile, règne une unité parfaite : en somme, derrière l'illusion qu'ont leshommes d'être des individus séparés, tout se ramène à une unique substance,que Schopenhauer nomme volonté.

Dès lors, face à la souffrance d'autrui, ilme suffit de prendre conscience de cette unité, de lever le voile del'apparence pour m'apercevoir que ce qu'il endure m'affecte aussi.

Prendreconscience de l'unité du monde, c'est prendre en pitié le monde et tous les hommes.

Ce sentiment d'unité et de souffrance partagée est le seul apte, selon Schopenhauer, à susciter en nousla justice et la charité. En effet, le sentiment de pitié nous conduit, premièrement, à la justice, selon l'adage « neminem laede », qui signifie « ne lèse personne », puisque la souffrance d'autrui est en son fonds identique à la mienne et augmenter lasienne ne ferait que contribuer à mon malheur.

Deuxièmement, la pitié nous porte à la charité, qui exige de nous quenous portions secours à autrui par l'allégement de ses souffrances.

Seule la pitié, la compassion, ressentie dans une souffrance commune peut donc nous porter vers autrui, c'est-à-dire fonder une attitude morale. Conclusion : Ainsi, les sentiments apparaissent changeants et variables, trop inconstants pour fonder une quelconque morale.

Cependant, la sensibilité qui leur est commune introduit l'homme à la sphère de la morale : qui ne ressentrien, ne peut être moral.

Pour Kant, il s'agira de prendre appui sur cette sensibilité, commune à tous les hommes,pour atteindre la loi morale, seul fondement universel de la morale.

Pour Schopenhauer, au contraire, il s'agit deréduire les sentiments à la seule pitié, paroxysme de la sensibilité, car elle seule peut nous pousser à agir, à allégerles souffrances du monde au moyen de la justice et de la charité.. »

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