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Nature et société sont-elles au même titre objet de science ?

Publié le 04/02/2004

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Le physicien fait bien partie du monde qu'il étudie, mais ce n'est pas le monde dans son ensemble qu'il cherche à connaître : son approche se cantonne à un phénomène « local «, qu'il peut considérer « objectivement « parce qu'il lui est totalement étranger. Pour le sociologue, la situation n'est pas exactement équivalente : il fait partie du social, ce qui signifie aussi qu'il possède, en tant qu'individu, des valeurs, qu'il est membre d'une classe, d'un groupe, d'une profession. En d'autres termes, il ne bénéficie d'aucune extériorité - ou d'une extériorité très partielle. Son « objectivité « n'est pas celle du physicien (même si cette dernière n'est pas aussi absolue qu'on le pensait classiquement : on sait que certaines observations perturbent les champs observés) et relève plutôt de l'honnêteté intellectuelle, de l'effort pour se dégager de sa propre mentalité avant d'aborder un domaine d'étude.En second lieu, la science de la société risque, non seulement de dépendre idéologiquement de la société dans laquelle elle se développe, mais aussi d'avoir des conséquences, à court ou moyen terme, sur cette même société. L'existence de sociologues se réclamant du marxisme (quelle qu'en soit la version) ou qui lui sont au contraire hostiles suffit pour indiquer le mélange de science et d'idéologie que risque toujours d'être la sociologie (d'où la diversité des résultats portant sur une même question, selon que l'étude est menée aux États-unis, en Russie ou en Europe...).Parce que la réalité sociale est faite à la fois de comportements collectifs et de conduites individuelles, la sociologie peut aussi modifier ce qu'elle étudie. Interroger une population sur ses choix politiques, ce peut être inviter une partie de cette population, jusqu'alors indifférente, à choisir effectivement. Porter à la connaissance du public les déterminismes qu'il peut subir, c'est modifier sa conscience et, peut-être, ses conduites.

- Ne pas se contenter de la classique comparaison entre sciences de la nature et sciences humaines ou sociales : sélectionner (pas de récitation de cours sur les sciences humaines) les informations pour interroger le statut d'« objet de science «. - L'analyse des conditions de formation des deux « sciences « peut fournir des éléments de réponse. - Ne pas hésiter à rappeler qu'avant la sociologie (accessoirement l'histoire) comme « science de la société «, d'autres discours ont été tenus sur la société. - Si l'on a besoin de recourir à la notion d'objectivité pour différencier les deux sciences, ne pas en utiliser une conception trop classique.

« [III.

Science et efficacité] Il n'a jamais été interdit à un scientifique de prétendre agir dans la société ou politiquement.

Mais lorsqu'unphysicien ou un biologiste signe une pétition ou, profitant de sa notoriété, fait connaître un engagement politique,c'est (ou ce devrait être) en tant qu'individu privé, car on ne voit pas que la physique ou la biologie donnent unecompétence sociopolitique particulière, ni qu'elles puissent agir directement sur la réalité sociale.

Tout autre peutêtre la position éventuelle du sociologue, puisque la connaissance de plus en plus précise des déterminants sociauxdonne en effet les moyens d'influer sur la réalité sociale (c'est bien pourquoi les organismes de publicité sont friandsde données sociologiques).

Dans le domaine de la société, la connaissance va de pair avec l'efficacité ou l'action.On dira peut-être que les sciences de la nature sont dans une situation équivalente.

Continuer à admettre qu'ellesse seraient développées par pur souci de comprendre le monde semble désormais assez naïf, et l'on admet plutôtque le savoir est étroitement lié au pouvoir sur la nature, jusqu'à évoquer l'existence d'un universtechnoscientifique, dont l'appellation suffit à indiquer que la science ne peut se prétendre étrangère à sesapplications techniques.

Il n'en reste pas moins que c'est dès ses débuts (chez Comte) que la sociologie estclairement tournée vers l'efficacité sociale : cette finalité fait en quelque sorte partie de sa définition, alors qu'ellen'est apparue que progressivement dans les sciences de la nature. [Conclusion] Il est possible de considérer que c'est précisément parce que les sciences de la nature avaient fait la preuve de leurefficacité que s'est formé au XIXe siècle le projet d'étudier à son tour l'homme de manière scientifique, dans lamesure où les transformations sociales en cours rendaient cette connaissance urgente en raison des problèmesqu'elles posaient (d'organisation du travail, de maintien des équilibres sociaux) – auxquels la philosophie, qui nes'était pas privée depuis Platon d'évoquer la société à sa manière, ne pouvait évidemment pas répondre.

Si lessciences de la nature impliquent que celle-ci soit exploitable ou transformable à satiété, il serait évidemmentfâcheux que la sociologie implique une conception équivalente de l'homme : on doit au moins se demander au profitde qui pourrait se faire une semblable exploitation ou transformation...

Il faut d'abord se concentrer sur l'énoncé : ici, le " au même titre " sous-entend qu'il y a sans doute une différence.Ainsi, si on peut avoir des sciences de la nature (physique, biologie) et des sciences de l'homme en société(économie, sociologie), est-ce qu'elles utilisent les mêmes méthodes ? Et, surtout, est-ce que toutes les deux sont" vraies " ? Laquelle est la plus vraie ? Les sciences de l'homme doivent-elles prendre les mêmes méthodes que lessciences de la nature ? On peut tout d'abord répondre que les sciences physiques sont sans doute le modèle de la vérité, de l'objectivité(objectivité : un savoir fondé).

Pourquoi ? Parce que, notamment, la nature est un objet de connaissance possible :elle est extérieure à l'homme.

Tu peux alors décrire rapidement ce qu'est la connaissance scientifique de la nature. Est-ce qu'il est possible que les sciences de l'homme aient la même méthode ? Non, bien sûr, car leur objet c'estl'homme : ce n'est pas quelque chose d'extérieur à nous, qu'on pourrait "objectifier".

En plus, ici, on ne peut fairedes expériences en laboratoire qui aient la même objectivité qu'en sciences de la nature, car l'homme qui participe àl'expérience sait qu'il fait l'objet d'une expérience, et ne se comporte sans doute pas, par conséquent, commed'habitude.

Bref : il te faut essayer de comparer les mérites successifs de chacune de ces connaissances, enprenant pour modèle celle qui passe pour LE modèle... Les sciences de l'homme en société ne sont pas aussi certaines que les sciences de la nature.

Quel genre deconnaissance est-ce alors ? Il s'agit d'interprétations (cf.

la psychanalyse de Freud). On peut se demander s'il faut le déplorer : non, et de toute façon, la science physique n'est pas elle non plus unmoyen sûr de connaître la vérité.

Et, finalement, c'est justement une reconnaissance de la dignité de l'être humain :on ne peut le transformer comme le fait la science avec la nature, en objet extérieur à nous, sans le transformer lui-même en un objet qui n'a pas beaucoup de valeur ! (cf.

Kant et l'impératif catégorique).. »

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