Devoir de Philosophie

Nos paroles dépassent-elles notre pensée ?

Publié le 24/01/2004

Extrait du document

Si la langue, selon le mot d'Ésope, est la meilleure et la pire des choses, c'est sans doute parce qu'elle évite à notre pensée de rester confinée dans l'incommunicabilité et qu'elle lui impose en même temps la perte de son authenticité singulière. Ainsi, à peine proférées, nos paroles semblent dépasser par leurs effets le but que nous leur avions fixé : la transmission fidèle de nos pensées. L'autre, destinataire du message, a compris autre chose. Mais aurait-il compris quoi que ce soit si son for intérieur avait été brusquement uni au mien? Le dépassement de notre pensée par nos paroles ne peut-il être pensé autrement que comme échec de la communication? Il faudrait pour cela situer ce dépassement par rapport à l'équivocité du langage, le justifier relativement à la singularité de la pensée, et reconnaître en lui une condition de possibilité de l'expression.

• Aspect un peu paradoxal du sujet : on se plaint volontiers de ne disposer que d'un langage incapable de formuler tout ce que l'on voudrait, alors qu'ici il s'agit d'examiner le cas contraire. • Prendre 1'"expression « nos pensées « au sérieux : il ne s'agit pas seulement d'évoquer quelques situations quotidiennes dans lesquelles « on ne pense pas vraiment ce qu'on a dit « (la colère, la scène de ménage...). • Quels facteurs peuvent produire un écart entre ce que je pense et ce que je dis ? Cela témoigne-t-il d'une insuffisance de ma pensée ou d'un excès de mon langage ? • D'où provient le surplus de sens ? Sans doute des mots, mais pourquoi ? Qu'y a-t-il dans les mots et dans leur usage qui déborde ma capacité de contrôle ?

« d'élaboration et par le biais des échanges entre individus, des stimulants et des matériaux. B - La pensée, une parole intérieure Si la parole est d'emblée dans la pensée, si comme le disent certains auteurs, la pensée n'est qu'une paroleintérieure, comment pourrait-elle se distinguer du langage et être dépassée par lui ? 2 - La pensée déformée par la parole A - Les raisons de cette déformation Mais même si la pensée est déjà langage, elle peut être déformée par son expression.

D'une part, pour des raisonssociales, notre pensée ne peut être exprimée dans toute sa radicalité et se voit imposer des modifications. D'autre part, notre pensée n'est pas totalement informée par les mots et comporte de nombreux éléments qui nesont pas de nature linguistique. B - Les composants non linguistiques de la pensée Les composants non linguistiques de la pensée, relevant de l'intuition, de l'expérience affective, des idées obscuressont nécessairement dépassés par les paroles car ils changent de forme et de substrat lorsqu'ils sont exprimés. BERGSON et NIETZSCHE ont montré que le langage, fait de notions communes, efface ce que les sentiments et lespensées ont d'individuel, de singulier, d'incommunicable. Ici, la pensée est dépassée par le langage car celui-ci la détourne de sa dimension individuelle pour en faire quelquechose de commun et de général. 3 - Le langage condition d'un dépassement positif de la pensée A - Dépasser la pensée, c'est aussi la faire sortir de son intériorité et la faire advenir dans le mondeextérieur. Ainsi, par le langage, nos idées quittent la sphère étroite de notre esprit et participent au monde phénoménal oùelles pourront enrichir d'autres consciences et être elles-mêmes enrichies.

Elles s'affranchissent de leurs limites endevenant de la matière vocale signifiante. B - L'adéquation totale entre paroles et pensée, un idéal chimérique En effet une grande part de l'intériorité est opaque au langage.

En outre, elle ne pourrait être réalisée que par unesimplification extrême de la pensée et par une mécanisation des productions mentales. En nous dépassant vers d'autres consciences par la parole, nous accomplissons un effort essentiel decommunication qui nous situe dans l'intersubjectivité active.

Une même idée peut être diversement exprimée et celaest une richesse plus qu'un inconvénient. V - QUELQUES REFERENCES POSSIBLES NIETZSCHE, Le gai savoir BERGSON, Les données immédiates de la conscience HEGEL, Encyclopédie Philosophique de l'esprit VI - LES FAUSSES PISTES Il ne fallait pas réduire le terme de dépassement à un seul sens possible et l'envisager de façon seulement négativeou seulement positive. VII - LE POINT DE VUE DU CORRECTEUR Ce sujet offre la possibilité de réfléchir sur une thématique classique et toujours actuelle. Il s'inscrit parfaitement dans le cadre de l'analyse du langage et ne présente pas un degré excessif de difficulté. Il renvoie à l'expérience de tout individu confronté à la nécessaire résistance que lui offre le langage comme la. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles