Devoir de Philosophie

La notion de personne et les conditions concrètes de l'unité personnelle

Publié le 16/01/2004

Extrait du document

  Sur la société L'unité du moi semble se construire sur des valeurs qui motivent nos actes libres ; ces valeurs proviennent notamment de la communauté dans laquelle nous évoluons. On acquiert progressivement depuis l'enfance ce sentiment du moi unifié, en imitant, ou au contraire en s'opposant à autrui. La société m'inculque la notion de responsabilité : je reconnais les actes que j'ai commis la veille comme miens.  La mémoire assure également l'unité de la personne à travers le temps : souvenir de ma date de naissance, de mon nom... (Leur oubli est le symptôme de graves troubles ou dédoublement de la personnalité).   Sur le rôle social ? Attention à ne pas confondre la personne et le personnage, et à ne pas se laisser enfermer dans un rôle, ou une image que les gens ont de nous ; ce serait abdiquer sa liberté et devenir une chose (voir Sartre, L'être et le Néant). Pour Pascal (Pensées section V), il faut se dépouiller de tout ce que nous avons afin de bien saisir ce que nous sommes.     Sur l'imagination : Hume. David Hume, inspiré par Pascal, est très sceptique à l'égard de l'unité de la personne. Pour lui, notre imagination identifie notre personne, ce que nous sommes à ce que nous avons ; pour lui, je ne suis même pas plus mes souvenirs et mes idées que ma maison ou ma voiture.

« La personne désigne un sujet conscient et capable de répondre de ses actes.

Le terme de personne (qui vient du latin personna , le masque de l'acteur) désigne chez les Romains le citoyen, qui contrairement à l'esclave, a des droits.

Mais la personne n'est passeulement le sujet de droit, envisagé dans une perspective juridico-politique, car c'est aussi le sujet moral, capable de répondre de sesactes, parce qu'il choisit ses actions en conscience.

Dans ces deux dimensions la notion d'unité est constitutive de la personne.

On levoit bien sur le plan juridique vis-à-vis de questions de bioéthique comme le statut de l'embryon.

Tant que l'on considère l'embryoncomme un amas de cellule, on ne lui reconnaît pas les droits d'une personne (c'est ce qui rend possible l'avortement légal).

De même,sur le plan moral, pour tenir quelqu'un pour responsable de ses actes, il faut que l'on puisse dire que c'est la même personne qui a agià un moment donné, et à qui l'on peut demander des comptes plus tard.

Mais l'on constate pourtant que si l'on peut juridiquementdécider de critères normatifs pour décider ce qui est une personne (au-delà de 12 semaines un embryon n'est plus considéréseulement comme un amas de cellules par le droit français), la question est plus difficile lorsque l'on se demande sur un planmétaphysique s'il y a un fondement de l'unité de la personne qui ne repose pas sur des critères extrinsèques (établis de l'extérieur pardes décisions humaines).

Y a-t-il un principe spirituel qui assure d'emblée cette unité ? Mais On peut douter de l'existence même decette unité de la personne.

On pourra alors penser que cette unité si elle n'est pas un fait, est avant tout une exigence morale, qui fait pleinement accéder l'homme à son humanité.

I.

L'unité de la personne repose sur l'âme humaine, qui contrairement à celle des autres individus, est immortelle etcapable de penser On peut se demander dans quelle mesure l'unité de la personne ne repose pas sur un principe d'unité valable pour toute choseindividuelle, et pas seulement pour les personnes.

En effet toute chose, pour être ce qu'elle est, doit avoir une unité.

C'est ce qui faitdire à Leibniz, dans la Lettre à Arnauld du 30 avril 1687 , que ce qui n'est pas véritablement un être, n'est pas véritablement un être . Cela signifie que la réalité d'une chose provient d'abord de son unité.

Or Leibniz distingue entre deux sortes d'unité 1) l'unité par soi 2)l'unité par agrégation.

L'unité par soi est celle qu'un être ne tire que de lui-même.

L'unité par agrégation est celle qu'un autre être voitdans l'être en question.

Un organisme vivant par exemple, est une unité par soi, parce que le fait qu'il forme une totalité vivante oùtoutes les parties collaborent au tout tient à sa nature même.

Mais un tas de sable est une unité par agrégation, parce qu'il est forméde l'addition de grains de sables distincts, et que c'est seulement la personne qui le regarde qui décide que la réunion de ces grainsforme un tout.

Or l'unité par soi repose sur un principe spirituel, l'âme, qui pour chaque être dont l'unité est par soi, est unique.

Mais l'homme, à la différence des autres substances a accès aux vérités éternelles par la réflexivité, ce qui entraîne que son âme est unesprit, qui est immortel.

C'est donc la qualité de l'âme humaine qui assure l'unité de la personne.

En effet cela permet à l'individuhumain d'avoir conscience de son identité à travers le temps.

II.

L'unité de la personne repose sur une illusion de l'esprit, et n'a en soi aucune réalité.

Pour expliquer l'unité de la personne, Leibniz la fait reposer sur l'esprit.

Or pour que l'esprit assure l'unité de la personne, il doit lui-même être un.

Mais on peut douter de cette unité de l'esprit.

Dans le Traité de la nature humaine, Livre 1, quatrième partie, section 6, Hume considère que l'esprit n'est pas une faculté unitaire, mais une succession de perceptions successives.

Hume souligne d'ailleursque l'on ne peut jamais se saisir soi-même sans une perception particulière.

Or ces perceptions particulières se succèdent, de sorte quedans l'esprit il n'y a ni unité à un moment donné, ni identité à différents moments c'est pourquoi, « l'esprit est une sorte de théâtre ». En effet l'irréductible singularité des perceptions entraîne qu'il est impossible de constater la moindre identité réellement perçue entreles sensations, qui passent dans l'esprit, comme autant de personnages sur une scène de théâtre.

Le moi ne fait donc l'objet d'aucuneconscience ou sensation continue, et ne permet aucune certitude quant à son identité et sa simplicité.

L'unité de la personne est doncune fiction illusoire, qui provient d'une association des sensations à la faveur de laquelle on voit de l'identité là où il n'y a qu'uneressemblance (celui que je suis à un moment donné ressemble à celui que j'étais une seconde avant, mais ce n'est pas le même moi).

Hume montre donc que l'unité de la personne demeure problématique si l'on cherche à la démontrer.

Mais on débouche alors sur ladimension morale de la question, puisque si l'unité de la personne est illusoire, en quoi serions nous tenus de respecter la personnehumaine ? II.

L'unité de la personne repose en dernière instance sur une exigence morale.

Nous avons vu avec Hume qu'il est difficile de prétendre démontrer l'unité de la personne, car on ne peut la reconduire à aucun fondement dernier.

Mais dénier toute unité au moi, c'est le réduire au statut de chose intégralement soumise aux lois de la nature, cequi revient à nier sa liberté.

Or nier la liberté de l'homme, c'est nier sa responsabilité et par là même sa dimension d'être moral, alorsque cette dernière semble être un trait fondamental de l'humain.

La question est dès lors de savoir comment on peut préserver ladimension morale de l'homme, tout en reconnaissant que l'unité de sa personne fait problème.

Pour surmonter ce problème, Kantconsidère qu'il faut penser l'homme comme un être doué d'une double nature, nouménale et phénoménale.

Comme être phénoménal,l'homme n'échappe pas à la détermination qui régit toute chose.

Ses états de consciences se succèdent alors sans que l'on puissedémontrer qu'ils reposent sur un fondement solide qui en assure l'unité.

Mais comme être nouménal, l'homme est doué d'une libertétranscendantale, ce qui signifie qu'il est toujours libre de faire son devoir, et donc responsable de ses actes.

Dans la Critique de la raison pratique Kant précise que cette responsabilité est justement ce qui donne à la personne humaine une valeur (absolue), contrairement aux choses qui n'ont qu'un prix (relatif).

L'unité de la personne est donc une exigence morale, et ce qui la fonde est lesujet transcendantal, toujours libre de faire son devoir.

C'est donc sur la dimension morale de l'homme que repose en dernièreinstance l'unité de la personne. Conclusion L'unité de la personne semble pouvoir reposer sur un principe spirituel.

En effet les êtres humains ont la capacité de sereprésenter des vérités éternelles, grâce à la réflexivité de leur esprit, qui leur permet d'avoir conscience de la permanence de leurmoi à travers le temps.

Mais on est alors obligé de postuler une unité de l'esprit qu'il est pourtant impossible de démontrer, si bien quel'on serait tenté finalement de dénier toute unité à la personne, cette unité étant dépourvue de fondement.

Pourtant l'unité de lapersonne réapparaît comme exigence morale.

En effet si la personne était éparpillée en une diversité non rassemblée en une unité, ellene serait pas libre.

Or privée de liberté, elle serait privée de la valeur absolue attachée à tout être rationnel qui peut répondre de sesactes.

C'est donc sur une exigence morale que repose l'unité de la personne.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles