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La notion de vérité

Publié le 25/06/2004

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Les mots vrai « et vérité « nous sont si familiers que nous ne songeons guère, au cours d'une conversation, à demander qu'on nous les définisse : on possède la vérité quand ce que l'on pense est conforme à la réalité. Mais ces mots se présentent dans des contextes bien différents : nous dirons d'un jugement porté sur un de nos camarades qu'il est vrai, et non mensonger ou calomniateur ; mais nous parlons aussi d'un vrai Rubens ou de véritable champagne. On entend parfois par vérité la réalité même de l'objet dont on parle : cacher la vérité est synonyme de cacher la réalité ; c'est dans le même sens qu'on parle d'un témoignage conforme à la vérité. La vérité ainsi comprise se confond avec l'être lui-même — l'Être sans limite, Dieu, est aussi la souveraine Vérité — : on la désigne par le terme de « vérité ontologique «. Mais, le plus souvent, le terme de vrai qualifie nos idées sur les choses et non les choses elles-mêmes : la vérité est la qualité de nos pensées et de leur expression verbale. La vérité ainsi conçue est la « vérité logique «. C'est de cette dernière que nous allons traiter.

« signifie « j'ai froid », plutôt que « il fait froid » ; un autre, moins frileux, pourrait ne pas avoir froid.

Je puis aussi,étant passé devant un thermomètre, avoir remarqué combien il était bas.

Dans cette hypothèse, mon jugement a unfondement objectif : j'affirme vraiment qu'il fait froid et non que j'ai froid.Les choses avec lesquelles notre jugement devrait s'accorder pour être vrai pourraient donc être de deux sortes : ily aurait les objets extérieurs sur lesquels devraient se mouler les jugements que nous pouvons appeler objectifs ; ily aurait les représentations intérieures, auxquelles devraient se conformer les jugements que nous pourrions appelersubjectifs.Mais, pour la majorité des philosophes modernes, cette distinction est plus apparente que réelle, et de là découlentde nouvelles conceptions de la vérité qui contredisent la conception classique exposée jusqu'ici. II.

— QUELQUES CONCEPTIONS MODERNES Jamais, en effet — c'est un postulat admis presque universellement depuis Descartes — l'homme n'atteint l'objetextérieur.

N'est-il pas renfermé dans ses représentations, dans sa subjectivité ? Le thermomètre, par lequel je suisinformé de la température indépendamment des sensations provoquées par les excitations thermiques, ne m'estconnu lui-même que par d'autres sensations, des sensations visuelles.

La sensation n'est, ici comme là, qu'unemodification subjective que j'interprète comme l'effet d'une modification objective ou extérieure : l'extérieur lui-même ne m'est jamais donné.

La réalité à laquelle doit se conformer le jugement pour être vrai, ce n'est donc pas lachose en soi, puisque cette chose ne nous est jamais donnée et qu'elle n'existe peut-être pas : ce sont nosreprésentations.

On est ainsi amené à concevoir la vérité comme l'accord du jugement avec les représentations.C'est la conception de Kant.Mais les représentations varient d'un individu à l'autre.

Dès la perception, nous le savons, commencent à s'effectuerdes sélections inconscientes : dans le réel, chacun découpe ce qui l'intéresse, ce qui est utile ou utilisable pour lui ;le reste, il l'ignore, le tient pour irréel.

A cette donnée psychologique, il faut adapter la définition de la vérité.

C'estce qu'ont fait les pragmatistes, en particulier William James, pour qui est vrai ce qui peut servir à notre action :action physique par laquelle nous modifions la matière, mais aussi action morale par laquelle nous nous améliorons etdevenons plus hommes.Avec cette conception du vrai, il n'y a pas une vérité, mais des vérités : autant d'individus, autant d'intérêts divers,et, par suite, autant de vérités.

L'homme en restera-t-il à cette notion qui heurte le sens commun ? Il y resterait,répondent les partisans de l'école sociologique, suivis sur ce point par Goblot, s'il ne vivait pas en société.

Mais lavie collective l'oblige à tenir compte des pensées — ou des vérités — des autres.

De la vie en commun résulte unmode de penser collectif qui l'emporte sur le mode de penser individuel autant que le Dieu de la philosophie classiquel'emporte sur l'individu.

La vérité consistera dans la conformité du jugement avec la représentation collective :jugement collectif devient synonyme de jugement objectif, c'est-à-dire conforme à la réalité.Après cette rapide revue de quelques conceptions modernes de la vérité, que devons-nous conclure ? D'abord, il semble nécessaire de concevoir la vérité comme la conformité de la pensée avec l'objet.

Quelle que soitl'opinion professée sur la capacité qu'a l'esprit d'atteindre le réel, c'est toujours un réel qu'on a en vue.

Pour Kant,ce qui intéresse l'homme, ce n'est pas la représentation actuelle en elle-même, simple modification subjective, maisce qu'il y a en elle de représentatif, c'est-à-dire, en somme, d'objectif.

Si les pragmatistes identifient succès àvérité, c'est que l'idée vraie s'adapte au réel : c'est le réel qui est juge de la vérité de l'idée.

Enfin, prendre le termede collectif comme synonyme d'objectif, c'est corriger les unes par les autres les erreurs subjectives individuelles etadmettre la conception classique : la vérité consiste dans l'accord de la pensée avec la réalité.Mais cette réalité est-elle autre chose que nos représentations ? Les psychologues modernes sont loin d'êtreunanimes à admettre que seuls nos états intérieurs nous sont donnés immédiatement.

A beaucoup, il semble plusvrai de dire que tout acte de conscience est la conscience de quelque chose d'extérieur à la conscience.

Ainsil'introspection semble apporter une confirmation et donner un renouveau à la conception réaliste de la vérité :conformité de la pensée avec les choses.. »

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