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Qu'est-ce qu'une oeuvre d'art ?

Publié le 13/02/2004

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    On peut se demander si l'oeuvre d'art n'a pas aujourd'hui pour irrévocable destin d'être impossible, démantelée, anéantie dans un pseudo- savoir. On peut penser néanmoins que le concept d'oeuvre peut survivre à ces réflexions, comme la réalité de l'oeuvre survit à ces pratiques. Non qu'il faille faire machine arrière : l'oeuvre aujourd'hui n'est plus, ne peut plus être ce qu'elle a été ; les mutations de la pratique artistique évoquées précédemment sont irrécusables, et elles ont produit un changement tout aussi décisif du sens et de la fonction de l'art. Mais il n'est pas sûr pour autant que la philosophie doive proclamer la mort de l'oeuvre : reste l'opération, individuelle ou collective, et souvent le produit de cette opération, attestés par une expérience qu'il faut bien encore spécifier comme esthétique. L'oeuvre n'est pas nécessairement objet, comme la statue ou le monument. Ne peut-elle aussi être événement ? Au vrai, l'oeuvre a toujours été solidaire de l'événement : si elle s'accomplit comme objet esthétique, c'est dans l'événement de l'exécution, de la représentation, de la lecture, du regard ; sa vérité ne vient au jour que dans l'instant ou elle est jouée, où le sensible se recueille dans une conscience. Et c'est bien pourquoi il faut souhaiter et vouloir que l'art sorte des musées et investisse l'ambiance de la vie quotidienne. Mais si, dans l'épiphanie de l'oeuvre, l'avènement de l'objet esthétique est événement, peut-on dire que l'événement soit oeuvre ? Oui, dans la mesure où cet événement est opération, c'est-à-dire où ce qui advient - le feu d'artifice, la danse, tout ce qui est happening - suppose un ouvrier, l'exécutant lui-même, le spectateur qui est acteur, parfois un maître d'oeuvre.

•    Tenter de déterminer ce qu'est une oeuvre en construisant son x champ sémantique (notions voisines, opposées, etc.). •    Développer surtout l'analyse des différences et relations entre cette notion et le travail, la création, l'ouvrage. •    Ne pas limiter cette notion au seul domaine artistique (« on « parle de « mauvaise oeuvre «, de « chef-d'oeuvre «..., de « bonnes oeuvres «...). •    A partir de cette étude, ordonner la dissertation « autour« de quelques problèmes significatifs.

« Interrogeons-nous donc sur le caractère propre de l'oeuvre d'art.

Ce qui alors nous frappe en premier lieu, c'est quel'oeuvre d'art se donne à nous apparemment comme n'importe quelle autre chose.

« La toile est accrochée au murcomme un fusil de chasse ou un chapeau...

On expédie les oeuvres comme le charbon de la Ruhr ou les troncsd'arbre de la Forêt Noire...

Les quatuors de Beethoven s'accumulent dans les réserves des maisons d'éditions commeles pommes de terre dans la cave » (Chemins, p.

13).

Heidegger nous rappelle ainsi que l'oeuvre d'art est d'abord une chose.

Mais sans doute n'est-elle pas que cela.

Sans vouloir reprendre icil'ensemble du texte de Heidegger sur « l'origine de l'oeuvre d'art », nousreprendrons, de façon trop succincte, la distinction qui est faite dans cetexte entre la chose, le produit et l'oeuvre.

Alors que c'est la présencespontanée qui semble caractériser la chose, le produit se laisse plutôtcaractériser comme matière ouvragée.

En cela il a bien ,du rapport avecl'oeuvre, mais il n'est pourtant pas une oeuvre.

Dans le langage courant, onparle, par exemple des produits du commerce, ou même des produitsartisanaux mais on dit des oeuvres d'art.

C'est que l'oeuvre d'art réside peut-être dans cette impossibilité à séparer la forme de.

la matière, Or c'est cecouple forme-matière (ces deux notions de forme et de matière viennent,notons-le au passage, d'Aristote), qui constitue la caractéristique du produit; le produit serait la matière informée, ou, si l'on préfère, l'application d'uneforme à une matière.

Le produit occupe ainsi une position intermédiaire entrela simple chose, par exemple ce caillou sur le bord du chemin, et l'oeuvred'art, par exemple un tableau de Van Gogh.

Ce qu'il y a de commun, du moinsà première vue, entre la chose et l'oeuvre d'art, c'est que toutes les deuxcomportent une plénitude.

« L'oeuvre d'art, par cette présence se suffisant àelle-même qui est le propre de l'oeuvre, ressemble plutôt à la simple chosereposant pleinement en cette espèce de gratuité que la spontanéité de sonêtre lui confère » (Chemins p.

21).

Seulement on aperçoit ici que la plénitudede l'oeuvre d'art n'est pas celle de la chose.

Il nous faut tâcher de précisermaintenant en quoi consiste le caractère d'autosuffisance de l'oeuvre d'art.La plénitude du caillou signifie bien que le caillou se suffit à lui-même, qu'il n'y a aucun écart.

Mais cetteautosuffisance est parfaitement naturelle.

Dans l'oeuvre d'art au contraire, c'est le sensible qui est sens.

Que lesensible soit lui-même sens, ce qui veut dire que le tableau est ce qu'il nous montre ou que le poème ne nous ditque soi (1), voilà ,qui a fait souvent scandale pour la réflexion philosophique qui se déploie dans l'ordre du discours.C'est ici qu'il nous faut comprendre toute la différence qui sépare le langage de l'oeuvre d'art.

L'on a pu, d'un pointde vue linguistique, définir le langage, comme étant un système de signes.

Ce qui caractérise le signe linguistique,c'est l'écart entre le signifiant et le signifié.

Or dans l'oeuvre d'art, il n'y a aucun écart.

Alain disait que l'oeuvre d'artétait « signe absolu ».

En fait ce qu'il faut bien voir c'est que la présence de, l'oeuvre d'art, présence qui se suffit àelle-même, est sens, alors que notre langage est porteur de significations.

L'oeuvre d'art n'a pas de significations quilui seraient extérieures.

Mais comment peut-on essayer de préciser le rapport entre l'art et l'oeuvre d'art ?Si nous disons avec Hegel que l'art est la manifestation de l'Absolu à travers l'« écran du sensible », l'oeuvre d'art vaapparaître comme un sensible singulier.

Il y a ainsi chez Hegel, c'est un point qu'il faut souligner, une réhabilitationdu sensible.

Celui-ci n'est plus alors l'élément « morveux » où tout s'écoule, qu'il était aux yeux de Platon.

Lesensible devient un des modes d'apparaître de l'Esprit.

Mais l'art n'est cependant pas l'ultime manifestation del'Absolu, car le sensible précisément fait encore écran.

Ce n'est que dans la philosophie que l'Absolu se manifestesans écran ; contrairement à ce qui se passait non seulement pour l'art mais pour la religion qui était pourtant lavérité de l'art.

La philosophie « est la connaissance conceptuelle de l'Esprit absolu.

Par l'acte qui saisit cet espritsous la forme du concept, tout élément étranger est supprimé dans le savoir et ce dernier a atteint à la parfaiteégalité avec lui-même.

Il est le concept qui est son propre contenu et se conçoit lui-même » (Propédeutiquephilosophique, dernier paragraphe).

Avec la philosophie, c'est dans la transparence du concept que se manifestel'Absolu.

C'est peut-être cette notion d'absolu qui nous permet de mieux comprendre les rapports de l'artiste àl'oeuvre d'art.

Hegel nous montre en effet que l'artiste ne crée quelque chose que dans la mesure où il n'y va passeulement de sa subjectivité propre.

C'est que l'homme, s'il est en quelque sorte avec l'absolu, n'est pas l'absolu.

Cen'est pas au niveau de la subjectivité individuelle que Hegel pose le problème de la création d'une oeuvre d'art parl'artiste.

Mais il faut au contraire que l'homme prenne part à l'absolu, c'est-à-dire à quelque chose qui le dépasse,pour que l'on puisse vraiment parler de création.. »

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