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Oublier, est-ce la condition de la vie humaine ?

Publié le 13/03/2004

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De prime abord, l'éloge de l'oubli relève d'une sorte de paradoxe. Tournée vers ce qui l'a constituée, la vie humaine n'entretient-elle pas plutôt le culte de la mémoire ? Le souvenir des disparus la commémoration des grands événements, la remontée vers les premières émotions de l'enfance, la culture elle-même, conçue comme prise en charge d'un héritage : tout semble attester l'intime relation de la vie humaine à la mémoire. N'y a-t-il pas, cependant, un moment ou un point à partir duquel cette relation à la mémoire devient hantise, voire servitude ? Et le souvenir du passé, insensiblement transformé en obsession, ne risque-t-il pas de paralyser la vie elle-même, d'en figer le dynamisme ? Si la vie est dépassement, il lui faut se délivrer du passé ; mais il y a une difficulté à concevoir comme une condition d'affirmation ce qui semble mettre en cause la dimension constitutive de l'être. Oublier, est-ce la condition de la vie humaine ?

  • Introduction
  • I. La condition de la vie humaine est d'oublier, mais c'est aussi de tenter de vaincre l'oubli, de se souvenir

1. Oubli, temporalité, finitude, mémoire a. l'oubli, expérience négative b. oubli et finitude 2. Ambivalence du temps et mythes de la chute 3. La réminiscence ou l'impossible oubli 4. Paradoxe

  • II. L'homme, être de mémoire, être historique

1. La mémoire constitutive de l'histoire 2. Progrès scientifique et conscience de l'historicité 3. La rencontre des autres cultures 4. L'histoire, mémoire en acte et volonté de savoir

  • III. L'oubli : une condition de l'action

1. L'oubli : une condition de l'action 2. Refoulement, mémoire, oubli 3. L'oubli et la joie

  • Conclusion

« lire le sujet La « condition » de quelque chose, c'est à la fois son état, sa manière d'être, et l'état, la situation nécessaire à l'existence de cette chose.

Quand on demande si oublier est la condition de la vie humaine, il s'agitdonc de savoir en quoi l'oubli fait partie de l'existence humaine, et surtout en quoi il conditionne cette existence,voire en quoi il constitue la possibilité même de la vie humaine; en d'autres termes de savoir quel rôle l'oubli jouedans la vie de l'homme, s'il lui est ou non utile, et même s'il ne lui est pas nécessaire. Introduction 1.

Un constat.

Chose étrange et paradoxale que l'oubli ! D'une part, en effet, l'homme s'en plaint et s'efforce d'yremédier en inventant des arts de la mémoire et en dépensant des trésors d'ingéniosité technique pour trouver dessubstituts à sa mémoire : érection de monuments commémoratifs, invention de l'écriture, du phonographe, ducinéma, des mémoires magnétiques, etc.

D'autre part et dans le même temps, l'oubli est sans cesse réclamé,imploré, exigé ! On conseille, on veut, on promet d'oublier.2.

Le problème se pose donc de savoir quelle est la valeur de l'oubli, quel est son rôle ou sa fonction, si l'on pourraitvivre sans oublier, et de quelle manière, bref si oublier est la condition de la vie humaine. 1.

Bergson: l'oubli, condition de la vie active a) Distinguer deux mémoires Procédons tout d'abord à une analyse de l'oubli, et par conséquent à une analyse de la mémoire, dont il estindissociable.

Pour ce faire, reprenons les analyses classiques de Bergson.

Selon ce dernier, il convient de distinguerdeux sortes de mémoires, et par conséquent deux sortes d'oublis.

La mémoire-habitude : C'est une mémoire qui, fixée dans l'organisme, dans le corps, naît de la répétition d'un mêmeeffort, par décomposition et recomposition d'actions mentales en mécanismes moteurs (par exemple, lorsquej'apprends par cœur un poème en le répétant et en en scandant les vers).

L'oubli, dans ce cas est une déficiencede la mémoire : il est le moment où s'enraye le mécanisme de cette mémoire-habitude.

Cependant, cette mémoiren'est qu'une fausse mémoire.

La mémoire vraie, ou mémoire pure, qui « retient et aligne à la suite les uns des autres tous nos états au fur et àmesure qu'ils se produisent » (Matière et mémoire, p.

168).

Cette mémoire pure est « coextensive à la conscience »,la conscience ne pouvait à la limite qu'être conscience du passé, car la perception, « si instantanée soit-elle,consiste en une incalculable multitude d'éléments remémorés, et à vrai dire, toute perception est déjà mémoire.Nous ne percevons pratiquement que le passé, le présent pur étant l'insaisissable progrès du passé rongeant l'avenir» (id., p.

167). b) Conscience rêveuse et conscience attentive Ainsi, selon Bergson, la conscience étant mémoire, notre passé nous accompagne intégralement et « se penchesur le présent ».

Dans ces conditions, le problème n'est plus d'expliquer la conservation du passé, mais au contraired'expliquer l'oubli.

Car si la conscience est mémoire, si le passé se conserve automatiquement en nous, pourquoin'avons-nous pas toujours conscience de ce dernier, pourquoi l'oublions-nous ? Pour répondre, il faut considérer qu'ily a deux sortes de conscience, ou plutôt que la conscience possède deux états ou deux niveaux.

On doit en effetdistinguer la « conscience rêveuse » et la « conscience attentive ».

La conscience rêveuse se détache du réel, s'en désintéresse, tend vers une « perte de conscience », au point deconduire au sommeil.

Elle évolue dans la durée et ne se ferme donc pas au passé.

« Un être humain, remarqueBergson, qui rêverait son existence au lieu de la vivre tiendrait sans doute ainsi sous son regard, à tout moment, lamultitude infinie des détails de son histoire passée » (id., p.

172).

La conscience attentive, en revanche, est la conscience de l'action ; elle se tourne vers le réel, adhère à la «situation présente » en vue de réaliser une tâche, une « action qui se prépare ».

C'est cette conscience attentivequi « ferme la porte au passé », ou, en un autre sens, crée le passé.

Car le « passé » est « ceffe partie de notrehistoire qui n'intéresse pas notre action présente » (La pensée et le mouvant, p.

193).

Elle refoule donc le passédans « l'inconscient » (qui est ainsi une sorte de mémoire inutile, mais toujours susceptible d'apparaître dans un étatconscient, et qu'il convient de ne pas confondre avec l'inconscient au sens freudien) pour n'en conserver « que cequi est de nature à éclairer la situation présente, à donner un travail utile» (L'évolution créatrice, p.

5). c) Nécessité de l'oubli pour agir L'oubli apparaît ainsi comme une condition de l'action, car si l'homme avait constamment présent tout son passé, il. »

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