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Par quels critères peut-on distinguer une oeuvre d'art d'un objet quelconque ?

Publié le 21/01/2004

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Au contraire un objet d'art serait fabriqué avec attention, de manière soigneuse, en petite série ou même à exemplaire unique, il serait le résultat d'un travail créatif et original, et il aurait pour qualité d'avoir une certaine beauté, et de ressortir avec éclat des autres objets de la vie quotidienne. Mais à l'heure du design, de l'art contemporain, il devient difficile de distinguer ces deux types d'objets. Un objet issu d'un grand designer peut être produit en grande série, une oeuvre d'art peut être reproduite avec minutie. Cette distinction a-t-elle encore lieu d'être ? 1) Les procédés de l'art et sa beauté.   On reconnaîtra l'art du reste des objets par les procédés qui ont été mis en place pour réaliser cet objet. Il y a aura une création à l'origine de cet objet, une intention artistique visant à créer une émotion. L'objet artistique sera bien souvent en dehors du circuit d'utilité des objets ordinaires. On reconnaîtra une certaine facture, un savoir-faire, une certaine patine que ne possèdent pas les objets ordinaires. L'art a une visée plus haute que la simple satisfaction des désirs, il a un but qui intéresse l'esprit.

« L'art, en tant qu'expression subjective d'un individu, d'une époque, est souvent opposé au monde des objetsutilitaires, quotidiens : les objets « quelconques ».

Il est intéressant de considérer cette alternative en confrontantl'objet quelconque à l'oeuvre d'art concrète, qui elle aussi est un « objet », plutôt qu'à l'art en général.L'oeuvre est donc objet, de par son individualité, sa matérialité : elle s'adresse directement, immédiatement à nossens.

Le « donné sensible » caractérise l'objet d'art et l'objet quelconque.

Mais au-delà de cette caractéristiquecommune nous pressentons un certain nombre de critères qui permettent de distinguer l'oeuvre d'art de l'objetquelconque; quels sont ces critères? Le terme « objet quelconque » est d'ailleurs très vague.

Il peut en effet s'agir d'un objet de la nature : le typed'objet que l'homme rencontre nécessairement, qu'il n'a ni inventé, ni fabriqué.

Ici la différence est évidente : lecritère qui distingue l'oeuvre de ce type d'objet est l'homme lui-même, ou du moins la création humaine.

L'art,phénomène de culture, fait nécessairement intervenir la main de l'homme.

A cette lumière nous comprenons pourquoiune oeuvre d'art n'imite pas la nature mais la transcrit.Mais le terme « objet » évoque plus directement la notion de produit humain, d'objet fabriqué, c'est-à-dire résultantd'une technique.

Nous retrouvons la notion d'art, en grec : techné; l'origine de la démarche artistique est doncconfondue avec l'artisanat, puisque le mot art est confondu avec le terme de technique; l'oeuvre d'art c'est, enGrèce archaïque, tout simplement le travail bien fait, la fabrication exécutée par une main habile ou savante.La distinction qui va s'opérer sera donc historique.

Un certain nombre d'objets, en devenant utiles, vont perdretoute valeur d'expression, puis de création, puisque la division du travail et la mécanisation produiront finalementdes séries d'objets définitivement et strictement fonctionnels.Dans ce contexte, le premier critère qui peut venir à l'esprit pour distinguer l'oeuvre de l'objet quelconque, est lecritère de beauté : c'est le critère le plus généralement reconnu, apparemment satisfaisant.

L'oeuvre d'art est belle,admirable : cela serait une fin en soi.

L'objet, lui, est fonctionnel, utile...

laid? C'est dans cette opposition que noussentons une hésitation.

Le problème actuel de l'esthétique industrielle se pose.

Que font véritablement ces hommesqui s'efforcent de concevoir des objets, destinés à être industrialisés, de façon esthétique? Que sont exactementces modèles « fonctionnels », automobiles, appareils électroménagers, stylos, conçus pour être « beaux »?L'esthétique industrielle est-elle la forme moderne de l'art? Elle a la qualité de lutter contre une conceptionméprisante des objets quotidiens.

Mais il est impossible de considérer cette tendance comme une expressionartistique à part entière, dans la mesure où seul le modèle premier sort des mains d'un homme, en tant qu'oeuvre.Les milliers d'objets standardisés et diffusés prennent une forme commune : une fonction.

On pourrait donc conclureque la beauté d'un objet ne suffit pas à en faire une oeuvre d'art, en insistant sur l'importance de la créationhumaine.D'autre part nous pouvons examiner le critère du côté du spectateur; c'est lui qui capte la beauté d'une oeuvre, elleest tournée vers lui.

Il reçoit et éprouve cette beauté sur le mode du plaisir des sens.

Son expérience sensible estliée à l'émotion.

Mais le sensible immédiat n'est pas la seule composante de notre expérience : celle-ci estindéniablement constituée de notre jugement.

Nous n'apprécions pas seulement une oeuvre à la surface de nos sens: nous la comprenons, nous la réfléchissons.Il faut donc dépasser le critère du beau et examiner ce lien qui apparaît entre le créateur et le spectateur la main etl'oeil, en matière de peinture par exemple.Il s'agirait donc d'un critère de communication.

L'oeuvre d'art n'est pas seulement une émotion, pas seulementl'expression du désir.

Son indispensable matérialité, la cohérence du matériau et de la technique en font une réelleexpression.

Nous pourrions définir ce critère comme transcription d'une réalité : de la réalité à laquelle l'artiste setrouve confronté.Le peintre Paul Klee, dans sa Théorie de l'Art moderne, explique cette transcription du monde par un schéma,représentant le peintre et son objet « à peindre » sur une terre : parallèlement à la voie optique d'émotion, il tracedeux autres voies, flèches non optiques de participation cosmique et d'enracinement terrestre commun.

C'est biensouligner une conception de l'oeuvre comme expression du monde tel que Klee le ressent.Cette transcription, Marcel Proust la signale difficile, ardente, mouvementée.

Il nous décrit une promenade dans unbois, et son émotion terrible : ébloui de beauté, il est incapable de décrire, il ne peut que transcrire, exprimer sonémotion, rentrer dans « son » langage : ses premiers mots, des cris spontanés, sont « zut, zut, zut »; c'estseulement après qu'il pourraparler.Nous aboutissons donc à un terme plus précis que le mot communication : il s'agit d'un véritable langage, le critèrequi distingue l'oeuvre de l'objet est donc un critère de signification.Si l'on admet cette idée de langage, on conçoit l'objet quelconque comme un signe, un code clair, totalementévident, et dont le système de fonctionnement est l'utilité.

L'oeuvre d'art est plus qu'un signe : elle est symbole,c'est-à-dire que son apparence appelle « autre chose », dont le sens, touffu, dense, non immédiat, tend àtranscrire une subjectivité, à signifier un monde.

monde.A l'issue de ces premières distinctions, nous pourrions donc dire que l'objet quelconque est fabriqué et utilisé, alorsque l'oeuvre d'art est créée et comprise.Dans une telle optique, il faut examiner cette matérialité « commune » qui a fait l'objet de nos premières remarques.L'objet quelconque existe complètement par sa matérialité, dans la mesure où celle-ci détermine une forme ou unefonction.

Il faut bien préciser forme ou fonction, car si « objet quelconque » nous fait penser immédiatement à «objet utilitaire » (tables, chaises, casseroles, etc.), un certain nombre d'objets répondent également à des critèresd'expression, représentant l'esquisse d'une démarche artistique : le vêtement illustre ce type d'objet.Mais, toujours, la matérialité concrète, immédiate, nécessaire de l'objet suffit totalement à déterminer tous sescaractères, à déterminer l'objet dans son existence totale, le plus souvent sa fonction.. »

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