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Parler, est-ce trahir sa pensée ?

Publié le 06/02/2004

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Chaque jour, nous baignons dans le langage : nous parlons et nous écoutons, nous émettons et nous recevons de nombreux messages. La même personne se trouve alternativement dans le rôle du locuteur (celui qui parle) et de l'auditeur, et il lui arrive, d'autant plus peut-être qu'elle a parfois du mal à comprendre ce qu'on voulait lui dire, d'avoir l'impression qu'elle ne parvient pas correctement à formuler sa pensée pour la transmettre. Elle peut alors être tentée d'admettre que parler ne fait que trahir sa pensée, ce qui implique que cette dernière serait antérieure à son recours au langage, mais aussi qu'elle comporterait une part d'ineffable. Cette « trahison « est-elle réelle ? ou n'est-elle qu'une illusion ?  

  • [I. Coprésence de la pensée et du langage]
  • [II. Dérives de la pensée dans le langage]
  • [III. Concept et métaphore]

 

« la pensée, du non-être à l'être prend donc évidemment, comme on l'a vu, un sens particulièrement aigu enlittérature et spécialement en poésie.

Si le passage par la parole marque la vraie naissance de la pensée, c'est qu'ilfaut concevoir le langage comme quelque chose de plus haut qu'un simple instrument.

Ce qui se conçoit bien nes'énonce clairement, pour paraphraser Boileau , que dans la mesure où l'énonciation claire est elle aussi à son tour la condition de la bonne conception. [C.

Il n'y a pas de résidu intransmissible dans la pensée]Dans la seconde acception, l'ineffable renverrait à une part secrète de la pensée, à un noyau impossible àtransmettre.

Il y a là encore une illusion : c'est par manque de langage (de vocabulaire) que nous ne savons pasformuler, mais ce qui n'est pas formulé n'existe pas comme objet ou forme de pensée. « C'est dans le mot que nous pensons.

Nous n'avons conscience de nos pensées, nous n'avons de penséesdéterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les différencions de notreintériorité […].

C'est le son articulé, le mot, qui seul nous offre une existence où l'externe et l'interne sontintimement unis.

Par conséquent, vouloir penser sans les mots est une tentative insensée.

On croit ordinairement,il est vrai, que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable.

Mais c'est là une opinion superficielle et sans fondement ;car en réalité, l'ineffable, c'est la pensée obscure, la pensée à l'état de fermentation, et qui ne devient claire quelorsqu'elle trouve le mot.

Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et plus vraie.

» Hegel, in « Philosophie de l'esprit ». Hegel engage sa réflexion sur la possibilité de la synthèse entre l'aspect subjectif et l'aspect objectif de la conscience.

Le langage est un moyen terme entre ces deux aspects, ce par quoi la conscience obtient l'existence. Le langage permet à l'homme de concevoir la nature.

Et on ne peut la concevoir sans lui, quel que soit l'envie qu'onen a.

De même, il n'est pas possible d'exprimer la conscience autrement que par le recours au langage, quelle quesoit la prétention de l'ineffable. Hegel lie le mot et la pensée : 1.

Penser par le mot, c'est lier intériorité et extériorité. 2.

Il est impossible de penser sans les mots. 3.

Le langage clarifie la pensée. D'emblée, la thèse de Hegel est affirmée clairement, en une phrase lapidaire : « C'est dans le mot que nous pensons. » L'ensemble du texte vise à l'analyse des deux termes : la pensée, le mot, et à leur articulation.

D'où formellementdeux possibilités : penser avec les mots (penser « dans le mot ») ; penser sans les mots (c'est la tentation de l'ineffable).

Cette seconde tentative est écartée, par Hegel , comme une erreur.

Ainsi, seule, la première possibilité demeure, d'où l'affirmation renouvelée, sous une autre forme, de la thèse : « le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie. » 1.

La thèse est examinée en chacun de ses éléments.

D'abord la pensée.

Penser c'est avoir conscience depenser, ce qui implique un dédoublement.

Si naïvement toute pensée, en tant que personnelle (« nos pensées »), est crue de l'ordre de notre intériorité (et strictement seulement de cet ordre), philosophiquement, elle est aussi de l'ordre de l'extériorité (et donc différenciée de l'intériorité).

Penser est une activité (« donner »à nos pensées) qui assure le passage d'un ordre à un autre, où l'on passe en même temps de l'abstrait(« penser » dans le vague en général) au concret, de la subjectivité à l'objectivité (des pensées « déterminées », cad qui sont celles-ci ou celles-là).

Enfin, avec une réflexion particulière qui doit être consacrée à l'idée de forme (la « forme » objective) qui, en tant que forme, assure une universalité de la pensée applicable dans la diversité et la multiplicité des situations – s'opposant implicitement à un plein qui ne peut seréférer qu'à l'unique particularité du contenu de ce qui est ici et maintenant.

Forme claire opposée à l'obscur duplein. En suite le mot.

Si pour la pensée, il convenait de distinguer intériorité et extériorité, il faut reconnaître au mot (défini au passage comme « son articulé ») le statut concret (« l'existence ») d'une synthèse de l'intériorité (« l'interne ») et de l'extériorité (« l'externe »).

D'un rapport privilégié du mot et de la conscience, puisque c'est le mot qui est le seul à pouvoir à chaque fois unir (intimement) les deux positions de la pensée. La pensée n'est ni l'intériorité seule (l'intériorité est insuffisante il en faut plus) ni l'extériorité seule (il n'y a d'extériorité que seconde, puisqu'elle est le produit, le résultat d'une activité qui prend naissance dans l'intériorité).Mais seul le mot articule en même temps, à la fois, l'intériorité (c'est moi, je, qui parle) et l'extériorité (la « forme » du langage me permet de dire l'universel). 2.

Penser, cad tenir à la fois l'intériorité et l'extériorité, n'est possible qu'avec les mots.

D'où logiquement(« par conséquent ») la réfutation d'une thèse, qui pourtant a cours, et selon laquelle, croit-on, il serait possible de « penser sans les mots ».. »

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