La pensée de la mort est-elle un obstacle au bien vivre ?
Publié le 06/10/2005
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Comment parler d'une pensée de la mort? Que puis-je me représenter de la mort, puisque précisément je ne le suis pas? Je ne puis penser ce terme de mon existence que comme quelque chose d'irréversible, d'inéluctable. Il s'agit là de quelque chose qu'on sait (ça arrive quoi qu'il en soit) mais qu'on ne connaît pas (qu'est-ce qui s'y passe, je n'en sais rien). Du point de vue de la forme, je peux dire que la mort c'est la cessation de la vie entendue au sens biologique (peut-être m'aventurerai-je à en décrire les détails physiologiques), mais après? Je n'expérimente jamais la mort en première personne, ou du moins, rien ne perdure hic et nunc pour en narrer l'aventure. Tout ce que je vois de la mort, c'est celle de l'autre: j'en forge une pensée impersonnelle, une pensée en troisième personne. Et cette pensée semble se borner à décrire l'aspect matériel du phénomène, et non l'expérience subjective sur laquelle fantasme l'humanité tout entière. En quoi cette pensée creuse peut-elle influencer la qualité de mon existence? Selon la manière dont j'envisage ce qu'est ma vie, ce que doit être ma vie, de toute évidence, sa fin n'aura pas le même sens, selon que je la pense précieuse, ou sans valeur. Tant et si bien que le sens de la mort dépend de celui de la vie, et inversement. Pensée de la mort, pensée de la vie: les deux sont liées,si l'on définit la mort comme terme de la vie. Mais si l'on en vient à penser la mort plus en avant, à la définir autrement que négativement (comme ce qui n'est pas vivant), qu'advient-il?
«
vie que je mène est une vie qui vaut le coût, je dois imaginer si je souhaiterai la vivre encore et encore, et ce àl'infini: l'affirmer en somme un nombre infini de fois.
Ce n'est pas le terme de l'existence qui lui donne un sens, etencore moins les fictions compensatrices que l'homme s'invente, cet après utopique: la pensée de la mort est le pire des obstacles à une belle vie, parce qu'en plus de nous en détourner, elle la déprécie aux noms d'ailleurs plusensoleillé.
Les otages d'Horace III.
Que penser au juste du Carpe Diem ( Vis l'instant présent ) d'Horace? Peut-on vivre en pensant sans cesse à la mort, comme un spectre qui hante chacun de nos gestes et lui conjure d'avoir un sens bien défini? Ils semblent quenous serions alors des otages perpétuels d'une pensée qui menace de nous reprendre la vie, vivant alors immergésdans le présent, attachés au piquet de l'instant, et faisant nos choix dans l'urgence.
La vie d'Horace est une vieprécipitée.
Sans compter cette peur, pis cette angoisse dans laquelle elle nous plonge à chaque instant de part cette épée deDamoclès qui nous menace.
En effet, si la peur a un objet (je sais de quoi j'ai peur, l'étant qui suscite cet affect estlà dans une région déterminée), lorsque j'angoisse, c'est l'inconnu qui provoque cet affect: aucun étant présentprès de moi ne suscite cela.
En ce sens, la mort m'angoisse, parce que je ne sais pas ce qui m'attends auprès d'elle.Le Carpe Diem recréer cette angoisse à chaque instant.
Tant et si bien qu'en demandant à la mort de donner un sens à la vie, nous ne pensons plus guère à la vie.
Noussommes pénétrés de part en part par cette pensée morbide, nous ne pensons plus à la vie, ne vivons d'ailleurs plus,mais sommes obséder par cette menace.
Tous sauf libre, nous nous recroquevillons dans une seule dimensions dutemps, une cage dans laquelle nous vivons effrayé par le moindre craquement de branche.
C'est refuser le fait quel'homme est toujours pro-jeté en avant de soi, que son être ne lui est pas donné d'avance: il a à être, il est sanscesse en avant de soi affairé dans le monde, occupé à exister.
L'existence, c'est toujours ce mouvement danslequel je me projette en avant, j'opte pour certains possibles, soucieux de constituer ce que je suis.
La réalitéhumaine n'est pas statique mais dynamique, sans cesse inquiète pourrions nous dire de son avenir.
Conclusion
Si la mort est une réalité, on ne peut en faire l'étalon mesure à l'aune du quel se juge la qualité de ma vie.
Vient deplus le risque que, devant cette pensée du vide, nous soyons tenter de tisser un fantasme plaisant qui dispense devivre ici et maintenant.
On ne doit pas penser la mort pour refuser au fond d'accepter la vie sous toutes sesfacettes: la mort ne doit ni être cet opiacé à partir du quel mon imagination tisse ses contes, ni l'électrochoc qui memenace de vivre sous peine de mourir.
La mort est une réalité, mais nous n'y songeons que trop lorsque c'est la viequi nous pose en fait problème..
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