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PEUT-IL Y AVOIR UN MAUVAIS USAGE DE LA RAISON ?

Publié le 15/03/2004

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L'imagination, le mythe ■ La raison voit dans l'imagination, selon le mot de Malebranche, « la folle du logis » ; elle condamne également la pensée mythique comme primitive et prélogique. ■ Ainsi, en refusant de prendre en considération tout ce qui lui est étranger, la raison se fait totalitaire, et construit des mondes où elle règne seule. Mais ces mondes sont des univers clos, plaqués sur le réel qu'ils veulent masquer, mondes sans vie ou allant contre la vie : tel est un des reproches majeurs qu'on a pu faire aux utopies politiques en tant qu'hyperrationalisations du monde humain, destructrices de toute déviance, originalité, spontanéité, liberté. Par ailleurs, exclure ne signifie pas supprimer : ce que condamne la raison demeure, et souvent se retourne contre elle. Dans sa critique du rationalisme classique, Freud a montré que ses désirs et passions sont essentiels à l'homme, mais qu'ils s'opposent au principe de nécessité (au travail) qui gouverne le progrès de la civilisation. C'est pourquoi la raison, comme intériorisation du principe de nécessité, doit refouler les désirs inadéquats à la vie sociale, notamment les pulsions d'agressivité. La raison est ainsi instance de refoulement. Or le refoulement n'est nullement la suppression des désirs, et la conscience est toujours menacée par un retour du refoulé, menant à la névrose ou à la psychose. La raison, comme agent de refoulement, peut donc provoquer par son exercice même des désordres aux manifestations plus violentes encore que celles qu'elle se proposait initialement de maîtriser. 3.

Il est d’usage de considérer la raison, c'est-à-dire la faculté de juger, de discerner le vrai du faux, comme n’étant pas infaillible, en attestent nos éparses fautes de raisonnement. Il semblerait alors, à première vue, qu’indépendamment même de son dessein, l’Homme fasse parfois mauvais usage de la raison, pourtant propre à sa pensée. En effet, bien que la raison soit une des caractéristiques fondamentales de l’intellect humain, n’est-elle pas trop souvent précipitée et forcée dans les chemins hasardeux de la pensée ? Si l’Homme est bien un animal raisonnable, n’en demeure-t-il pas moins qu’il doit apprendre à utiliser ce qui lui est inhérent, et se réapproprier la raison comme outil d’intellection sûr ? Un mauvais usage de la raison est donc envisageable, à moins d’établir certaines règles pour diriger et construire la rationalité humaine. De fait, s’il peut y avoir ordre et méthode, la raison peut trouver sa justesse, et son usage en devient alors tout à fait contrôlé. Quelles seraient alors les règles nécessaires à l’épanouissement correct de la rationalité humaine ? Enfin, si appuyée par ces règles, elle est cohérente et que l’Homme s’en sert bien, ne peut-il pas y avoir quand même un mauvais usage de la raison ? Qu’en est-il des fonctions de la raison ? C’est donc d’un enjeu éthique et moral qu’il s’agit ici, en tant que la raison ne vise pas forcément ce qui est bon. Finalement, la question est de savoir si, indépendamment de la façon dont on utilise la raison, celle-ci n’est pas parfois un prétexte pour s’affranchir d’un souci de moralité.

« problème de la Vérité dans la philosophie de Nietzsche, p.

66 et 81). B.

Une raison totalitaire et dangereuse Parce qu'elle es normative, la raison est aussi exclusive : elle rejette tout ce qui n'est pas elle comme faux,mauvais, sans valeur.

Prenons quelques exemples :Le désir et les passions La raison proclame qu'il convient de réprimer, d'annihiler les passions, ou du moins de les soumettre à son contrôle: elle pose que les passions ne sont que «maladies de l'âme», désordres et déchéance.

De même, elle appelle à lasuppression du désir, lequel précisément ne se satisfait jamais de l'être, de ce qui est, mais est continuellementrongé par l'appel de l'Autrement, de ce qui n'est pas.L'enfant, le fou Surtout tant qu'il ne parle pas, et donc qu'il ne raisonne pas, l'enfant est rejeté dans un monde inférieur,intermédiaire entre l'animalité et l'humanité, que la raison a longtemps considéré comme peu digne d'intérêt.Semblablement la raison repousse le fou et le met à l'écart de la société : M.

Foucault dans son Histoire de la Folie,a montré que le « grand renfermement » des malades mentaux dans des asiles est contemporain du rationalismecartésien.L'imagination, le mythe La raison voit dans l'imagination, selon le mot de Malebranche, « la folle du logis » ; elle condamne également lapensée mythique comme primitive et prélogique.

Ainsi, en refusant de prendre en considération tout ce qui lui est étranger, la raison se fait totalitaire, et construitdes mondes où elle règne seule.

Mais ces mondes sont des univers clos, plaqués sur le réel qu'ils veulent masquer,mondes sans vie ou allant contre la vie : tel est un des reproches majeurs qu'on a pu faire aux utopies politiques entant qu'hyperrationalisations du monde humain, destructrices de toute déviance, originalité, spontanéité, liberté.Par ailleurs, exclure ne signifie pas supprimer : ce que condamne la raison demeure, et souvent se retourne contreelle.

Dans sa critique du rationalisme classique, Freud a montré que ses désirs et passions sont essentiels à l'homme,mais qu'ils s'opposent au principe de nécessité (au travail) qui gouverne le progrès de la civilisation.

C'est pourquoila raison, comme intériorisation du principe de nécessité, doit refouler les désirs inadéquats à la vie sociale,notamment les pulsions d'agressivité.

La raison est ainsi instance de refoulement.

Or le refoulement n'est nullementla suppression des désirs, et la conscience est toujours menacée par un retour du refoulé, menant à la névrose ou àla psychose.

La raison, comme agent de refoulement, peut donc provoquer par son exercice même des désordresaux manifestations plus violentes encore que celles qu'elle se proposait initialement de maîtriser. 3.

RÉHABILITATION DE LA RAISON. A.

La raison critique d'elle-même Toutes les critiques qui ont été formulées contre la raison ne sont pas sans fondement.

Mais il faut remarquerqu'elles ont toutes été émises par des esprits qui raisonnaient sur la raison.

A travers elles, c'est donc d'unecertaine manière la raison qui se juge et se critique elle-même.

Ceci suffit à montrer que l'impérialisme et letotalitarisme de la raison ne sont peut-être pas aussi rigoureux qu'on voudrait le croire.

C'est qu'en réalité il fautdistinguer la raison des formes qu'elle revêt à chacun des stades de son développement. B.

Raison constituante et raison constituée Comme l'a montré A.

Lalande, il ne faut en effet pas confondre la « raison constituée », c'est-à-dire telle qu'elle secristallise à une époque donnée « dans un code public de règles constituées et de vérités reconnues », et la «raison constituante », c'est-à-dire la raison en tant que « tendance active, personnelle, inventive », puissancedynamique toujours en évolution et développement.

C'est la « raison constituée » qui tend à être totalitaire, c'est la« raison constituante » qui sans cesse remet en cause la « raison constituée ».

Ainsi ce qui peut apparaître commeirrationnel à une époque donnée pourra être intégré dans la rationalité à une autre. CONCLUSION. S'il peut y avoir de mauvais usages de la raison, ceux-ci paraissent surtout dus à des états constitués,historiquement situés et dépassables, de la raison, non à la raison en soi qui dénonce elle-même les limites et les erreurs de ces états.. »

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