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Peut-on se dégager des illusions de la conscience ?

Publié le 03/04/2005

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conscience
3.2 La méfiance vis-à-vis de la conscience permet de la juger plus rigoureusement et d'en faire un meilleur usage. « Nous avons toujours des objets qui frappent nos yeux ou nos oreilles, et par conséquent l'âme en est touchée aussi, sans que nous y prenions garde, parce que notre attention est bandée à d'autres objets, jusqu'à ce que l'objet devienne assez fort pour l'attirer à soi en redoublant son action ou par quelque autre raison ; c'était comme un sommeil particulier à l'égard de cet objet-là, et ce sommeil devient général lorsque notre attention cesse à l'égard de tous les objets ensemble [...] Toutes les impressions ont leur effet, mais tous les effets ne sont pas toujours notables; quand je me tourne d'un côté plutôt que d'un autre, c'est bien souvent par un enchaînement de petites impressions, dont je ne m'aperçois pas, et qui rendent un mouvement un peu plus malaisé que l'autre. Toutes nos actions indélibérées sont des résultats d'un concours de petites perceptions, et même nos coutumes et passions, qui ont tant d'influence dans nos délibérations, en viennent : car ces habitudes naissent peu à peu, et par conséquent sans les petites perceptions on ne viendrait point à ces dispositions notables [...] En un mot, c'est une grande source d'erreurs de croire qu'il n'y a aucune perception dans l'âme que celles dont elle s'aperçoit. » LEIBNIZ, Nouveaux essais, II 1. CONCLUSION A la question « Peut-on se dégager des illusions de la conscience ? » la réponse est affirmative mais nécessite de la part de l'individu un regard critique sur lui-même et la prise en compte de la validité d'un regard extérieur. La remise en cause du pouvoir de la conscience ne consiste qu'à délimiter son domaine d'action en laissant la porte ouverte à l'inconscient.

Un individu victime de l’illusion croit vrai ce qui ne l’est pas, par exemple il croit le bâton brisé dans l’eau alors que c’est le phénomène de la réfraction qui fait que nous le voyons brisé. Le jugement permet de corriger notre erreur. Mais il s’agit alors d’une illusion de la perception et non d’une illusion de la conscience, autrement dit dans le cas de l’illusion de la perception l’individu peut de lui-même sortir de l’illusion, ce n’est pas le cas pour l’illusion de la conscience. Prenons l’exemple de l’individu qui, dominé par ses désirs, fera tout son possible pour les assouvir et continuera à penser qu’il est libre d’agir. Il aura l’illusion d’une liberté. Or comment peut-il s’en rendre compte, comment l’individu peut-il s’affranchir de ses illusions s’il ne peut le faire par lui-même ? Si nous pouvons nous dégager des illusions de la conscience nous ne pouvons le faire que par l’intermédiaire d’un juge extérieur. Mais plusieurs obstacles se dressent alors contre cette solution. En effet nous avons plus confiance en notre conscience qu’en celle d’autrui. D’autre part une conscience peut-elle juger correctement une autre conscience ? Enfin l’intériorité de la conscience pose le problème de son jugement, autrui ne pouvant avoir accès à ma conscience. La possibilité de s’affranchir des illusions de notre conscience suppose que nous admettions les limites de notre propre conscience et que nous accordions notre confiance à un juge extérieur (autrui, la société…). L’individu prisonnier d’une idéologie peut par exemple s’en libérer par sa famille, elle s’efforce de lui montrer qu’il est dans l’erreur et que la croyance en cette idéologie, loin de lui être bénéfique, lui est nuisible. Mais la remise en cause du pouvoir la conscience, autrement dit la mise en évidence de ses faiblesses, peut avoir pour conséquence le scepticisme. L’individu constatant les insuffisances de sa conscience perd tout espoir d’accéder à la connaissance et préfère suspendre son jugement. Il faut donc trouver une solution qui permette à l’individu de s’affranchir des illusions de sa conscience tout en évitant l’impasse du scepticisme.

conscience

« 2.1 La mise à distance de notre conscience, qui semble nécessaire pour déceler ses illusions, s'avère impossible.

Nous ne pouvons mettre en doute de nous-même les produits de notre conscience. « Si le mythe, le rêve, l'illusion doivent pouvoir être possibles, l'apparence et le réel doivent demeurer ambigus dans le sujet comme dans l'objet .

On a souvent dit que par définition la conscience n'admet pas la séparation de l'apparence et de la réalité , et on l'entendait en ce sens que, dans la connaissance de nous-même, l'apparence serait réalité : si je pense voir ou sentir, je vois ou je sens à n'en pasdouter, quoi qu'il en soit de l'objet extérieur.

Ici la réalité apparaît tout entière, être réel et apparaître ne font qu'un,il n'y a pas d'autre réalité que l'apparition [...] La transparence de la conscience entraîne l'immanence et l'absolue certitude de l'objet.

Cependant c'est bien le propre de l'illusion de ne pas se donner comme illusion , et il faut ici que je puisse, sinon percevoir un objet irréel, du moins perdre de vue son irréalité ; il faut qu'il y ait au moins inconscience de l'imperception, quel'illusion ne soit pas ce qu'elle paraît être et que pour une fois la réalité d'un acte de conscience soit au-delà del'apparence.

Allons nous dans le sujet couper l'apparence de la réalité ? Mais la rupture une fois faite estirréparable : la plus claire apparence peut désormais être trompeuse et c'est cette fois le phénomène de la vérité qui devient impossible .

» MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception. 2.2 La solution, qui consiste à mettre en doute les produits de la conscience, mène au scepticisme. « Le scepticisme inauguré par Protagoras et Gorgias met en question l'épistémè, c'est-à-dire la connaissance scientifique de l'étant en-soi, et la nie ; mais que ce scepticisme antique ne va plus loin qu'un tel agnosticisme qu'ilne dépasse pas la négation des substructions rationnelles d'une philosophie qui croit avoir atteint et pouvoiratteindre, avec les prétendues vérités-en-soi qui sont les siennes, un En-soi rationnel.

Selon le scepticisme, « le » monde serait inconnaissable rationnellement et la connaissance humaine ne pourrait dépasser lesapparences subjectives-relatives .

» HUSSERL, La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale. Transition : Devant l'impasse du scepticisme nous devons trouver une solution qui permette de sauvegarder le regard critique sur notre conscience tout en évitant le scepticisme. Troisième partie : L'inconscient seconde la conscience et permet d'en faire un usage plus rigoureux. 3.1 L'inconscient compense l'insuffisance de la conscience. « On nous conteste de tous côtés le droit d'admettre un psychisme inconscient et de travailler scientifiquement à cette hypothèse.

Nous pouvons répondre à cela que l'hypothèse de l'inconscient est nécessaire et légitime, et que nous possédons des multiples preuves de l'existence de l'inconscient.

Elleest nécessaire, parce que les données de la conscience sont, à un haut degré, lacunaires ; aussi bien chez les gens sains que chez les malades, se produisent fréquemment des actes psychiques qui, pour leur explication,présupposent d'autres actes que toutefois la conscience n'atteste pas.

De tels actes ne sont pas seulement lesactions manquées et les rêves chez les gens sains, tout ce qu'on appelle symptômes psychiques et phénomènes decontrainte chez les malades — notre expérience quotidienne la plus personnelle nous fait faire la connaissanced'idées incidentes dont nous ne connaissons pas la provenance, et de résultats de pensée dont l'élaboration nousest restée cachée.

Tous ces actes conscients resteraient sans cohérence et incompréhensibles si nous voulonsmaintenir la prétention que nous devons aussi faire nécessairement l'expérience par la conscience de tout ce qui sepasse en nous en fait d'actes animiques, et ils s'ordonnent dans une cohérence qu'on peut mettre en évidence sinous interpolons les actes inconscients inférés.

Or un gain de sens et de cohérence est un motif pleinement justifié à nous conduire au-delà de l'expérience immédiate.

S'avère-t-il en outre que nous pouvons édifiersur l'hypothèse de l'inconscient une pratique couronnée de succès, par laquelle nous influençons, auservice d'une fin, le cours des processus conscients, nous aurons acquis, avec ce succès, une preuveinattaquable de l'existence de ce dont nous avons fait l'hypothèse .

» FREUD, Métapsychologie, « l'Inconscient ». 3.2 La méfiance vis-à-vis de la conscience permet de la juger plus rigoureusement et d'en faire un meilleur usage. « Nous avons toujours des objets qui frappent nos yeux ou nos oreilles, et par conséquent l'âme en est touchée aussi, sans que nous y prenions garde, parce que notre attention est bandée à d'autres objets, jusqu'à ce que l'objet devienne assez fort pour l'attirer à soi en redoublant son action ou par quelque autre raison ;c'était comme un sommeil particulier à l'égard de cet objet-là, et ce sommeil devient général lorsquenotre attention cesse à l'égard de tous les objets ensemble [...] Toutes les impressions ont leur effet, mais tous les effets ne sont pas toujours notables; quand je me tourne d'un côté plutôt que d'un autre, c'est biensouvent par un enchaînement de petites impressions , dont je ne m'aperçois pas, et qui rendent un mouvement un peu plus malaisé que l'autre.

Toutes nos actions indélibérées sont des résultats d'un concours de petites perceptions, et même nos coutumes et passions, qui ont tant d'influence dans nosdélibérations, en viennent : car ces habitudes naissent peu à peu, et par conséquent sans les petites perceptions on ne viendrait point à ces dispositions notables [...] En un mot, c'est une grande source d'erreurs de croire qu'il n'y a aucune perception dans l'âme que celles dont elle s'aperçoit. » LEIBNIZ, Nouveaux. »

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