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Peut-on être neutre en écrivant l'histoire ?

Publié le 16/09/2004

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histoire

En posant la question « peut-on être neutre en écrivant l’histoire ? « nous cherchons à déterminer s’il est possible de faire abstraction de sa subjectivé, de son implication émotionnelle et psychologique, lorsqu’on s’attache à faire le récit et l’analyse des évènements passés. A première vue, une telle entreprise peut nous paraître absolument impossible, dans la mesure où le récit de l’histoire suscite nécessairement des réactions émotionnelles chez celui qui s’en charge, rendant parfaitement impossible de ce fait une narration dépassionnée et neutre des faits. Pourtant, dans la mesure où la neutralité est une garantie de scientificité, ne peut-on pas dire que la communauté des historiens surveille la neutralité des récits historiques par l’encadrement attentif de tous les discours tenus par un de ses membres ? Enfin, la notion toute récente d’histoire du présent qu’il nous faudra présenter n’apporte-t-elle pas des éléments nouveaux nous permettant de déterminer le degré de possibilité de la neutralité dans le domaine de l’écriture de l’histoire ? A ce titre, nous verrons que la neutralité est davantage le résultat d’un travail de l’historien sur son objet de réflexion que d’une distance temporelle.

La question au centre de notre travail sera donc de déterminer le degré de possibilité de la neutralité dans le cadre de l’écriture de l’histoire, et à travers lui la scientificité même de la discipline historique.

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« la manière dont il l'étudie est elle aussi purement subjective.

Prenons l'exemple d'un historien à tendances marxistesqui s'intéresseraient à la révolution française de 1789 : ses tendances politiques risquent de fonctionner comme unfiltre entre lui et son objet d'étude, de sorte qu'il lui sera impossible de la traiter avec l'objectivité que l'on attendd'un véritable scientifique.

C'est donc en raison de la nature propre de son objet d'étude que le discours del'historien ne peut être regardé comme un discours neutre : parce que la réalité humaine est complexe et le regardd'un individu sur elle nécessairement partial et déterminé par ses particularités empiriques (âge, sexe, milieu social,vécu…) nous ne pouvons croire les historiens qu'en apportant de prudentes réserves à cette croyance.

L'historienn'est donc pas si éloigné du romancier dont il prétend pourtant se distinguer par son objectivité, son regarddépassionné sur les faits : comme lui, il est guidé par des motifs purement subjectifs.

Nous dirons donc que lanécessaire implication psychologique de celui qui écrit l'histoire empêche cette dernière de prétendre à la neutralité. II.

Une neutralité garantie par l'intégration de l'historien dans la communauté de ses pairs Le discours de l'historien est toujours encadre par la communauté de ses pairs a.

Pourtant, nous ne pouvons en rester à une telle thèse.

En effet, il faut bien voir que l'histoire n'est jamais écrite endehors d'une communauté dont le contrôle qu'elle exerce est garante de sa scientificité.

L'historien n'existequ'intégré dans une communauté scientifique, une communauté qui surveille et régi les travaux de chacun de sesmembres.

Nous pouvons donc dire que nous sommes fondés à croire en la possibilité de la neutralité dans le cadrede l'écriture de l'histoire, à partir du moment où cette écriture est intégrée dans une communauté historienneexigeante.

En effet, chaque produit de la réflexion d'un historien donné est soumis à l'analyse, au jugement de sespairs.

En cas de désaccord, une controverse peut s'élever.

Nous affirmerons donc que le romancier dont nousdisions tout à l'heure qu'il sommeille dans l'historien est non seulement surveillé par lui-même mais également par lacommunauté de ses pairs qui traquent ce qu'il peut y avoir dans un ouvrage historique de subjectif, de partial,d'erroné.

Alors que le romancier est fondé à dire aux historiens qu'il est fondamentalement libre de s'emparer desévènements du passé pour les recomposer à sa guise (pensons à Alfred de Vigny qui fait du lâche et criminel Cinq-Mars, traitre à Louis XIII, un héros romantique dans le roman qu'il lui consacre) l'historien est responsable de sespropos devant la communauté de ses pairs.

L'historien doit donc s'efforcer de faire l'ascèse de toute subjectivité,car la neutralité de ses propos est garante de son intégration dans une communauté scientifique. La lutte pour la reconnaissance dans le domaine académique garantie la neutralité du discours particulier del'historien b. Allant plus loin, nous pouvons remarquer l'existence d'une sorte de « lutte pour la reconnaissance » dans le domaineuniversitaire, qui fonctionne comme un garant de la neutralité du discours historique.

En effet, dans la mesure où laneutralité est la valeur commune à laquelle obéissent les historiens, et dans la mesure où chaque membre de cettecommunauté aspire à la reconnaissance symbolique par ses confrères, nous pouvons en conclure que l'ambitioncommune des historiens sera de parvenir à la neutralité.

Ainsi, c'est finalement le fonctionnement de la communautédes historiens en tant que « champ sociologique » (pour reprendre l'expression de Pierre Bourdieu, créateur duconcept de « champ », c'est-à-dire de communauté unie par un intérêt et une activité identiques) qui est lemeilleur garant de la neutralité des discours particuliers tenus par les membres de cette communauté.

Nous dironsdonc qu'il n'y a pas lieu de mettre en cause la possibilité de la neutralité dans le domaine de l'écriture de l'histoire,car l'historien a besoin d'écrire de manière neutre s'il veut obtenir une place éminente dans la communauté de sespairs. III. La neutralité dans l'écriture de l'histoire s'acquiert lors de la construction de l'objet d'étude a.

La neutralité, résultat de la distance temporelle entre l'historien et son objet ? Enfin, il faut bien voir que la possibilité de la neutralité dans l'écriture de l'histoire a longtemps été associée à ladistance temporelle entre l'historien et son objet d'étude.

En effet, le temps passé entre l'évènement historique etl'étude qui lui est consacrée est longtemps apparu comme un garant de la neutralité de l'historien : le temps étaitconsidéré comme un moyen d'apaiser les passions et comme la condition nécessaire d'une réflexion objective sur lesfaits.

Or, il faut bien voir que la notion d'histoire du présent a conduit à repenser la neutralité dans le domaine del'écriture de l'histoire, puisque celle-ci n'apparait plus indissolublement liée à la question du recul temporel.

Pour. »

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