Devoir de Philosophie

Peut-on être soi-même avec l'autre ?

Publié le 21/01/2004

Extrait du document

C'est alors (dans le cadre d'une expérience de la honte d'avoir été surpris) que ma jalousie prend consistance (et par là-même aussi mon être comme jaloux); elle n'est plus seulement une manière diffuse d'agir dans ce monde: elle est cette qualification de ma personne, ce jugement sur moi porté par un tiers. Je suis quelqu'un, je ne suis plus une pure ouverture sur le monde: on me détermine comme un homme jaloux (on me donne une "nature", je deviens "quelque chose" sous le regard de l'autre (autrui me chosifie). Mais au moment où je deviens quelqu'un, je suis dépossédé de moi-même: c'est à l'autre de décider si je suis un curieux, un jaloux ou encore un vicieux.   g. Finalement, cette dissociation entre être et paraître pose un problème moral, car, utilisée habilement, elle peut conduire à la tartuferie : Tartuffe n'est pas lui-même » avec Orgon. Pourtant, dans cette tromperie, il montre bien ce qu'il est. On est soi-même, donc, autant par ce que l'on montre que par ce que l'on cache. h. Alors, la question devient : puis je..., dans la mesure où je le dois.

« du mot « aliénation » (alius, « autre ») —, elle est néanmoins nécessaire à la construction même de soi.

Un mondesans autrui est un monde inhumain, et même impossible, parce que je ne peux exister comme conscience que pourune autre conscience, et par elle être reconnu. Mais suis-je ce que je parais être au regard de l'autre ? b.

On voit par là que je ne peux offrir à l'autre que mon paraître.

Reste à savoir si je peux paraître ce que je suis.Or, ici interviennent des limites qui tiennent à moi et à l'autre. c.

Peut-on laisser paraître tout ce qui nous traverse l'esprit, sentiments, jugements, etc..

? N'a-t-on pas à maîtriserson comportement, ses paroles ? Mais alors, l'éducation m'empêcherait d'être complètement moi-même, en posantdes règles de politesse, de bienséance, de civilité, etc..

Et pourtant, sans cette éducation, nulle possibilité dedevenir soi-même (cf..

les enfants sauvages).A la naissance, dit Lucien Malson, tous les enfants naissent « psychiquement prématurés ».

Le cerveau ne contientpas telle ou telle aptitude mais seulement l'aptitude à former des aptitudes.

En outre, de tous les êtres vivants,l'homme est, à la naissance, le plus démuni d'instinct.

Le processus essentiel dans le développement de l'enfant,c'est donc comme l'affirme Léontiev, « l'assimilation ou appropriation de l'expérience accumulée par l'humanité aucours de l'histoire de la société ».

Ainsi l'enfant doit « s'hominiser », cad qu'il doit assimiler le « patrimoine social »pour accéder à l'humanité.

Il n'y a donc pas de nature ou d'essence humaine « inhérente à l'individu isolé ».Un enfant isolé dès la naissance ne peut pas s'hominiser.

Dans « Les enfants sauvages », Malson relate les cas dedeux enfants humains élevés avec des loups : Amala & Kamala.

Ces petites filles ont été capturées par un pasteur,en Inde, le 17 octobre 1920, alors qu'elles sortaient d'un terrier d'un loup.

Ces enfants marchaient à quatre pattes,hurlaient la nuit, lappaient, craignaient la lumière, étaient insensibles au froid et au chaud, avaient une acuitévisuelle particulière dans l'obscurité et e pouvaient s'exprimer intentionnellement de manière satisfaisante.

Amalamourut moins d'un an après sa capture.

Kamala qui avait entre sept ou huit ans vécut jusqu'à l'âge de dix-sept ans.Il fut très difficile de lui apprendre à marcher sur deux pieds.

Pour la parole, au bout de 7 ans d'effort, elle avaitacquis quarante-huit mots.

Ces cas nous montrent que les enfants de l'homme ne peuvent devenir des hommes horsdu milieu social: « L'homme sans la société des hommes ne peut être qu'un monstre » (Malson).

Comme l'affirmeJaspers : « Ce sont nos acquisitions, nos imitations, notre éducation qui font de nous des hommes du point de vuepsychique.

»Il n'y a donc pas plus de nature humaine individuelle qu'il n'y a de nature humaine universelle. Sur quoi se fondent ces règles culturelles ? d.

Le rapport à autrui exige à la fois sincérité et retenue.

Cela présuppose donc que je puisse ne pas être moi-mêmeavec l'autre.

Paradoxalement, je ne peux être moi-même avec l'autre, que parce que je peux aussi ne pas être moi-même face à lui.

Il y a ici une dissociation de l'être et du paraître, marque d'une liberté. e.

Mais si dissimuler n'est pas simuler, la frontière n'est pas toujours très visible.

Je peux être moi-même, tout en nemontrant pas complètement ce que je suis, ce que je pense.

Ce que je laisse paraître est une part de moi-même. f.

Il reste que, face à l'autre, je laisse paraître, involontairement etinconsciemment, des aspects de moi-même qui "m'échappent".

Mais alors, iln'y a qu'avec l'autre que je peux être moi-même, ici.

Dans la mesure où il voitce dont, parfois, je n'ai pas conscience ou que je voudrais cacher.

Le troublequi m'envahit et s'exprime face à l'être qui m'émeut, il le voit.

L'acte qui m'aéchappé, la parole malheureuse, l'expression de mon visage, il les a saisis.Cela montre bien que, comme dit Sartre, je reconnais que je suis tel quej'apparais à autrui, tel qu'il me voit.

Il fait reposer le sentiment de honte surce lien entre être et paraître face à l'autre.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓