Devoir de Philosophie

Peut-on faire son devoir par habitude ?

Publié le 23/03/2004

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L'individu devenant ainsi, par simple habitude, « conforme « au modèle de sa société, on peut qualifier globalement son comportement par le terme de « conformisme «. Et l'on voit que ce dernier, dans ce contexte, n'a rien de négatif.[B. Extension du conformisme] Ce conformisme peut toucher des valeurs dont l'importance morale est incontestable ou plus cruciale, comme l'honnêteté, ou le respect de la vie d'autrui. C'est à ce niveau qu'il révèle une certaine ambiguïté, que Kant a fortement soulignée : le commerçant qui rend « honnêtement « la monnaie à toute sa clientèle agit-il ainsi parce qu'il a l'habitude d'être effectivement honnête, ou agit-il ainsi par intérêt, pour conserver sa clientèle ? Dans le premier cas, il serait encore, bien qu'assez vaguement, du côté de la morale, mais dans le second, il n'y serait plus, puisque l'intention qui dirige son comportement n'a plus rien de moral. En d'autres termes, on doit distinguer l'action « faite par devoir « de celle qui n'est que « conforme au devoir «, seule la première étant sans équivoque. Faire son devoir par habitude, c'est se contenter d'être « conforme au devoir «, et tout le problème, pour celui qui prétend juger l'action de l'extérieur, sans en connaître l'intention précise, est de savoir si ce conformisme correspond à une réalité morale, ou s'il n'est qu'une apparence. [C. Le conformisme peut néanmoins suffire] En raison même de la rigueur de son interprétation de la moralité, Kant admet qu'il n'y a peut-être jamais eu au monde une action purement morale, rigoureusement accomplie « par devoir «, sans l'intervention de quelque autre détermination, si minime soit-elle.

La notion de devoir est polysémique : si elle implique toujours une obligation, cette dernière peut se rencontrer dans des domaines variés. Le « devoir « scolaire n'est pas lié à une obligation de même intensité que le devoir moral tel que le comprend Kant. Il est vraisemblable que l'intervention de l'habitude dans l'exercice du devoir n'aura pas exactement la même portée dans tous ces domaines.  

« [III - Les situations de « crise »] [A.

Conditions de la conscience du devoir]C'est en revanche dans les situations plus complexes que la conscience du devoir doit retrouver sa plénitude.

C'est-à-dire lorsque la solution à adopter ne va pas de soi, lorsque l'habitude de faire presque automatiquement ce quiconvient se révèle inefficace.

Par chance, de telles situations sont relativement rares, mais elles indiquent que lesujet rencontre bien un problème et qu'il doit le résoudre.

C'est ce qui peut surgir lorsqu'il y a « conflit de devoirs »,par exemple en cas de guerre : le conformisme m'enseigne que je ne dois pas tuer mon prochain, mais cette règlehabituelle vaut-elle à propos d'un ennemi ? [B.

De l'hétéronomie à l'autonomie de la volonté]Faire son devoir par habitude, s'est agir en obéissant à ce que Kant nommeun principe hétéronomique de la volonté, puisque l'on se contente d'adopteret de suivre une règle d'origine sociale (souvent familialement transmise).

Enrevanche, devoir décider par soi-même de la conduite à suivre parce qu'on vitune situation de crise pour la solution de laquelle le conformisme révèle soninsuffisance, c'est devoir découvrir sa propre autonomie morale : c'est danssa propre raison qu'il convient de découvrir la loi à laquelle on obéira.

C'estalors que, toute habitude étant révoquée, on fera authentiquement sondevoir, et en quelque sorte à deux niveaux complémentaires : en repérantsoi-même la loi et en lui obéissant.

Si, donc, on prétend donner au « devoir »sa signification la plus exigeante, on voit qu'on ne le « fait » que dans cesconditions.

Mais on devine que le quotidien nous demande un tel nombred'actions et de réponses qu'il ne saurait être question de le consacrerexclusivement à la recherche d'un tel devoir.Le principe de la moralité réside dans l'autonomie, soit la faculté de sedéterminer soi-même de par une législation rationnelle.

L'homme est lié à sondevoir par une loi qui ne lui est pas extérieure.

Aucun intérêt ne vient leforcer à faire son devoir, aucune force étrangère à sa propre volonté ne vientle contraindre.Si le devoir procédait d'une contrainte, l'homme ne serait pas libre maishétéronome, c'est-à-dire sous la dépendance d'une loi qui ne procède pas delui-même.

Le devoir ne se définit que par l'autonomie de la volonté.

Être libre et moral, c'est agir conformément à sapropre volonté législatrice universelle.Cette loi du devoir, bien qu'en nous, vise l'universalité.

Le principe suprême du devoir est inconditionné et absolu.

Lavolonté n'y est pas intéressée, et elle n'est pas non plus motivée par la crainte d'un châtiment ou d'une sanction s'ily a désobéissance.

Dans l'accomplissement du devoir, la volonté est fondée sur un principe d'autonomie :"L'autonomie de la volonté est cette propriété qu'a la volonté d'être à elle-même sa loi (indépendamment de toutepropriété des objets du vouloir).

Le principe de l'autonomie est donc : de choisir de telle sorte que les maximes denotre choix soient comprises en même temps comme lois universelles dans ce même acte de vouloir." [C.

Les deux morales de Bergson]Cette différence entre le quotidien et la crise morale se retrouve, collectivement perçue, dans le repérage effectuépar Bergson d'une morale « close » et d'une morale « ouverte ».

La première est globalement statique, elle n'innoveguère et se contente d'appliquer, comme par une habitude collectivement acquise, des valeurs déjà admises.

Ellepeut suffire, mais mène à la répétition.

Aussi la morale « ouverte » est-elle celle qui vient périodiquement ébranlercet univers ensommeillé de certitudes, en proposant des valeurs et des conduites neuves, initialement un peuchoquantes parce qu'elles bouleversent les habitudes.

Ces deux types de morale concernent l'humanité dans sonensemble, mais on peut admettre que l'existence individuelle propose également une alternance entre des situations« habituelles » et des situations qui, au contraire, réveillent la conscience et exigent une réflexion morale plusauthentique.. »

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