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Peut-on parler d'un pouvoir des faibles ?

Publié le 16/12/2009

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Il ne s’agira donc pas de considérer les faibles comme équivalents au fort, a fortiori aux forts, mais comme pouvant ayant éventuellement avoir une forme d’expression plus ou moins puissante, dans une société où ils sont dans une proportion majoritaire. Dans ce cas, effectivement les faibles pourraient prétendre à un pouvoir. Le cadre reste cependant limité : on serait tenté d’agrandir le raisonnement à la philosophie politique : cependant la démocratie, mise en place, faite par et pour le peuple, est-elle l’expression des faibles ? Il y a de quoi en douter, en se basant sur le raisonnement précédent : le peuple est constitué en majeure partie de faibles, mais pas uniquement de faibles, et ce sont donc les non-faibles qui vont prendre les devants du peuple, et donner à ce peuple son degré d’intelligence. A partir du moment où ce ne sont pas seulement les faibles qui agissent, il se peut qu’un fort “inspire” les faibles. Il ne serait donc pas juste de considérer la démocratie comme le prémice au “pouvoir des faibles”.

« pour asseoir un pouvoir sur le fort: c'est le cas de l'orateur qui emploie sa rhétorique à mauvais escient, comme lesouligne Socrate à Calliclès : par le biais de l'art rhétorique, un bon orateur inqualifié en matière de médecine seraitcapable de convaincre un malade de ne pas prendre un médicament que lui recommande le médecin.

Les faiblesseraient ainsi en mesure de se positionner dans la société, en renonçant aux valeurs du sage — mentant, volant,...Nietzsche va plus loin, pour lui, si les faibles sont au pouvoir, c'est qu'ils ont réussi à l'usurper aux forts, quidevraient l'avoir légitimement et raisonnablement ; les prêtres, théologiens utilisent la croyance en “un dieu”(probablement inventé...) qu'ils produisent pour exercer un pouvoir “divin” dont ils prétendent être les dépositairespour soumettre, punir, gouverner les hommes (croyants); ils sont l'image-même, l'expression de la domination desfaibles sur les forts.

Les faibles vont donc intoxiquer le fort, l'empêcher d'accomplir la création à laquelle il estdestiné, pour exprimer leur propre réaction : n'ayant pas de pouvoir créateur, les faibles vont tenter d'acquérir cepouvoir par la manipulation entre autres, de la même manière que les animaux de la Cour du Lion, jouent sur la ruse,pour obtenir ce qu'ils veulent, ruse qu'ils exercent aussi bien sur les “forts” que sur les “moins faibles” qu'eux, commedans “Le lion, le loup et le renard”, fable de La Fontaine, où le loup acquiert son pouvoir par la calomnie, et le renardpar la ruse.Ce n'est pas parce qu'ils sont faibles, sous-entendu plus faibles que les forts, que les hommes faibles, ne peuventpas accéder au pouvoir : non seulement, ils prétendent en avoir un, mais ils se l'octroient, bien souvent, par tousles moyens, que ce soit par l'association, en donnant l'illusion d'une force dans un quelconque domaine, ou par laruse.

Cependant, on peut s'interroger sur la nature d'un tel pouvoir de ces individus, dit “pouvoir des faibles”,obtenu de manière si particulière.

On ne peut confondre le pouvoir détenu par les faibles et le pouvoir décerné aux forts.

Déterminons sescaractéristiques, c'est-à-dire sa nature par rapport au pouvoir des forts, son expression, ses armes...Dans son Dictionnaire philosophique , André Comte-Sponville s'essaye à la définition du mot “pouvoir”, et dans sa définition, il s'arrête longuement à la distinction entre le “pouvoir de” et le “pouvoir sur”, pour simplifier, le “pouvoirde” est la puissance, tandis que le “pouvoir sur” n'est qu'une sous-forme de la puissance.

Le passage de lapuissance au “pouvoir sur” se fait facilement, tandis que le passage du “pouvoir sur” au “pouvoir de” est peuprobable...

“Dès que l'action possible est action possible (et reconnue comme telle de part et d'autre) sur la volontéde quelqu'un d'autre, on passe du pouvoir de au pouvoir sur”, écrit-il.

A partir de cette définition, nous pouvons faireune première approche de ce “pouvoir” des faibles : il s'agit d'un pouvoir sur , en effet, de par la définition nietzschéenne des faibles (qui se contentent de vivre par actions réactrices, en opposition aux forts qui vivent paractions créatrices), et de par la manière dont ils accèdent au pouvoir, on ne peut concevoir un pouvoir visant etexerçant un pouvoir de, c'est-à-dire d'accomplir quelque chose sur la nature, la matière, ou la société.

Un faiblepeut avoir un pouvoir (par le capital, l'argent par exemple) sur le cordonnier, auquel il commandera une paire dechaussures, mais il n'a pas le pouvoir de créer ces chaussures.

Ils se contentent d'un pouvoir sur, dont nousmontrerons les limites plus tard.

Le pouvoir des faibles serait donc un pouvoir qu'ils s'adjugent eux-mêmes, et qu'ilsexercent sur quelque chose ou quelqu'un, sans pour autant avoir la capacité de réaliser eux-mêmes ce qu'ilsordonnent.

L'attribution d'un pouvoir aux faibles suppose son acceptation par les autres, y compris les forts; pourqu'elle se fasse, et que leur pouvoir s'établisse, et ne soit pas renversé, des armes leur sont spécifiques.La morale, plus particulièrement, le sentiment de morale en font parti.

La morale se définit comme l'ensemble desrègles de conduite qui seraient universellement, inconditionnellement valables, elle implique les notions de “bien”,d'”éthique”...

Le sentiment de morale est éprouvé par les forts, vis-à-vis des faibles, ce sentiment vise à protégerles faibles, et cela va jusqu'à leur accorder un certain pouvoir par pitié, par expression inconsciente de ce sentimentde morale, ancré dans les esprits depuis l'enfance via le surmoi.

Car le faible est une personne, et l'idée de personneest source d'humanité, le faible est un être semblable dont la dignité interdit de le traiter comme simple moyen,comme sous être.Ce sentiment s'exerce dans le cas du faible non-responsable de sa faiblesse : on confond la fragilité et la faiblesse...Ainsi, les enfants et les personnes âgés inspirent un sentiment de pitié, qui se transforme en morale: il fautdéfendre, protéger les faibles.

Les trois petits enfants dans Quatre-vingt-treize , de Victor Hugo nous attendrissent “à eux trois, ils n'avaient pas neuf ans [...] ils étaient ceux que toutes les langues humaines appellent les faibles etles bénis”.

L'expression de leur faiblesse même leur confère un pouvoir sur ceux qui les voient, leur pouvoir provientde la capacité à aller au coeur, à émotionner les forts.

C'est une forme du pouvoir des faibles, fonctionnant surl'apitoiement des forts; il faut cependant nuancer : tous les faibles ne sont pas non-responsables de leur faiblesse :si le sentiment de morale force à protéger les faibles, il n'est pas un encouragement à la faiblesse.. »

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