Peut-on prouver la liberté ?
Publié le 11/01/2004
Extrait du document
- I) On peut prouver la liberté.
- II) On ne peut pas prouver la liberté.
«
On ne peut pas prouver que l'homme est libre mais on peut le penser.
1.
D'après Kant, nous ne pouvons nous présenter les phénomènes que sous les formes de l'espace et du temps; etles phénomènes ainsi représentés sont enchaînés les uns aux autres par un déterminisme inflexible.
Comment alorsadmettre la liberté ? Le seul moyen, c'est de mettre en question la valeur de la science, de montrer qu'elle n'est pasla représentation exacte du réel, et que, par suite, la liberté est possible en réalité.
Or, telle est précisément laconclusion de la Critique de la Maison pure.
Celle-ci établit que le monde tel qu'il nous apparaît et qui est soumis audéterminisme, n'est qu'un monde apparent, tout relatif à la constitution de notre esprit, et que, par conséquent,nous n'avons pas le droit de conclure de ce qui apparaît à ce qui est.
Il peut donc y avoir, dans le noumène, unecausalité libre.
Or, la raison pratique transforme pour nous cette possibilité en nécessité.
Elle ne nous prouve pascette liberté fondamentale ; elle nous oblige à y croire.
2.
Ainsi donc, d'une part, la science implique le déterminisme universel ; d'autre part, le devoir postule la liberté.Comment lever cette antinomie? Kant distingue dans l'homme deux espèces de causalités et de caractères : lescaractère et causalité empiriques (homme-phénomène) ; les caractère et causalité intelligibles (homme-noumène).
a) Le caractère empirique, c'est l'homme en tant qu'il se connaît, qu'il s'apparaît à lui-même : c'est-à-dire une sériede phénomènes (faits de conscience) reliés entre eux par une loi, loi qui s'exprime par le mot : moi.
Cette expressionne signifie rien autre que l'unité de notre perception.
En d'autres termes, nous ne pouvons apercevoir les faits deconscience, qui sont plusieurs, successifs, qu'en les reliant les uns aux autres par la causalité.
Notre caractèreempirique n'est donc qu'une série de phénomènes unis par la causalité empirique, c'est-à-dire déterminés.
De cepoint de vue phénoménal, la formule déterministe (antithèse de l'antinomie), « il n'y a pas de causalité libre », estdonc vraie.
b) Le caractère intelligible ou nouménal, c'est l'homme tel qu'il est réellement, comme être en soi, comme noumène.Ce caractère n'est pas dans le temps; il est supérieur au temps; il jouit de la propriété de la causalité absolue, nondéterminée, libre, c'est lui qui, par un acte hors du temps, détermine la série des effets phénoménaux, qui eux, sedéroulent dans le temps, et forment notre caractère empirique.Cette solution semble avoir été admise par certains savants qui, comme le dit Poincaré, « sont déterministes, quandils font de la science, mais croient à la liberté, quand il s'agit de la conduite de leur vie ».
Kant considère la causalité non comme une réalité objective, mais comme una priori de l'entendement humain.
D'où l'idée que la véritable nature del'homme n'est pas celle que nous connaissons théoriquement et l'affirmationde la possibilité d'une liberté transcendantale, nouménale.
Il y a, en l'homme,une volonté libre qui peut se déterminé elle-même indépendamment del'enchaînement temporel de sa vie.
Il est donc capable de commencer uneaction qui ne soit pas déterminée par des causes extérieures.
LA PERSONNE ET LA MORALE
"L'homme conscient de son devoir n'est pas, dans le monde, phénomène maisnoumène ; il n'est pas une chose, mais une personne." Kant, Opus postumum,1796-1804.
L'homme, par son affectivité, tisse des liens avec le monde.
De ce fait, il peutêtre déterminé dans ses actions par des causes qui lui sont extérieures,hétéronomes.
Tout ce qui peut conditionner le sujet ne permet pas de fonderla morale, car l'homme serait alors ramené à un statut d'objet, phénomèneparmi les phénomènes, régi par le principe de causalité.
Si l'action morale estpossible, elle ne peut se fonder que sur un inconditionné, c'est-à-dire quelquechose qui ne dépende pas de la nature, mais qui soit de l'ordre de l'intelligiblepur, un noumène.
Je dois donc je suis libre.
Mais comment puis-je savoir que je suis libre ? Kant répond: par la loi morale.
autrement dit, la liberté se fonde surl'impératif catégorique.
J'expérimente que je peux agir contre toutes mes tendances et mes intérêts s'il le faut.J'éprouve donc en moi une possibilité d'agir moralement qui atteste mon indépendance par rapport à tous lesdéterminismes naturels et sociaux qui m'affectent.
La liberté ne peut pas se prouver, mais elle est un fait donné enmême temps que la raison..
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