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Peut-on soutenir : « A chacun sa vérité » ?

Publié le 25/03/2004

Extrait du document

a) Partir du sens des termes
  • Vérité. Accord avec ce qui est véritablement. Correspondance avec un donné.
  • Soutenir. Défendre, affirmer. b) Problème
  • La vérité, comme correspondance avec un donné, demeure-t-elle au simple niveau subjectif ou peut-on revendiquer un élément d'objectivité, donc de permanence, dans le vrai ?
  • c) Thèse Le simple examen de la sphère de la sensation nous invite à affirmer la primauté d'une vérité subjective. La vérité étant définie comme la somme des sensations personnelles, alors nous dirons : « à chacun sa vérité « (c'est la thèse des sophistes dans l'Antiquité : Protagoras, Gorgias).
  • d) Antithèse Tout le mouvement de la pensée et du savoir nous conduit à revendiquer et à affirmer une dimension d'objectivité, c'est-à-dire extérieure à l'homme et d'universalité en ce qui concerne le vrai (cf. la constitution de la vérité scientifique : le fait scientifique se construit contre l'expérience première et subjective).
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« t-il vraiment? B.

Relativité du vraiLes vérités universelles et immuables sont plutôt rares.

Les opinions des hommes sont variables et inconstantes.Leurs points de vue sont l'expression de leurs intérêts, de leurs passions, le produit de leur histoire individuelle oucollective.

Ce qui apparaît vrai à l'un, compte tenu de son intelligence, de sa sensibilité, de sa constitutionsensorielle propre, n'apparaît pas forcément tel à l'autre.

L'expérience très individuelle et singulière que chacun faitde l'existence laisserait penser que chaque homme a sa conception du monde et ses vérités propres.

Il est vrai quedes intérêts communs, des expériences ou des héritages partagés peuvent conduire des hommes à soutenir unemême vision du monde.

Mais la vérité d'un groupe ou d'une tradition contredit celle d'un autre groupe ou d'une autretradition et l'on retrouve à l'échelle des individus sociaux les mêmes raisons de désaccord et d'incompréhension quecelles qui existent entre les personnes individuelles.

Ce sont donc toujours des points d'accord accidentels, souventpassagers, qui rassemblent des hommes dans l'illusion de posséder des vérités communes.

Et il est rare qu'avec letemps les communautés de pensée ne connaissent pas leurs hérésies, leurs schismes ou leurs révolutions culturelles.Comme si la fiction d'une vérité partagée ne pouvait jamais s'installer durablement en ce bas monde. 2.

La vérité comme production universelle A.

Les vérités ne sont jamais individuellesPourtant, la thèse sceptique de l'individualité du vrai ne va pas de soi.

Selon cette tradition, la source del'individualisation de nos vérités est l'expérience très subjective que nous faisons du monde et qui dépendraitessentiellement de notre constitution sensorielle et affective.

Il n'est toutefois pas évident que nos penséesdérivent de nos sens ou de notre sensibilité.

Et il est par ailleurs très difficile de rencontrer, parmi les hommes, desopinions vraiment singulières.

La pensée des hommes est un fait de culture et, indépendamment de tout phénomènede mode, l'individu le plus intelligent et original est nécessairement l'héritier intellectuel de son époque.

Les idéessont toujours communes.

Ce n'est pas en vertu d'un quelconque mimétisme que Leibniz (1646-1716) et Newton(1642-1727) ont découvert, presque en même temps, le calcul infinitésimal.

Sans contester que l'expériencequalitative, sensorielle et affective, que nous faisons de l'existence soit singulière, il est difficile d'admettre enrevanche que ce vécu individuel se traduise, sur le plan des pensées, par la production d'un point de vue égalementunique et original. B.

Les conditions d'un accord universelQue les opinions soient toujours communes et grégaires n'exclut pas, pour la pensée, de pouvoir faire l'objet d'unaccord universel.

Mais une vérité universelle n'est pas pour autant absolue.

En effet, une vérité n'est universelle quesous certaines conditions.

Par exemple, en géométrie, dans le cadre des principes d'Euclide, un certain nombre dethéorèmes sont universellement valables.

Il suffit pourtant de raisonner à partir d'autres principes, dans desgéométries non euclidiennes, pour que ces théorèmes cessent d'être vrais.

Ou encore, un énoncé empirique du type«il pleut» est jugé vrai dans la mesure où, compte tenu des usages linguistiques, le phénomène appelé «pluie» estcelui qui se produit sous les yeux de celui qui formule cet énoncé.

Si, en face de la pluie, le sujet qui sait ce qu'estla pluie affirmait qu'il ne pleut pas, il contredirait son propre usage du terme de «pluie» ainsi que ceux de son groupelinguistique.

Le vrai est donc universel mais d'une universalité qui suppose toujours des conditions déterminées.

Cequi est commun à toute vérité, par conséquent, c'est son caractère nécessaire: est vrai ce qui, sous certainesconditions, démonstratives, empiriques ou linguistiques, ne peut pas ne pas être affirmé.

La vérité est ce quis'impose à tous les esprits.

Elle ne saurait donc être, par nature, une affaire individuelle. 3.

À chacun sa vérité A.

De la vérité à la question du sensLe scepticisme aurait donc tort.

Le vrai ne partagerait pas la subjectivité de nos sens.

Et s'il est effectivementrelatif, il ne saurait s'agir d'une relativité individuelle.

Pourtant, si l'on cesse de raisonner sur ce que les hommesaffirment et tiennent pour vrai, considéré abstraitement, en dehors du contexte dans lequel ces énoncés prennentsens, il est possible de rejoindre l'intuition de Pirandello.

Car quand deux hommes soutiennent la même chose etpartagent un avis, est-on jamais sûr qu'ils comprennent de la même manière ce sur quoi ils s'accordent? Ce qu'onappelle une vérité est un énoncé envisagé d'un point de vue strictement logique ou théorique, sans considérationd'autres principes de signification que la définition des termes qui le composent.

Mais dès lors qu'un individu parle eténonce quelque chose, son propos a un sens qui dépasse son contenu strictement logique.

La proposition «c'est unchien» peut avoir non seulement un impact affectif différent selon qu'on aime ces animaux ou qu'on en a peur, maisla valeur significative du terme «chien» peut varier d'un individu à l'autre: un enfant, un membre de la SociétéProtectrice des Animaux, un aveugle, un citadin exaspéré par les excréments de ces braves bêtes...

comprendrontdifféremment le mot «chien». Le sophiste Protagoras , écrit Diogène Laerce « fut le premier qui déclara que sur toute chose on pouvait faire deux discours exactement contraires, et il usa de cette méthode ». Selon Protagoras , « l'homme est la mesure de toute chose : de celles qui sont en tant qu'elles sont, de celles qui ne sont pas en tant qu'elles ne sont pas » Comment doit-on comprendre cette affirmation ? Non pas, semble-t-il, par référence à un sujet humain universel, semblable en un sens au sujet cartésien ou kantien, mais dans le sensindividuel du mot homme, « ce qui revient à dire que ce qui paraît à chacun est la réalité même » ( Aristote , « Métaphysique », k,6) ou encore que « telles m'apparaissent à moi les choses en chaque cas, telles elles existent. »

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