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Peut-on vouloir être immortel ?

Publié le 27/12/2005

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Détachant sa "libido" de la réalité extérieure, l'artiste est au bord de la névrose, cad une affection mentale, sans base anatomique connue dont les symptômes expriment symboliquement un conflit trouvant ses racines dans l'histoire infantile du sujet. Créateur, animé de tendances impérieuses spontanées et irréfléchies extrêmement fortes. Artiste, siège d'instincts et de besoins vigoureux, intenses et abondants. Dimension sociale de l'objet de ces désirs. Point l'idéal, point la Déesse de la beauté que l'artiste veut conquérir, mais plutôt les honneurs, l'éclat, la distinction sociale. Il veut non point les femmes, mais l'amour des femmes, cad leur attachement à sa personne. Ce que désire l'artiste, ce sont les signes du prestige, le pouvoir, l'argent, les honneurs et la considération. Etre fragile cherchant les manifestations d'une puissance qui cicatriseraient et panseraient sa vulnérabilité, sa complexion fragile. "Mais": difficultés auxquelles se heurtent l'artiste. Opposition: fond irrationnel et quasi biologique, très puissant et réalisations sociales déficientes.

En première analyse, il est clair que le désir d'immortalité est un fait quasi universel chez l'homme comme en témoignent les religions qui toutes comportent des croyances concernant une survie après la mort, si variables soient d'ailleurs ces croyances. Mais ce désir est-il raisonnable ? Quels sont les motifs qui peuvent le légitimer ?  

« Alquié a brillamment illustré la thèse psychanalytique en son « Désir d'éternité ».

Le « désir d'éternité », le « refus du temps » dont parle Alquié à propos des passions, c'est la fixation du passionné à des circonstances de son passé dont il est d'autant plus l'esclave qu'il n'en prend pas une conscience claire.

Les passionnés, « prisonniers d'un souvenir ancien qu'ils ne parviennent pas à évoquer à leur conscience claire sont contraints par ce souvenir àmille gestes qu'ils recommencent toujours, en sorte que toutes leurs aventures semblent une même histoireperpétuellement reprise.

Don Juan est si certain de n'être pas aimé que toujours il séduit et toujours refuse de croireà l'amour qu'on lui porte, le présent ne pouvant lui fournir la preuve qu'il cherche en vain pour guérir sa blessureancienne.

De même, l'avarice a souvent pour cause quelque crainte infantile de mourir de faim, l'ambition prendsouvent sa source dans le désir de compenser une ancienne humiliation...

Mais ces souvenirs n'étant pas conscientset tirés au clair, il faut sans cesse recommencer les actes qui les pourraient apaiser. » La conception de Alquié a été discutée par Pradines .

Ce dernier, tout en reconnaissant que nos premières émotions sont parfois susceptibles d'orienter définitivement nos tendances, se refuse à voir en toutepassion l'emprise inconsciente du passé.

Le plus souvent, la passion se présente « plutôt comme l'appétit de sensations inconnues que comme le désir de renouveler d'anciennes expériences ».

La passion charnelle n'est-elle pas « révolte contre l'habitude » ? Sans doute, en sa conscience claire, la passionné aspire à éprouver dessensations nouvelles.

Dans le « coup de foudre », la passion éclate brusquement, s ‘éprouve comme une découverte que rien ne laissait présager.

Mais le témoignage de la conscience du passionné ne nous semble nullement décisif.Les « découvertes », les « révélations » de la passion sont la réponse à une angoisse qui leur préexiste et qui ne trouve sa signification claire que dans les événements de notre passé.

Le « coup de foudre » ne nous introduit pas dans un monde réellement nouveau, mais réveille une ancienne nostalgie.

Si ce visage, inconnu encore de nous il y aseulement quelques instants, nous trouble si fort, n'est-ce pas, comme le dit Alquié , que « nouveau en lui-même, il devient pour nous l'image et le symbole d'une réalité que notre passé a connue » ? Dans le « Phèdre », Platon a parlé de l'émotion amoureuse de l'âme qui tombe en extase devant la beauté.

Mais cette extase soudaine n'est quele retour d'un souvenir.

Réveillée par la présence du Beau, l'âme se souvient moins obscurément de son passélumineux, avant l'incarnation, au paradis des Idées.

Il est permis de reconnaître en ce mythique paradis,magiquement ressuscité par une belle apparition, le symbole métaphysique du « vert paradis » de nos « amours enfantines » dont nos passions adultes ne sont obscurément que la résurrection nostalgique. De la théorie psychanalytique, nous retiendrons essentiellement le caractère inconscient des processus passionnels.L'objet de la passion résulte d'un transfert ou d'une compensation, ou d'une sublimation.

Les vraies causes de lapassion sont en nous-mêmes et non réellement dans les objets qui paraissent les solliciter. « Orientée vers le passé, remplie par son image, la conscience du passionné devientincapable de percevoir le présent : elle ne peut le saisir qu'en le confondant avec le passéauquel elle retourne, elle n'en retient que ce qui lui permet de revenir à ce passé, ce qui lesignifie, ce qui le symbolise : encore signes et symboles ne sont-ils pas ici perçus commetels, mais confondus avec ce qu'ils désignent.

L'erreur de la passion est semblable à celleoù risque de nous mener toute connaissance par signes [...] ; le signe est pris pour lachose elle-même : telle est la source des idolâtries, du culte des mots, de l'adoration desimages, aveuglements semblables à ceux de nos plus communes passions ; [...] Il est vain de vouloir détruire un amour en mettant en lumière la banalité de l'objet aimé,car la lumière dont le passionné éclaire cet objet est d'une autre qualité que celle qu'uneimpersonnelle raison projette sur lui : cette lumière émane de l'enfance du passionné lui-même, elle donne à tout ce qu'il voit la couleur de ses souvenirs [...].

L'erreur du passionnéconsiste donc moins dans la surestimation de l'objet actuel de sa passion que dans laconfusion de cet objet et de l'objet passé qui lui confère son prestige.

[...] Son erreur estseulement de croire que les beautés qui l'émeuvent et les dangers qu'il redoute sont dansl'être où il les croit apercevoir.

En vérité, l'authentique objet de sa passion n'est pas aumonde, il n'est pas là et ne peut pas être là, il est passé.

Mais le passionné ne sait pas lepenser comme tel : aussi ne peut-il se résoudre à ne le chercher plus.

» Alquié , « Le désir d'éternité ». La problématique de la passion est ici posée dans son rapport au temps : en cherchant àfaire perdurer le passé dans le présent, elle veut abolir la fuite du temps et instaurer lerégime de l'éternité.

La passion amoureuse est l'amour d'un être passé qu'elle confond avecses substituts actuels.

En ce sens, l'être passionné se singularise par la méconnaissance deson objet : il ne peut distinguer l'objet de sa passion tel qu'il est réellement aujourd'hui, dece qu'il a été mais n'est plus à présent.

Les marques qui témoignent de ce passé (unephotographie, par exemple) se substituent à la réalité actuelle. Cette analyse permet à Alquié d'expliquer les malentendus qui s'instaurent inévitablement entre le passionné et une autre personne, bénéficiant d'un statut de neutralité : ils ne. »

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