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Les philosophes d'Europe du Nord

Publié le 15/07/2011

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Kierkegaard écarte donc l'abstraction. Qu'est-ce qu'abstraire ? L'abstraction désigne cette opération par laquelle la pensée évacue le concret, la temporalité, le vécu individuel, pour se plonger dans l'idéalité conceptuelle, qui exclut les déterminations concrètes. Kierkegaard s'insurge, en un cri passionnément anti-hégélien, contre les insuffisances de l'abstraction : c'est la vie qu'elle évacue, le concret, l'existence en tant que telle.

« Parce que la pensée abstraite est sub specie aeterni, elle fait abstraction du concret, du temporel, du devenir de l'existence, de la détresse de l'homme, posé dans l'existence par un assemblage d'éternel et de temporel « (ibid., p. 201).

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« ou à la superstition. Ledeuxième, qui permet de dégager les structures logiques du réel, les loisde la nature, s'appuiesur la raison : il rend possible les sciences.

Maisle troisième genre,supérieur aux deux autres, permetune connaissance directe des êtres et de leur relation au tout, à Dieu :c'est l'intuition, qui engendre la foi, «l'amour intellectuel de Dieu ». Cet amour envers Dieu est non seulementsource de joie maisaussidesagesse (puisqu'il correspond à une visionjuste du réel), mais encorelacondition dusalut et de la liberté (puisque le sage est libéré des TM I***" —«=^H apparences et des inquiétudes liéesàl'ignorance). Pour lephilosophe, en effet, la mort n'est que la fin d'un corps,la vie étant par nature éternelle. Politique et moralePour la plupart des hommes, la libertéestune illusion.Ils se croient libres alors qu'ilssont contraints et déterminés par leur nature.

Lavraieliberté, réservée au sage, est cettenécessité comprise.

Néanmoins, l'organisationd'une société peut et doit favoriser lalibération des individus. Danscette optique,la démocratieest le mode de gouvernement « le plus voisin de l'état naturel » puisque l'on n'y doit finalement obéissance qu'à soi-même, dans une relation d'égalité aux autres. Lareligion et la morale religieuse, quant à elles, font l'objet d'une critiquesévèrequi favorisera le mythe d'un Spinozaau mieuxdéiste, au pire athée.Pourlui,les Écritures sont une œuvre humaine et non révélée.

Plus encore,les miracleset les prophéties ne sont aux yeux du philosophe hollandais que des «histoires » en vue d'obtenir l'obéissance et la piété du peuple. Il ne peut dès lors y avoir de vraie morale que rationnelleet philosophique. L'influence du spinozisme Rarement, dans l'histoire des idées,philosophe n'aura, de son vivant et après sa mort, suscité autant de passionet de haine, alors même que saphilosophie en estsingulièrement dépourvue. C'estque Spinoza est à uncarrefour del'histoire : ilachève ce qui précède (l'héritage stoïcien et lecartésianisme) etannonce ce qui s'ouvre (les Lumières et la modernité). Tour à tour modèle et antimodèle,Spinoza reste surtoutle porte-parole de la tolérance et de lalibertéde pensée, ce qui fait dire à Hegel que « tout homme a deux philosophies: la sienne et cellede Spinoza ». Cet hommage appuyé vaut encoreaujourd'hui puisque la pensée moderneàl'instar de Gilles Deleuze continue à voir en lui un chantre de la libération radicale et unphilosophe de la vie, tout simplement. LES PHILOSOPHES SCANDINAVES Historiquement, deux sphères d'influence philosophique - et politique - se dessinentà partirdu xvne siècle: laSuède et laFinlande d'un côté, le Danemark et, dans une moindremesure, la Norvège, de l'autre.

La pensée suédo-finnoise secaractérise par une approche spéculative et systématique, voisine de cellede la philosophie allemande. Lapensée danoise, quant à elle, est davantage centrée sur des problématiques individuelles, psychologiques et morales. En SuèdeLephilosophe suédois le plus original est sans doute EmanuelSwedenborg (1688-1772). Déclaré hérétique par l'Égliseluthérienneen1769 et condamnépar Kantlui-mêmequi voyaiten ui une figure emblématique de la divagation, Swedenborg semble avoir faitd'abord l'unanimité contre lui.

Son approche scientifique du réel (il était géomètre) le conduit àvoir dans l'univers une construction géométrique. Mais ce monde visible sedouble d'un monde invisible et divin qui correspondavec lui.Cette mystique de la communication entre lesensible et lesuprasensible ainsique son message de paixet d'amour universel trouveront écho dans lemouvement romantique, y compris en France. En effet, BalzacetBaudelaireconsidérerontSwedenborgcomme un visionnaire.Cet illuminisme swedenboriendonnera d'ailleurs naissance àune secte, très active enAngleterre, l'Église de la Nouvelle Jérusalem. L'autre grande figure du xvnie suédois est Karl von Linné (1707-1778), philosophe naturaliste etsystématique. On lui doit une classification M Abotanique supposant une organisation logique du réel, où chaque choses'ordonne selon sa juste proportion. I En fait, la nature » est construited'après un plandecréation divin quimaintient 4|rf l'équilibre des •forces en présence; ainsi, j prédateurs etI+ créatures plus ,faibles assurent,tous deux lacontinuité d'une chaîne devie. Àpartir du *xixesiècle, l'idéalismeallemand triomphe enSuède.

Tout d'abord, dans l'œuvredeB.C.Hôijer (1767-1812), disciplede Kant,qui passepour être,avecBostrôm,le plus grand penseurdelàSuède.Brillantorateur, fervent républicain, on lui doit surtout une philosophie del'histoire et des sciences qui, selon un principe idéaliste, ne peuvent prétendre à la vérité qu'en devenant objectives. C.J. Bostrôm (1797-1866) est à l'origine d'une véritable philosophienationale, qui se caractérise par une approche à la fois rationnelle etmorale duréel. Lareligion y apparaîtcommela source de l'éthique et du droit, sur lequel règne le monarque, personnalité morale supérieure et distincte de la société civile. Avoir foi en soi, en son roi et en Dieu, voilà en somme les exigences du «bostromianisme ». EnFinlandeLongtemps sous influence suédoise, pour des raisons politiqueset linguistiques notamment, la Finlande n'acquiert son autonomie qu'au début duxixesiècle. Ilrevientà J. V.Snellman (1806-1881), philosophe ethomme politique, d'avoir adapté lathéorie hégélienne del'État à l'élaboration d'uneauthentique fennité. Pour ce sénateur, fondateur de labanque de Finlande, la nation est une personnalité morale dont la finalité ne peut être que l'indépendanceetlasouveraineté. AuDanemarkLaphilosophie, comme discipline spécifique, n'apparaîtqu'au xvir siècle. Encore n'est-elle au départ qu'une orientation moraliste dans l'œuvre descientifiques -Niels Steensen (dit Sténo, 1638-1686) - ou dedramaturges -Ludwig Holberg (1684-1754). Enfait, lexvme siècle, par une profonde réformede la langueva permettre l'émergence d'une pensée authentiquement danoise. Celle-ci se caractérise par une approche ironique et non systématique des problèmes del'homme. Son champ de réflexion àtravers l'ethnique ou la politique sera toujourscentrésur les rapports difficiles de l'individu avec lui-même et aveclesautres.Cet individualisme dano-norvégien apparaît clairementdans l'œuvre de Niels Treschow (1751-1833). Celui ci n'accordede réalitéqu'aux individus existants; les concepts, les systèmes,trop généraux et trop abstraits, nous empêchent declairement penserce qu'un homme a de singulier et d'unique. L'éthique et la politique doivent en ce sens tendre vers la réalisation, la perfection (au sensspinoziste), des qualités individuelles. Cette critique del'idéalisme - et de ses représentants danois, Henrik Steffens (1773-1845), ami de Fichte etSchelling et promoteurd'une philosophie romantique, et H.

C.Orsted (1777- 1851), philosophe pragmatique et théoriciendu droit - trouvera unécho amplifié dans l'œuvredu plusgrand philosophe danois, Soren Kierkegaard. KierkegaardLa tragédie du destinL'histoire privéeet, à bien des égards, tragique deKierkegaard est la source et la ressource de son œuvre.

Septième enfant d'une famille bourgeoise,il naît le 5 mai 1813 à Copenhague.

Son enfanceest profondément marquée par le luthéranisme austère et angoissé *„: de son père qui, hanté par le remordsd'une faute passée - un instant de révolte contre Dieu - pousse le jeune Soren à se croire élu par Dieu pour expierle péché paternel. Ce n'est qu'après la mort de sonpère, en1838, que Kierkegaard selibérera de cette idée fixe, y voyantà la fois un signe de pardon et une sommationà la vie.En attendant, ses années de jeunessese passentdans l'insouciance d'une existence de dandy, influencée en cela par le romantisme ambiant.

Maissous l'apparente dissipation, la mélancolie, le « tranquille désespoir» demeurent, comme en témoigne le second épisodemarquant de sa vie.En1840, Kierkegaard se fiance avec Régine OIsen. Unan plus tard, le couple se sépare.

Mais une fidélitésecrète lesunira jusqu'à leur mort, Kierkegaard désignantmême Régine comme sa légataireuniverselle.

Ilmourra en 1855, elle en 1904. Defait, la présence de Régine imprègne toute l'œuvre de Kierkegaard, ce dernier voyant en elle un encouragement à continuer satâche, un aiguillon discretet permanent de sa quête spirituelle. Lathéorie des stades Écrivain prolifique, aux multiples pseudonymes, Kierkegaard seveut avant tout théologien duchristianisme. Toute son œuvre esttendue vers un point de rencontreavec Dieu. I: Mais comment l'atteindre ? D'abord, en ayant conscience du caractère unique et dynamique de chaque existence. Chacun doit accomplir seul son propre chemin en faisant l'expérience angoissante, mais salutaire, du choix.Or le choix diffère selon l'étape duchemin à laquelle on se trouve :c'est lathéorie des stades. Austade esthétique, le désir domine et l'individu vitdans l'éphémèreet le plaisir facile. Austade éthique,le devoir moral fait entendreses exigences etconduit l'homme à la responsabilité.Mais ce n'est qu'au stade religieux que l'humain s'engage pleinement dans une relation avec l'éternel divin.

Le choix absolu, dès lors, c'est la foi, puisqu'ellefait le choix de l'absolu. Penseurde la quête de soi et du dontotal, Kierkegaard voit dans l'instant duchoix un point crucial dudevenir de l'être, « ce que je fais devenant ce que je suis ». C'est pour avoir affirmé cette primauté de l'intériorité surl'idée abstraite et pour y avoirvu la marque de la vérité que Kierkegaard est reconnucommele fondateur de l'existentialisme, cecourant majeurdu xxesiècle, qui,dans sa forme athée, sera dominé par la pensée delean- Paul Sartre. Lesœuvresles plusjremarquablesdeKierkegaardsont :Ou bien... ou bien (1843), Crainte et Tremblement (1843), teConcept d'angoisse (1844), tesStades surle cheminde la vie (1845). ORIENTATION CONTEMPORAINE DELAPHILOSOPHIE SCANDINAVE (XXe SIÈCLE) L'Europe du Nord a, comme d'autres, ailleurs, entériné la ruptureavec l'idéalisme et la métaphysique traditionnelle.

Etce, pour se tourner vers une approche scientifique des problèmes, ainsiqu'en témoignent des préoccupations linguistiques (Hintikka enFinlande), épistémologiques (Hàgerstrômen Suède, Elster en Norvège, Kaila enFinlande) ou sociologiques (Westermarck en Finlande). Les penseurs danois, quant à eux, demeurent fidèles àune philosophie pratique, plaçant toujours l'éthiqueau cœur de leursrecherches (Hoffding, Kemp).. »

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