Devoir de Philosophie

La pitié est-elle une vertu ou une faiblesse ?

Publié le 17/02/2004

Extrait du document

Il importe que ce guerrier perpétuel qu'est l'homme ne se laisse point aller à se laisser fléchir. Pardonner ce serait renoncer. La pitié est une déchéance : l'on s'abaisserait à « se faire mouton » tandis que l'on est lion. Ce serait incompréhensible et d'ailleurs ridicule. 2. La pitié peut d'ailleurs conduire à des actions injustes ; c'est une maîtresse d'erreurs et de fausseté, capricieuse et contingente comme toute l'affectivité ; elle est « contagion d'une souffrance sentie ou supposée en autrui », et l'on ne sait plus, dans un phénomène de fusion ou de confusion aussi totale, distinguer ce qui sert de ce qui dessert autrui ; elle exclut le rôle de l'obligation, de la rationalité, de la justice ; elle refuse de se laisser justifier, motiver. Ce n'est donc point une donnée éthique, mais bien mystique. Aussi n'est-il pas étonnant de lire sous la plume de Schopenhauer que la pitié nous plonge au coeur du « grand mystère de l'éthique ». Est-ce encore de la morale ? 3.

« Analyse du sujet Sens de la question La question porte sur un sentiment, la pitié, dont Rousseau dit, dans le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes , qu'il consiste dans "la répugnance innée à voir souffrir son semblable".

Lorsque nous éprouvons de la pitié,non seulement il nous est désagréable de le voir souffrir, mais il nous répugne de lefaire souffrir.

On dira que nous sommes alors "pris de pitié", signifiant par là le caractèreen quelque façon subi, passif, de ce sentiment de commisération qui nous rend sensibleà la souffrance d'autrui comme si elle était la nôtre. La question est de savoir quelle valeur attacher à la pitié : est-elle une vertu ou une faiblesse? Une vertu, c'est-à-dire une disposition morale non seulement à ne pas fairele mal mais aussi, plus positivement, à faire le bien, une disposition par quoi noussommes rendus forts moralement (la vertu étant étymologiquement la forme morale queprend la force, force de résister au mal, force de susciter le bien).

Une faiblesse, c'est-à-dire, précisément, le contraire d'une force : une incapacité à lutter pour repousser etvaincre le mal et faire en sorte que le bien l'emporte sur lui; une défaillance, en somme,de la volonté. Demander si la pitié est une vertu ou une faiblesse conduit ainsi à s'interrogersur la valeur morale, au sens fort de vaillance, qui est spécifiquement la qualité de la volonté, du sentiment de commisération à l'égard d'autrui qui serait ou pourrait êtrevictime du mal. Présupposés de la question La divergence de point de vue entre deux courants philosophiques explique quel'on soit conduit à se demander si la pitié est une vertu ou une faiblesse : - un premier courant, dans lequel s'inscrivent Rousseau et Schopenhauer, tient la pitiépour la première des qualités morales, faisant d'elle pour ainsi dire la vertufondamentale dont les autres dépendent."C'est,[…] dans ce sentiment naturel, plutôt que dans des arguments subtils, qu'il fautchercher la cause de la répugnance que tout homme éprouverait à mal faire, mêmeindépendamment des maximes de l'éducation", écrit Rousseau dans le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes . Schopenhauer, de son côté, voit dans la pitié le sentiment à partir de quoi sedéveloppe l'acte moral.

C'est, pense-t-il, parce que les hommes se sententintuitivement prisonniers de l'absurdité de l'existence et de la logique destructrice de laVolonté qu'ils sont amenés à avoir pitié d'autrui : c'est alors qu'ils agissent moralementet non pas parce qu'ils suivent les commandements d'une hypothétique raison pratique. - un second courant, plus majoritaire, qui trouve sa première expression chez Platondans la bouche de Calliclès et son expression la plus vive chez Nietzsche, accuse lapitié d'aller contre la nature, appelée à être vigoureuse pour lutter contre les forces dedégradation qui la menacent.

L'un et l'autre mettent le bien dans forces de vie serviesen l'homme par une volonté forte, soucieuse de l'affirmation de sa puissance,impitoyable en un mot.Voici ce que déclare Calliclès dans le Gorgias de Platon : "La nature elle-même, selon moi, nous prouve qu'en bonne justice celui qui vaut plus doit l'emporter sur celui quivaut moins, le capable sur l'incapable.

Elle nous montre partout, chez les animaux etchez l'homme, dans les cités et les familles, qu'il en est bien ainsi, que la marque du. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles