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Platon et la damnation du corps

Publié le 16/04/2009

Extrait du document

platon
Tant que nous aurons le corps, et qu'un mal de cette sorte restera mêlé à la pâte de notre âme, il est impossible que nous possédions jamais en suffisance ce à quoi nous aspirons; et, nous l'affirmons, ce à quoi nous aspirons, c'est le vrai. Le corps, en effet, est pour nous source de mille affairements, car il est nécessaire de le nourrir; en outre, si des maladies surviennent, elles sont autant d'obstacles à notre chasse à ce qui est.Désirs, appétits, peurs, simulacres en tout genres, futilités, il nous en remplit si bien que, comme on dit, pour de vrai et pour de bon, à cause de lui il ne nous sera jamais possible de penser, et sur rien. Prenons les guerres, les révolutions, les conflits: rien d'autre ne les suscite que le corps et ses appétits. Car toutes les guerres ont pour origine l'appropriation des richesses.Or ces richesses, c'est le corps qui nous force à les acquérir, c'est son service qui nous rend esclaves. Et c'est encore lui qui fait que nous n'avons jamais de temps libre pour la philosophie, à cause de toutes ces affaires.Mais le comble, c'est que même s'il nous laisse du temps libre et que nous nous mettons à examiner un problème, li voilà qui débarque au milieu de nos recherches; il est partout, il suscite tumulte et confusion, nous étourdissant si bien qu'à cause de lui nous sommes incapables de discerner le vrai.Pour nous, réellement, la preuve est faite: si nous devons jamais savoir purement quelque chose, il faut que nous nous séparions de lui et que nous considérions avec l'âme elle-même les choses elles-mêmes.Alors, à ce qu'il semble, nous appartiendra enfin ce que nous désirons et ce dont nous affirmons que nous sommes amoureux: la pensée. Platon, Platon, Phédon - Ed. Flammarion, trad. M.Dixsaut, pp 216-271

Platon distingue d'emblée deux entités essentielles et complémentaires qui constituent un être humain. Le corps représente l'entité matérielle, physique tandis que l'âme, elle, est immatérielle, spirituelle. L'âme est sans cesse à la recherche du vrai car tel est le but de son existence. Cependant, ce qui l'en empêche, selon Platon, c'est le corps, lui et toutes ses futilités. Le corps est présenté comme le négatif de la pensée, c'est une malédiction qui accompagne l'âme sur son séjour sur Terre. En effet, le corps nécessite des soins incessants, parfois vitaux, parfois inutiles. Il est l'incarnation de tous les problèmes du quotidien tels l'alimentation, les maladies... Mais il est aussi le siège même des désirs, des convoitises, des peurs... Pour expliciter cette thèse, Platon prend ici l'exemple des guerres. Celles-ci sont en réalité le résultat, ou plutôt le moyen de s'approprier des richesses que l'on convoite. Or, de ces richesses, l'âme n'en a que faire. Seul le corps en sera le bénéficiaire après tant de conflits. L'âme, elle, reste passive et se laisse guider par le corps à la recherche de biens matériels. Cette recherche prend toute la vie d'un être humain, le corps est omniprésent et ainsi, il ne laisse jamais l'âme seule. Celle-ci n'a donc jamais de temps pour s'adonner à la pensée pour enfin accéder au vrai. Le corps ne donne jamais de répits à l'âme car il nécessite un entretien perpétuel. L'âme se laisse constamment guider par ce corps. C'est ainsi qu'elle manque de temps pour rechercher le vrai. Le corps est représenté comme un obstacle, parfois même l'objet qui dévie l'âme du chemin de la vérité. Selon Platon, l'âme constitue une personnalité tandis que le corps, lui, est juste un mal qui l'accompagne. Il est présenté comme un intrus qui soumet une âme à l'esclavage pour contenter ses désirs. Le corps est donc l'objet qui dévie l'âme de la philosophie elle-même.  

platon

« nous donne ici, implicitement un moyen pour que l'âme atteigne le repos et de ce fait, l'assurance qu'elle puissecontinuer sa route sur le chemin qui mène à ce qui est véritable.

Dans cet extrait, Platon ne nous suggère pas dedominer et contrôler son corps, ou plus modestement, d'opposer parfois quelques résistances à ces caprices.Ilsemble penser que cela relèverait de l'impossible puisqu'il faut toujours entretenir son corps, au moins satisfaire sesdésirs nécessaires vitaux.

Tenter d'ignorer son corps ne rapporterait rien d'autre que des souffrances physiques quiperturberaient encore plus l'âme, donc ceci n'est pas un moyen de la remettre dans le "droit chemin".

Platon noussuggère un autre moyen, bien plus radical: celui de séparer l'âme du corps.

C'est en effet à ce seul moment quel'âme aura tout le loisir de poursuivre sa quête du vrai.

Ce sont toutes ces observations et déductions qui ontpoussée Platon à penser à une séparation radicale entre l'âme et le corps.

Selon lui, l'âme ne peut penser que si elleest isolée.

Nous devons solliciter l'âme pour penser que lorsqu'elle est seule et éloignée, séparée de cettemalédiction qui la hantait et qu'était le corps.

De plus, dans cette dernière partie, Platon oppose une dernière foisl'âme et le corps au niveau de leurs préoccupations.

Ces derniers n'ont pas les mêmes désirs, les mêmes passions.Ainsi, les désirs du corps avaient pour objet des biens matériels qui ne sont d'aucune utilité pour un philosophe.

Orici Platon affirme que la seule passion qui peut habiter une âme est la pensée.

L'âme est destinée à utiliser, solliciterla pensée.

Or, les désirs du corps et ceux de l'âme peuvent être considérés comme étant radicalement opposés.

Ilsne pouvaient donc cohabiter.

Ceci est un élément de plus qui a amené Platon à proposer la séparation de l'âme etdu corps comme véritable solution pour accéder au vrai.Mais si nous essayons d'interpréter cette solution proposée, on pourrait faire correspondre la séparation de l'âme etdu corps à la mort de l'individu.

Platon semble alors penser que l'âme est immortelle tandis que le corps est luipérissable.

Le seul moyen pour l'âme d'obtenir le repos serait en réalité la mort de l'individu concerné.

La mort estalors ici considérée comme étant la libération de l'âme d'un fardeau qui lui était omniprésent.

Celle-ci, alors libéréede cette enveloppe corporelle qui la perturbait sans cesse, aura toute l'éternité pour continuer sa quête du vrai.

Lamort a donc ici un aspect majoritairement positif et est considérée comme une libération, ce qui pourrait paraîtrepour le moins surprenant pour l'opinion générale.

Par cette vision des choses, Platon nous émet alors un messageimplicite qui ne peut être entendu qu'après une interprétation.

La mort est ici représentée comme la libération del'âme pour que celle-ci ait ensuite tout le temps de philosopher.Donc, un véritable philosophe ne doit pas craindre lamort, comme le commun des mortels préoccupés par l'acquisition de biens matériels, mais, selon Platon, il se doit delui tendre la main.

Le vrai ne peut être atteint qu'après la mort de l'individu, et ce moyen est la seule solution selonPlaton.

Ce texte nous suggère implicitement de ne pas craindre la mort mais plutôt de la considérer comme telle,c'est-à-dire la libératrice qui achèvera toutes nos souffrances et le moyen d'accéder enfin au vrai auquel l'âme estdestinée.Cependant, cette réflexion soulève bien des questions.

Certes, selon Platon, un philosophe doit accueillir la mort àbras ouverts.

Mais est-il permis de penser au suicide? Comme nous le présent ici¨Platon, seule la mort peut nouslibérer du corps, le philosophe doit-il alors tenter de se suicider pour accéder au vrai? Si tel est le cas, son idéeparaîtrait invraisemblable.

Mais dans le cas contraire, celle-ci serait alors porteuse de nombreux paradoxes... En conclusion, le corps et ses passions ne provoquent que des effets néfastes sur l'individu.

En effet, ils sont laprincipale cause du détournement de la quête de la vérité et ne laissent jamais de répits à l'âme.

La seule solutionpour que celle-ci atteigne le repos et puisse de ce fait se consacrer à la pensée est la séparation entre l'âme et lecorps, soit la mort de l'individu.

Platon nous suggère ici implicitement de ne pas craindre la mort mais plutôt del'accueillir à bras ouverts.

Cependant, est-il permis à un philosophe de se donner la mort pour accéder au vrai?A titres de parenthèse, dans Phédon, Platon développe ses idées à travers les propos de Socrate juste avant sonexécution.

Ces circonstances peuvent alors en partie expliquer cette thèse présentée ici mais aussi le refus des'évader et le calme légendaire dont Socrate a fait preuve avant sa mise à mort.... »

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