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Pourquoi avoir peur des mots ?

Publié le 29/12/2005

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Il s'agit donc ici de justifier, et plus encore de légitimer cette peur - afin de savoir si on peut l'élever au rang d'impératif catégorique.  C'est donc plus profondément la nature même du langage qui est ici mise à la question, au travers des mots. C'est bien sa force, son pouvoir, ses effets - et son s - qui doivent être interroger.   Problématique                     Est-il non seulement légitime d'avoir peur des mots, mais encore possèdent-ils un pouvoir suffisamment inquiétant et dangereux pour que l'on puisse élever une telle peur au rang d'impératif quasi morale - au rang d'obligation morale ? De quelle nature est donc ce pouvoir - ou ces pouvoirs - des mots ? En quoi et dans quelle mesure constitue un danger pour l'homme et le monde ? Les mots sont-ils dangereux en eux-mêmes ou ne doit-on pas plutôt craindre de l'usage de que l'on en fait ? Bref, c'est bien la nature des mots - et avec elle celle du langage - qu'il s'agit ici d'interroger et de mettre au jour au travers ses différents pouvoirs.   Plan   I-                   Avoir peur des mots : force rhétorique et politique   ·        Les mots au service du pouvoir : La naissance de la démocratie athénienne fut aussi l'invention de l'agora la place publique sur laquelle les citoyens (à l'exception des esclaves) venaient prendre la parole : symbole du pouvoir donné aux assemblées de citoyens élus, la place publique est le lieu des affrontements verbaux entre les plus habiles de ces orateurs. Il faut donc savoir parler pour être élu, et savoir emporter l'assentiment des auditeurs.
  • Angles d’analyse

   Dans Les lois, Platon rappelle que, dans l’exercice de sa fonction, le législateur doit parfois utiliser des mythes, des récits imagés, pour persuader du bien-fondé d’une loi les citoyens qui ne se consacrent pas à l’étude du contenu de ces lois. Les mots auraient donc le pouvoir de produire, à défaut de la connaissance, l’adhésion du public, de persuader et de convaincre : s’ils ont un tel pouvoir, les mots ne sont-ils pour le politique qu’un instrument de domination ? C’est dans cette perspective d’analyse que l’on peut replacer la question de la peur des mots.  Car qui dit peur des mots, leur confère a fortiori un certain pouvoir. C’est donc le pouvoir du langage, et même sa force, qui sont ici mis à la question.  On s’interrogera donc sur les différents pouvoirs des mots, en essayant d’unir problématiquement leurs effets négatifs et aussi positifs. Il s’agit donc ici de justifier, et plus encore de légitimer cette peur – afin de savoir si on peut l’élever au rang d’impératif catégorique.  C’est donc plus profondément la nature même du langage qui est ici mise à la question, au travers des mots. C’est bien sa force, son pouvoir, ses effets – et son s – qui doivent être interroger.

  • Problématique

                    Est-il non seulement légitime d’avoir peur des mots, mais encore possèdent-ils un pouvoir suffisamment inquiétant et dangereux pour que l’on puisse élever une telle peur au rang d’impératif quasi morale – au rang d’obligation morale ? De quelle nature est donc ce pouvoir – ou ces pouvoirs – des mots ? En quoi et dans quelle mesure constitue un danger pour l’homme et le monde ? Les mots sont-ils dangereux en eux-mêmes ou ne doit-on pas plutôt craindre de l’usage de que l’on en fait ? Bref, c’est bien la nature des mots – et avec elle celle du langage – qu’il s’agit ici d’interroger et de mettre au jour au travers ses différents pouvoirs.

« également à tous : la justice veut qu'elle le confie à ceux qui représenteront lamajorité des opinions.

Par conséquent, s'il est impossible de convaincre [= emporterl'assentiment de l'interlocuteur et son adhésion à une thèse, par des argumentsdont la raison admet la valeur ou reconnaît la vérité] tous les citoyens, il faut aumoins en persuader [= amener quelqu'un à penser, à croire ou faire quelque chose,en usant des propres arguments de celui qu'on veut persuader.

Le charme peutsuffire à persuader] le plus grand nombre.

Il ne s'agit pas d'expliquer en détail àchacun pourquoi il aurait des raisons de s'en remettre aux décisions d'un autre, maisseulement de trouver des arguments imparables. · Savoir est donc la principale qualité de l'homme politique, puisque comme l'expliquait Gorgias, il doit pouvoir être libre lui-même pour commander les autres.

Ilsera celui qui a « le pouvoir de persuader par ses discours les juges au tribunal, lessénateurs dans le Conseil, les citoyens dans l'assemblée du peuple, et ainsi de faireson esclave du médecin, du juge, du sénateur » ( Platon , Gorgias, 452a). · On peut donc affirmer que les mots ont un très grands pouvoir, puisque c'est à travers eux que se structure la perception de l'univers dans lequel nous vivons.Maîtriser les mots c'est en ce sens maîtriser les choses.

Mais ce pouvoir en induitbien d'autre : celui de manifester malgré soi dans pensées ou désirs pourtantinconscients.

On comprend en ce sens aussi que l'on puisse, à juste titre avoir peurdes mots en cela qu'ils semblent posséder encore plus de pouvoir que la penséeelle-même, poussée à l'expression parfois malgré soi. · De la même manière, Lévi -Strauss montre qu'il conviendrait parfaitement d'associer la forme écrite du langage dans la préhistoire et les premières formessystématiques d'exploitation de l'homme (Tristes Tropiques). II- Un pouvoir des mots positif : pouvoir et domaine public · La publicité au fondement de la loi : Un pouvoir ne peut cependant se maintenir sur la seule domination par le discours, pour cette raison même que ce pouvoir peutêtre donné à n'importe qui, et qu'il est donc à la merci du premier nouvel orateurvenu : cela ne signifie pas que la domination de la place publique fonde le pouvoir,mais plutôt que la légitimité du pouvoir doit pouvoir être mesurée sur la placepublique. · Il suffit de savoir parler pour donner l'illusion de la légitimité, mais il ne suffit pas qu'une loi soit édictée, prononcée pour être légitime.

Une loi qui ne supporterait pasd'être rendue publique, qui ne pourrait devenir, pour ma raison, une maxime généralede mes actions (selon l'impératif moral kantien) ne saurait être une loi légitime.

C'estle droit, comme système de lois, indépendamment de son contenu spécifique àchaque Etat, qui a cette forme publique, parce qu'il constitue une dimensioncommune à tous les citoyens. · Les ambiguïtés de la communication : Au nome de l'intérêt général, la raison d'Etat peut justifier publiquement, dans une certaine mesure, l'application d'une loiinjuste : trouver les mots justes suffit à faire croire qu'on parle véritablement dejustice. · C'est le ressort de toute propagande, de tout discours qui sert à entraîner les foules : le démagogue empêche la faculté critique de s'exercer en flattant lesintérêts et endort la faculté (ou le désir) de distinguer le vrai du vraisemblable(littéralement, qui à l'apparence du vrai) en usant du pouvoir de suggestion ; lerisque d'un tel glissement ne peut être absolument évité, dès lors que la sphèrepublique sert d'intermédiaire entre citoyens et gouvernants. III- Ne pas avoir peur des mots : un impératif du fait que le langage est à l'origine de toute communauté possible. · Ne pas avoir peur des mots ne signifie pas de refuser d'exercer sa faculté critique quant à la force de persuasion, et les dérives d'un pouvoir des mots important ; celasignifie seulement qu'il ne faut pas avoir peur des mots précisément parce que ceserait refuser toute possibilité de communication – le langage étant à l'origine detoute communauté possible.

Refuser de se confronter aux mots, à leur force, c'est,dans une certaine mesure refuser son humanité. · Car parler c'est avant tout être un sujet universel naître au milieu d'une langue ce n'est pas seulement accéder à une culture particulière, déterminées ; c'est aussidu même coup découvrir que la parole est partagée.

Dire « je » paradoxalement nem'isole pas, mais donne à cette individualisation par la parole une portée et un sensuniversels, parce que mon individualité prend sens pour les autres par cettedésignation. · C'est donc le langage quel qu'il soit qui réalise la communauté, et non pas l'inverse.

C'est de ce langage que naît l'idée même de « commun », qu'elle prendforme, par exemple, dans des concepts généraux.

Ainsi s'incarne l'existence politique. »

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