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Pourquoi l'homme a-t-il toujours besoin du regard d'autrui?

Publié le 06/01/2005

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Entre autrui et moi-même, il y a un néant de séparation.[...] Par le regard, j'éprouve autrui concrètement comme sujet libre et conscient."( L'être et le néant)   2. Le regard d'autrui me fait prendre conscience de moi Mais il ne s'agit pas d'avoir besoin d'autrui pour vivre. Nous avons besoin d'autrui parce qu'il nous aide à nous constituer, mais aussi parce qu'il donne épaisseur et sens au monde.. En effet, sans autrui, sans le regard d'autrui sur soi, on ne saurait atteindre la conscience de soi. C'est une erreur d'imaginer que je puisse me découvrir en faisant abstraction du monde et des autres, comme le suggère le doute cartésien. Le regard que l'on peut avoir sur soi dépend du regard qu'autrui a de soi : l'autre est un médiateur entre moi et moi-même. Ainsi pour Hegel une conscience ne peut être véritablement une conscience que si elle est reconnue comme tel par une autre conscience. De même, très tôt, Aristote affirmait qu'apprendre à se connaître était chose très difficile et que "par conséquent, à la façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons voir notre visage, quand nous voulons apprendre à nous connaître, c'est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir.

L'homme ne vit pas seul, il est confronté en permanence à d'autres personnes.  Certes, il peut s'isoler à l'âge adulte mais il ne peut réellement devenir un homme sans l'aide d'autrui. Les rares exemples d'enfants sauvages, élevés loin de la civilisation des hommes, témoignent de l'incapacité à devenir pleinement un homme sans l'aide d'autres hommes. L'homme semble être plus dépendant de son environnement social que les animaux, pour développer ses capacités psychologiques et intellectuelles. Comment peut-on expliquer ce fait? Il faut d'abord comprendre ce qu'est autrui pour moi. C'est d'abord l'autre, le différent. Mais généralement nous privilégions sous le nom d'autrui les seuls êtres humains parce que je sens, je présuppose qu'ils partagent avec moi une façon d'être, de voir le monde que le reste des choses n'ont pas.  Qu'est ce que m'apporte le regard d'autrui sur moi? Puis-je avoir conscience de moi sans avoir conscience d'autrui ?

« De même, très tôt, Aristote affirmait qu'apprendre à se connaître était chose très difficile et que "par conséquent, àla façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons voir notre visage, quand nous voulons apprendre ànous connaître, c'est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir."Dans une même lignée, Sartre affirme que je me vois tel qu'autrui me voit et autrui est constitutif de la consciencede soi spontanée que chacun a : ce qu'on est pour soi, c'est d'abord ce qu'on est pour autrui.Ainsi, le regard d'autrui sur moi, m'est indispensable pour prendre conscience de moi-même.

3.

Le regard d'Autrui m'oblige au respect et à la bonté Pour Lévinas, l'éthique est la « voie royale vers l'absolument autre » (Préface).

En effet, le désir d'infini n'est pas undésir au sens habituel et négatif de manque mais une expérience sans retour possible de soi vers l'autre, du familiervers l'étranger.

Car « l'absolument autre, c'est autrui » (Rupture de la totalité), autrui n'est donc pas la négation demoi-même, ce qui impliquerait encore une relation d'identité, mais il est positivement « l'absolument autre ».

Autruime révèle le sens de l'éthique comme « rapport non allergique du Même et de l'Autre » (L'Être comme bonté).L'éthique trouvant son sens premier dans la relation de face à face, elle présuppose une ouverture à « l'absolumentautre » que seul le visage d'autrui permet d'entrevoir.

L'éthique est bien originellement une « optique » mais sansimage, car la vision est encore une totalisation.

Or le visage empêche le regard de se fixer, il nous tourne vers unau-delà, un ailleurs ; il figure « l'infiniment autre » qu'on ne parviendra jamais à totaliser.

Le visage d'autrui se donneà voir comme « révélation » de l'Autre dans sa nudité et sa fragilité.

Il m'appelle alors à la responsabilité infiniedevant lui.Ainsi, pour Levinas, le fait qu'autrui soit au fondement même de mon être, soit la condition nécessaire de ma propreconstitution, m'oblige à respecter autrui.

Pour lui, le visage d'autrui porte l'interdiction de la violence, le "tu netueras point".

Autrui est donc avant tout celui qui fait naître en moi l'exigence éthique.

« Je pense plutôt que l'accès au visage est d'emblée éthique.

C'est lorsque vous voyez un nez, des yeux, un front, un menton, et que vous pouvez les décrire, que vous vous tournez vers autrui comme vers un objet.

Lameilleure manière de rencontrer autrui, c'est de ne pas même remarquer la couleur de ses yeux ! Quand on observela couleur des yeux, on n'est pas en relation sociale avec autrui.

La relation avec le visage peut certes être dominéepar la perception, mais ce qui est spécifiquement visage, c'est ce qui ne s'y réduit pas.

Il y a d'abord la droiture même du visage, son expression droite, sans défense.

La peau du visage est cellequi reste la plus nue, la plus dénuée.

La plus nue, bien que d'une nudité décente.

La plus dénuée aussi: il y a dansle visage une pauvreté essentielle.

La preuve en est qu'on essaie de masquer cette pauvreté en se donnant desposes, une contenance.

Le visage est exposé, menacé, comme nous invitant à un acte de violence.

En même tempsle visage est ce qui nous interdit de tuer.

» Lévinas , « Ethique et infini ». Lévinas commence par opposer perception d'un objet et rencontre authentique d'autrui.

Quand je pose l'autre comme objet, je le projette sur une surface d'objectivité : il m'apparaît comme un tableau à décrire, une surface àobserver et détailler, son unité éclate en autant de petits objets à commenter (les éléments du visage sont eux-mêmes réductibles à des unités plus petites.

Ce rapport est un rapport théorique qui ne me donne pas véritablementautrui : dans un processus de connaissance, ma conscience s'assimile l'objet plutôt qu'elle ne s'ouvre à l'altérité dudonné.

En posant autrui comme objet, je reste seul.La saisie véritable d'autrui (celle qui me fait vraiment sortir de moi et rencontrer une dimension irréductible auxsimples données de l'expérience) ne donne pas une richesse d ‘éléments à décrire mais présente une pauvreté.L'autre se présente simultanément comme sans défense et invitation au respect : en effet, la possibilité physique detuer autrui se donne en même temps que l'impossibilité morale d'accomplir cet acte.

Autrui nous est livré dans unedimension éthique comme celui que je n'ai pas le droit de tuer.

En effet, tant que l'homme ne vit sans connaître l'homme, il ne peut pas faire la différence entre ce qui luiappartient, le monde et ce qui n'est pas lui.

Levinas affirme que le règne du même est le règne de la guerre.L'irruption d'autrui dans mon monde, me confronte avec ce que je ne peux maîtriser.

Autrui me résistera toujours.Même sous la menace, il peut user de sa liberté et refuser de me donner ce que je lui demande.

Autrui est donc cequi interrompt l'illusion de puissance et la violence de l'individu.S'ouvrir à autrui est donc un gage d'humilité, la prise de conscience que je ne suis pas le centre du monde, que jene suis unique et seul au monde.

Ainsi, comme l'explique Freud, le petit enfant est persuadé que tous ses désirsseront assouvis selon le principe de plaisir, c'est à travers ce que les autres lui accordent ou lui interdisent qu'ilprend conscience qu'il ne lui est pas tout permis de faire, en quelque sorte, qu'il n'est pas le maître du monde.Respecter autrui, c'est alors le poser comme limite à mon droit naturel d'user de toutes choses et des autres à monprofit.

Autrui me destitue de mon amour-propre et de l'égocentrisme.

Ainsi, autrui est cet être qui me ressemble et pourtant n'est pas moi.

C'est un individu que je ne peux maîtriser etqui met à mal mes pouvoirs et ma liberté.

Cet autre porte un regard sur moi et ce regard me permet de prendreconscience de ce que je suis, tant il est vrai qu'il est compliqué de se regarder soi-même.

Mais en fondant maconscience, l'autre m'oblige à la bonté, au respect.

En me regardant, il m'interdit de me croire le centre du monde, ilm'arrache de mon égoïsme.. »

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