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Pourquoi le passé est-il sans cesse récrit par les historiens ?

Publié le 27/02/2008

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Sans altérer même un trait historique, en étendant ou resserrant des circonstances qui s'y rapportent, que de faces différentes on peut lui donner ! Mettez un même objet à divers points de vue, à peine paraîtra-t-il le même, et pourtant rien n'aura changé que l'oeil du spectateur. Suffit-il, pour l'honneur de la vérité, de me dire un fait véritable en me le faisant voir tout autrement qu'il n'est arrivé ? Combien de fois un arbre de plus ou de moins, un rocher à droite ou à gauche, un tourbillon de poussière élevé par le vent ont décidé de l'événement d'un combat sans que personne s'en soit aperçu ! Cela empêche-t-il que l'historien ne vous dise la cause de la défaite ou de la victoire avec autant d'assurance que s'il eût été partout ? Or que m'importent les faits en eux-mêmes, quand la raison m'en reste inconnue ? et quelles leçons puis-je tirer d'un événement dont j'ignore la vraie cause ? L'historien m'en donne une, mais il la controuve ; et la critique elle-même, dont on fait tant de bruit, n'est qu'un art de conjecturer, l'art de choisir entre plusieurs mensonges celui qui ressemble le mieux à la vérité. » Rousseau, Emile ou de l'éducation, Livre IV.   ·      La rencontre entre l'historien et les faits historiques n'est pas externe ou transcendante. Comme Kant l'explique à travers la révolution copernicienne, le sujet construit aussi son objet. Le sujet est actif, ce n'est pas une rencontre passive avec les faits.

« Dans l'Emile, Rousseau imagine l'éducation d'un enfant dont il se suppose le précepteur depuis la prime jeunessejusqu'à l'âge d'homme.

Parmi certains de ses principes, il suggère la méfiance à l'égard des livres qui ne nousapprennent rien sinon à parler de ce que nous ne connaissons pas.

Les livres d'histoire ne dérogent pas à cetterègle selon Rousseau, ils présentent des faits qui ne sont que des interprétations subjectives de phénomènesdont la série et les causes nous échappent.

On les détermine seulement à partir de ouï-dire, d'impressions, derécits et témoignages plus ou moins fiables, quand ce n'est pas tout simplement pour servir ce qui nous arrangele mieux.

Alors, au lieu d'établir la vérité, on présente des conjectures qui falsifient la réalité, et Rousseau estextrêmement sévère sur ce point puisqu'il déclare que l'histoire consiste à choisir, entre plusieurs mensonges,celui qui ressemble le mieux à la vérité.

On peut tirer un double enseignement de cette citation.

D'abord, il fauttenir compte du fait que l'histoire est effectivement liée à une interprétation et ce, quelle que soit la bonnevolonté ou la qualité des outils de l'historien (quand bien même il en serait un témoin direct).

Il est doncsouhaitable de garder un esprit critique à l'égard de l'histoire qui nous est rapportée, et dont l'exposition peuttoujours servir des idéologies ou des intérêts particuliers.

Quand on cherche un sens à l'histoire, on peut aussien arriver à tout justifier, y compris le mal conçu comme étape nécessaire à la réalisation d'un plus grand bien.Par ailleurs, quand on écrit l'histoire, on peut le faire au profit de ce qui nous arrange ou éviter ce qui nousembarrasse (il a fallu du temps avant que l'on parle de "Guerre d'Algérie" au lieu "d'événements" dans les manuelsscolaires et qu'on y consacre plus qu'un paragraphe).

Mais il faut aussi se garder d'une méfiance qui tourneraitau révisionnisme le plus malsain : critiquer nos interprétations de l'histoire et la notion de "fait historique" ne doitpas occulter l'évidence.

Nier l'existence des chambres à gaz est par exemple un crime contre l'histoire : les mortsne doivent pas mourir deux fois. · La rencontre entre l'historien et les faits historiques n'est pas externe ou transcendante.

Comme Kant l'explique à travers la révolution copernicienne, le sujet construit aussi son objet.

Le sujet est actif, ce n'estpas une rencontre passive avec les faits.

Il y a donc une part de subjectivité dans toute interprétationhistorique, une part d'arbitraire.

Chacun interprète le fait à travers son propre héritage personnel, ce qui luidonne un éclairage toujours particulier.

Ainsi, un même fait peut trouver plusieurs interprétations.

Il y aplusieurs points de vue possibles.

Les historiens interprètent l'histoire comme un texte (multitude de senspossible), c'est une question herméneutique. · Ainsi, l'historien, construit et interprète l'histoire. 2- Inventions de nouvelles méthodes et de nouveaux domaines : · L'histoire est infinie parce que nous avons toujours de nouvelles questions et de nouveaux domaines s'ouvrent à nous.

Les centres d'intérêt changent.

C'est une déconstruction permanente de l'histoire.

On peutécrire sur tout. · Par exemple, si au début on ne relatait que des faits politiques (le 3eme Reich, la venue d'Hitler au pouvoiretc.), on va s'intéresser par la suite à l'histoire des mentalités, du quotidien, à l'histoire des idées, histoire dela sexualité, comme le fait Foucault, etc. · De nouvelles théories apparaissent ainsi que de nouvelles connaissances qui permettent d'actualiser le regard sur des faits antérieurs, de remettre en question l'histoire et de réinterpréter les faits de façontoujours renouvelée. · Par exemple : l'utilisation de la dialectique marxiste pour analyser de façon nouvelle les rapports au pouvoir.Quelle classe est dominante ? Qui a l'argent ? Qui contrôle le marché ? Cette nouvelle théorie apporte denouvelles lumières sur des faits déjà existants. · Ou par exemple encore, la « nouvelle histoire » fondée dans les année 30 par Marc Bloch et Lucien Fevbreinsiste sur l'existence de différents niveaux de la réalité historique.

Ces historiens créent les Annales d'histoire économique et sociale et ils multiplient les sources et diversifient les interrogations (culturelles, sociales, économiques). 3- Actualiser le passé : · Notre regard sur le passé change en fonction de notre expérience et en fonction du présent.

Ainsi, à lalumière du présent nous réinterprétons les faits passés. · Par exemple, un historien qui écrit aujourd'hui une biographie d'Alexandre le Grand, ne peut pas ne pas êtreinfluencé par l'image négative d'hommes influent du XX°siècle, tels Hitler, Mussolini ou Franco… · Les historiens écrivent et chaque texte est une partie du cercle herméneutique de l'histoire.

Ce que leshistoriens peuvent faire, c'est nous donner un bilan plus au moins équilibré de l'histoire.

Ils ne peuvent queraconter une histoire narrative. Conclusion : Parce que nous reconstruisons et réinterprétons sans cesse l'histoire, parce que nous inventons de nouveauxdomaines et que nous utilisons de nouvelles théories, parce que des événements actuels que nous vivons nousinfluencent, il n'est pas possible de penser que l'écriture de l'histoire a une fin.

C'est pourquoi on n'a de cesse l'écrireencore et encore.. »

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