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Pourquoi revenir sur le passé ?

Publié le 04/02/2004

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Pour les Grecs, l'histoire ne présente guère de sens global : elle est une suite d'événements entre lesquels il est à peu près impossible de repérer un ordre rationnel. Ce n'est qu'avec les historiens marqués par la christianisation que se manifeste la possibilité d'un sens de l'histoire, qui soit à la fois une orientation linéaire et une signification.Il n'empêche que le passé, tout en étant aboli, reste d'une certaine façon présent, ne serait-ce que parce que ses conséquences peuvent venir influencer le présent. Saint Augustin évoque ainsi un triple mode du présent ou de la présence : il y a le présent du passé, le présent du présent et le présent de l'avenir, puisque la conscience s'ouvre sur ces trois aspects, et se montre capable d'être préoccupée de manière égale par leurs apports. Si, pour l'individu, le présent du passé renvoie à la mémoire, la société doit se composer une sorte de mémoire collective : l'histoire en tant que récit explicatif. [II. Les attentes à l'égard de l'histoire]On peut ainsi considérer que la raison la plus élémentaire pour revenir sur le passé réside dans le souci de mieux comprendre l'origine du présent. Ce qui renvoie à tout autre chose qu'une simple série d'anecdotes si l'on admet, de manière un peu hégélienne, que «être c'est avoir été« : c'est alors très radicalement que le passé nous constitue, puisque c'est sur ce que nous fûmes que repose notre être actuel, et le connaître, c'est savoir non seulement d'où l'on vient, mais aussi ce que l'on est.De ce point de vue, l'histoire peut révéler aussi bien la grandeur que la médiocrité du passé : si elle autorise une appréciation du chemin accompli, elle peut légitimer la fierté, mais aussi la mauvaise conscience. Les débats qui agitent périodiquement l'actualité dans les médias montrent qu'une société ne connaît jamais assez son passé, et notamment le plus proche, et qu'elle peut dès lors se faire quelques illusions, tant sur ce qu'elle a accompli que sur les qualités qu'elle se reconnaît ordinairement.

- Le sujet est vaste : « revenir sur le passé « n'est pas synonyme de connaître le passé ; cela peut correspondre à différents projets, liés, éventuellement, à la connaissance, mais aussi à la morale, à la compréhension du présent ou à l'angoisse du futur. Il faudrait ordonner ces différents points de vue. - Des exemples peuvent être utiles, mais on ne les utilisera que pour illustrer des analyses : leur simple énumération ne suffit jamais à traiter un sujet. - Le « pourquoi « peut signifier aussi « à quoi bon ?« : on évoquera aussi des attitudes considérant que tout retour sur le passé est inutile ou stérile. - Ne pas se contenter d'oppositions schématiques entre un passé enfui et un présent qui seul mériterait quelque intérêt : les liens entre passé et présent doivent être analysés.

« [III.

Et l'avenir ?] À la fin du XIX siècle, Nietzsche réagit vigoureusement contre la fascinationpour le passé, l'histoire et les avertissements que l'on croit pouvoir endéduire.

« Le roc : ce fut » ne risque-t-il pas en effet de stériliser laconscience, en lui montrant les risques de toute entreprise, de tout passageà l'acte ? Comment l'homme pourrait-il se construire un avenir, c'est-à-diretout simplement vivre, s'il doit désormais, avant de se lancer dans quelqueaction que ce soit, peser longuement le pour et le contre, envisager desconséquences éventuellement néfastes, interroger le passé pour apprendre àse méfier de lui-même ?Il est clair que l'histoire a souvent et durablement été considérée commedonneuse de leçons possibles.

Revenir sur le passé nous permettrait alors,non seulement de rendre plus claire notre existence actuelle, mais de surcroîtd'anticiper sur notre avenir.

Traditionnellement, l'enseignement moralcherchait dans le passé des exemples de conduites à réitérer, des modèles decourage ou de vertu susceptibles d'entraîner les princes (et éventuellementquelques autres) dans le droit chemin.Le défaut d'une telle conception, ou même sa contradiction radicale, c'estque, tout en affirmant l'existence de l'histoire, elle la nie discrètement enadmettant que les événements et les conduites peuvent s'y répéter.

À cetteobjection première, il est facile d'en ajouter une autre : pour prévoir quoi quece soit du réel, il fait d'abord en connaître la loi, et il n'est pas établi quel'histoire, si scientifiques qu'en soient devenues les méthodes, est en mesure de formuler, à propos du passé et de l'agir des hommes, de véritables lois.

Car si de telles lois pouvaient êtreformulées, on suppose qu'elles auraient pu éviter la réapparition périodique d'événements négatifs, à commencer parles guerres...

Soyons donc sans illusion à ce propos : revenir sur le passé n'autorise aucune prévision pour l'avenir. [Conclusion] Il ne suffit pas que le passé ait eu lieu, parce que la conscience veut vivre les trois instances du temps : elle nepeut se contenter d'un présent sur lequel il n'y aurait plus à revenir dès qu'il serait passé.

Revenir sur le passé, c'estdonc l'explorer pour en déceler le sens, les impasses ou les grandeurs – peu importe : il convient de le rendre plusclair, et de bénéficier de cette clarté.

Ce qui indique que ce retour est interminable, puisque le passé n'en finit pasde s'enrichir du vécu actuel, et que rien ne peut établir que cette actualité aura été vécue en toute lucidité oucompréhension.. »

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