Pouvons-nous dire n'importe quoi n'importe comment ?
Publié le 16/03/2004
Extrait du document
Ici les hommes ne craignent pas tant le
fait d'être trompés que le fait qu'on leur nuise par cette tromperie : à ce
niveau-là aussi, ils ne haïssent pas au fond l'illusion, mais les
conséquences pénibles et néfastes de certains genres d'illusions. Une
restriction analogue vaut pour l'homme qui veut seulement la vérité : il
désire les conséquences agréables de la vérité, celles qui conservent la
vie, mais il reste indifférent face à la connaissance pure et sans effets et
ressent même de l'hostilité à l'égard des vérités éventuellement nuisibles
et destructrices. »
III. Langage et vérité : les limites du
« n'importe quoi »
On peut peut-être résoudre ce problème de
l'efficace pernicieuse d'un mauvais emploi du langage en envisageant un lien
étroit du langage à la vérité, lien qui serait à la fois d'expression et
d'adéquation. Cela permettrait de sauver en même temps l'existence du
langage, et de ménager une place au « n'importe quoi » ou au « n'importe
comment » en tant que ceux-ci peuvent être créateurs d'idées ou
transformateurs positifs du langage.
Foucault, Les mots et les choses
« Sous sa forme première, quand il fut donné
aux hommes par Dieu lui-même, le langage était un signe des choses
absolument certain et transparent, parce qu'il leur ressemblait. Les noms
étaient déposés sur ce qu'ils désignaient, comme la force est écrite dans le
corps du lion, la royauté dans le regard de l'aigle, comme l'influence des
planètes est marquée sur le front des hommes : par la forme de la
similitude. Cette transparence fut détruite à Babel pour la punition des
hommes. Les langues ne furent séparées les unes des autres et ne devinrent
incompatibles que dans la mesure où fut effacée d'abord cette ressemblance
aux choses qui avait été la première raison d'être du langage. (.
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